SUIVEZ EN DIRECT A 15H (HEURE DE PARIS) SUR LE SITE INTERNET DE TV5MONDE LE DISCOURS DE POLITIQUE GENERALE DU PREMIER MINISTRE MANUEL VALLS Arithmétique compliquée Manuel Valls a pris soin d’entendre longuement les députés socialistes à l’Assemblée Nationale, dont il va solliciter ce mardi après-midi un nouveau vote de confiance. Après le remaniement gouvernemental de fin août, et le remplacement très symbolique, au ministère de l’économie, d’Arnaud Montebourg par le social libéral Emmanuel Macron, le premier ministre français n’était pas obligé de retourner devant les élus. Il l’a fait, affirment ses proches, «car il est convaincu de pouvoir obtenir une majorité suffisante pour démontrer aux frondeurs du Parti socialiste qu’il tient solidement les rênes». Le 8 avril, tout juste nommé à Matignon par François Hollande, l’ancien ministre de l’intérieur avait obtenu une majorité absolue de voix avec 306 voix pour, 239 contre et 26 abstentions. Le groupe socialiste compte actuellement 289 députés – il s’est séparé ces derniers jours de l’ex ministre Thomas Thévenoud – soit exactement la moitié des 577 sièges. Le vote des radicaux de gauche sera donc particulièrement important pour contrer les élus PS désireux de s’abstenir. De ses consultations avec les députés socialistes de plus en plus inquiets de l’abysse d’impopularité dans laquelle est englué le président de la République, le premier ministre est sorti convaincu que beaucoup d’entre eux cachent, derrière leur posture parfois frondeuse, un sens des réalités dont il peut profiter. Lors d’échanges «off» avec la presse, plusieurs de ses conseillers affirment que les échanges, la semaine passée, ont été moins tendus que prévus, et que le scénario de l’université d’été du PS à la Rochelle, fin août, peut se reproduire. Manuel Valls avait alors réussi à retourner la salle en sa faveur, et à limiter la contestation contre lui, en faisant état de sa volonté d’avancer «ensemble» et en réexpliquant la nécessité de réformer le pays. «Il ne faut pas oublier que ce discours d’investiture va être diffusé en direct à la télévision et les réponses des députés aussi souligne un de ses conseillers. Il y a une énorme différence entre le fait d’exprimer des divergences ce week-end à la fête de l’Humanité, face à un public résolument anti-Valls, et le fait d’assumer cela devant les caméras. Les frondeurs savent bien que leurs électeurs, sur le terrain, voient l’impasse dans laquelle le pays se trouve». L’arithmétique parlementaire reste néanmoins compliquée. Si plus d’une trentaine de députés socialistes s’abstiennent – ce que les frondeurs et les écologistes ont promis de faire – Manuel Valls apparaîtra affaibli, même s’il s’en sort avec une majorité relative des suffrages. Les noms des frondeurs seront aussi examinés avec soin. Au sein du PS, peu oublient que l’actuel premier ministre n’avait obtenu que 5% des voix lors des primaires, sur sa ligne sociale-démocrate, contre 16% à Arnaud Montebourg. La réalité des sondages, avec un François Hollande à moins de 15% de popularité et un locataire de Matignon à 22%, est aussi cruelle pour l’ex ministre de l’intérieur qui, comme premier flic de France, caracolait en tête des enquêtes d’opinion. Or le Parti a entamé ce week-end des Etats généraux. Son premier secrétaire, Jean Christophe Cambadélis, était à Lille samedi aux côtés de Martine Aubry, qui n’est pas parlementaire et ne votera donc pas ce mardi. Celle-ci, finaliste de la primaire socialiste contre M. Hollande, a refusé de s’engouffrer dans la brèche de la rébellion: «Je veux être utile et aider à la réussite du président et du premier ministre» a-t-elle asséné. La tonalité des débats a démontré, selon un participant, que les socialistes ont compris les interrogations du pays réel: «On parle trop de nous, de notre nombril expliquait un responsable de fédération à Marseille au «Monde». Les gens en ont marre. Il faut retrouver le chemin des grands débats». Le scénario catastrophe, pour Manuel Valls et François Hollande serait de se voir refuser la confiance. Ce qui ouvrirait la voie à son départ et à une possible dissolution de l’Assemblée, souvent évoquée. Le président de la République pourrait certes demander à son premier ministre de rester et de composer un nouveau cabinet, mais le choc dans l’opinion serait «nucléaire». L’on voit mal toutefois comment la journée pourrait se terminer ainsi. Ce scénario ne s’est produit qu’une fois sous la Ve République, lorsque Georges Pompidou, nommé par le général de Gaulle, avait subi un vote de défiance en 1962, avant de revenir à Matignon après une nouvelle élection législative. Cinquante-deux ans après, une chose paraît sûre en revanche: si les députés PS devaient retourner maintenant devant les électeurs, la majorité socialiste reviendrait en lambeaux. Avec, peut-être, moins de cent députés au lieu des 289 actuels. Une Berezina en forme de condamnation pour le président de la République qui s’exprimera lui jeudi à l’Elysée, lors d’une conférence de presse de rentrée très attendue.