Fil d'Ariane
Le sommet du G7 de La Malbaie s’est terminé par un coup de théâtre que personne n’avait vu venir : cinq minutes après la publication officielle du communiqué final de la rencontre, le président Trump annonçait sur Twitter qu’il retirait sa signature du communiqué parce que le Premier ministre Trudeau aurait dit, selon lui, des « faussetés ».
Based on Justin’s false statements at his news conference, and the fact that Canada is charging massive Tariffs to our U.S. farmers, workers and companies, I have instructed our U.S. Reps not to endorse the Communique as we look at Tariffs on automobiles flooding the U.S. Market!
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) June 9, 2018
[Basé sur les fausses déclarations de Justin lors de sa conférence de presse, et le fait que le Canada impose des tarifs massifs à nos agriculteurs, travailleurs et entreprises américaines, j'ai donné l'ordre à nos représentants américains de ne pas approuver le communiqué !]
Le président américain qualifie le Premier ministre canadien de « très malhonnête et faible » et enchaîne sur la possibilité d’imposer des tarifs douaniers sur les importations de voitures aux États-Unis. Une véritable gifle diplomatique envoyée au visage de Justin Trudeau mais aussi aux autres leaders du G7.
> Les réactions canadienne et européenne au volte-face de Donald Trump:
Il est arrivé à La Malbaie en traînant les pieds, tout dans son langage corporel, indiquait qu’il n’avait pas envie d’être là, qu’il était venu à reculons à cette « distraction » comme il a qualifié ce sommet. Le visage fermé, parfois traversé d’un sourire crispé, des poignées de mains de-ci, de-là, des tapes sur l’épaule de l’un et de l’autre, des têtes à têtes avec l’un et avec l’autre, ou une entrée tardive remarquée dans un déjeuner de travail déjà bien amorcée : oui, Donald Trump est venu au G7, il est arrivé le dernier et en est reparti le premier. Et il est clairement venu jouer le trouble-fête dans ce club ultra-sélect en imposant ses opinions, ses politiques et sa vision du monde. Avec l’art de faire diversion également : avant d’arriver au Québec, il a lancé un beau pavé dans la mare « il faut réintégrer la Russie au G7, ce serait mieux pour tout le monde » a-t-il dit. De quoi faire sursauter les autres dirigeants, qui ont rapidement rejeté l’option.
On dit qu’il s’est prêté de bonne grâce à ces rencontres avec ses homologues, qu’il a participé à tous les échanges, et qu’il « avait visiblement envie de contribuer à un accord » a précisé une source. On raconte que personne n’a mis de gant durant ces rencontres, que les discussions ont été franches et directes, surtout celles portant sur les tarifs douaniers et le commerce international, le principal irritant pour les pays européens et le Canada ( tout particulièrement les tarifs douaniers imposés par Donald Trump aux importations d’acier et d’aluminium en provenance du Canada, de l’Union européenne et du Mexique, la mesure qui a mis le feu aux poudres… )
Avant de quitter La Malbaie, samedi matin, plusieurs heures avant la fin du sommet, Donald Trump a qualifié le sommet de succès et a précisé qu’il n’avait pas été conflictuel. Il estime également que ses relations avec les autres dirigeants méritent un 10/10 et a même été jusqu’à dire que les relations entre le Canada et les États-Unis n’avaient jamais été aussi bonnes. Mais, dans le même souffle, il a répété son discours sur les échanges commerciaux, martelant que les États-Unis sont pénalisés depuis des décennies dans ces échanges : « On est une tirelire que tout le monde vole… On a profité de nous pendant des années, on ne peut plus faire ça, on veut être traité plus équitablement sur le plan commercial. Je ne blâme pas les dirigeants actuels, a tenu à préciser le président américain, mais mes prédécesseurs qui ont laissé faire ça ». Il est aussi revenu sur les négociations en cours pour renouveler l’ALENA, l’Accord de Libre-Échange Nord-Américain qui lie le Canada, les EU et le Canada depuis plus de 30 ans. Des négociations qui piétinent depuis des mois…
Quelques heures plus tard, en route vers Singapour, Donald Trump a balayé du revers de la main tous ces commentaires positifs faits sur le sommet et ses relations avec ses homologues. Que vaut maintenant la parole de cet homme et sa signature sur un texte officiel si, sans coup férir, il la retire parce qu’il n’a soit disant pas apprécié un commentaire à son égard ? Comment expliquer ce revirement spectaculaire ? Comment travailler avec ce président qui change d’avis comme de chemise ? Et comment va se dérouler ce sommet qui va s’ouvrir dans quelques jours à Singapour, un sommet crucial pour la paix dans le monde ?