Son implication personnelle dans les attentats des FARL n'est cependant alors aucunement établie. En juillet 1986, il est condamné à quatre ans de prison « seulement » pour détention d'armes et usage de faux papiers. Il n'est d'ailleurs pas supposé y moisir si longtemps : un an plus tôt, un accord a été conclu par Yves Bonnet pour échanger sa libération contre celle de Gilles Sidney Peyroles, diplomate français et fils de l'écrivain
Gilles Perrault, enlevé au Nord du Liban par … les FARL. Si ce dernier est effectivement rapidement relâché, il n'en est pas de même de Georges Ibrahim Abdallah sur lequel de nouvelles charges viennent peser. Dans un appartement au loyer payé par lui, les policiers découvrent à cette époque le pistolet qui semble avoir servi à tuer trois ans plus tôt les diplomates Charles Ray et Yacov Bartimentov. Le Libanais, qui purge sa première peine, est alors inculpé de complicité dans leur assassinat.
Son nouveau procès s'ouvre le 23 février 1987, sept mois après le premier. L’atmosphère y est très tendue. Représentés par leur ambassadeur, les États-Unis se sont portés partie civile. En France, surtout, l'année qui précède (décembre 1985, mars et septembre 1986) a été marquée par une vague d'attentats sanglants, causant treize morts et des centaines de blessés. Ils ne peuvent certes être attribués à Georges Ibrahim Abdallah, en prison depuis 1984. Ils sont revendiqués par un « Comité de soutien avec les prisonniers politiques arabes du Proche-Orient » (CSPPA) exigeant notamment la libération d'Anis Naccache (impliqué dans un attentat contre l'ancien premier ministre iranien réfugié en France, Chapour Baktiar) mais aussi celle d'Abdallah. D'obédience et de financement iranien, ce réseau, semble surtout avoir alors voulu faire payer à la France son soutien à l'Irak de Saddam Hussein – alors en guerre avec l'Iran - et paraît, selon même la DST, n'avoir aucun lien avec les FARL d'Abdallah.
Mais la confusion, entretenue par la presse, s'est installée avec la peur («
Il a fait trembler les Français »,
titre ainsi le Nouvel Observateur juste avant le procès).
Peut-être par crainte de représailles, l'avocat général ne requiert que dix années de prison («
Je crois, dans l'intérêt de tous, pouvoir vous demander, vous conjurer, vous supplier de ne pas prononcer à l'encontre de l'accusé une peine de réclusion criminelle supérieure à dix ans. »). Fait exceptionnel, la Cour ne le suit pas et prononce une tout autre peine : la perpétuité. Dans un sondage CSA, 78 % des Français approuvent la condamnation, considérée comme un acte d'indépendance et de courage à l'égard du terrorisme. Sous la plume de son éditorialiste Claude Cabanes, le quotidien communiste « l'Humanité » en fait, lui, une autre lecture : «
Washington a gagné, sous les applaudissements de Tel-Aviv (...). Le procès Abdallah a été de bout en bout piloté pour et par une puissance étrangère ». On saura plus tard que l'avocat du condamné, Jean-Paul Mazurier, informait la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure) sur son client, fait qui, dans un État de droit, aurait dû suffire à l'annulation du procès.
Mais à la fin des années 80, les guerres Irak-Iran et celle du Liban s'achèvent, recouvertes par le tumulte de l'effondrement soviétique puis par les conflits du Golfe. Les échos et la nature du terrorisme eux-même se déplacent. Emprisonné à Lannemezan (sud de la France) Georges Ibrahim Abdallah, à qui est refusé le statut de prisonnier politique, est entré pour de longues années dans l'oubli.