Géorgie : l'ex-président Mikheïl Saakachvili, un réformateur pro-occidental adulé et critiqué

Il a été arrêté et emprisonné dès son retour en Géorgie. Après un exil de huit ans en Ukraine, l’ancien président géorgien Mikheïl Saakachvili, est rentré dans son pays. En 2004, après avoir participé à la révolution de la Rose, qui pousse le président Edouard Chevarnadze à la démission, il devient le chef de l'Etat géorgien. Retour sur son parcours politique.

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Georgie : arrestation
L'ancien président géorgien Mikheïl Saakachvili a été arrêté vendredi 1 er octobre à son retour d'exil.
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De la révolution à la présidence de Géorgie, de l'exil à la détention dès son retour vendredi 1er octobre 2021, Mikheïl Saakachvili a un parcours hors du commun. Il était recherché pour "abus de pouvoir" dans une affaire qu'il juge politique et pour laquelle il a été condamné par contumace à six ans de prison en 2018. 

Le gouvernement l'avait averti qu'il serait immédiatement interpellé s'il revenait. Selon les médias géorgiens, M. Saakachvili est détenu dans une prison de Roustavi, près de la capitale Tbilissi.

Agé aujourd'hui de 53 ans, Saakachvili continue de diviser cette nation du Caucase où ses soutiens le considèrent comme le fondateur de la Géorgie moderne, un réformateur charismatique, tandis que ses détracteurs dénoncent ses dérives autoritaires.

"J'appelle tout le monde à aller voter pour le Mouvement national uni (MNU)", le principal parti d'opposition dont il est le fondateur, a lancé M. Saakachvili dans une vidéo publiée sur Facebook vendredi 1er octobre. Ce nouveau retour en politique en Géorgie s'inscrit dans une carrière mouvementée.

2000, premiers pas en politique 

Moins de 10 ans après l'indépendance de la Géorgie, Mikheïl Saakachvili devient ministre de la Justice, le 12 octobre 2000, dans le gouvernement du président Chevardnadze, pur produit de l'Union soviétique. A son poste, Saakachvili met en œuvre des réformes majeures des systèmes judiciaire et pénitentiaire. Cela lui vaut l'éloge de beaucoup d'observateurs internationaux et d'activistes des droits de l'Homme. Mais mi-2001, il entre en désaccord majeur avec plusieurs ministres, les accusant de bénéficier de trafics et de corruption. Il démissionne  du gouvernement le 5 septembre 2001.

En  octobre 2001, il fonde le Mouvement national uni (MNU), un parti politique de centre-droit. En juin 2002, il est élu président de l'Assemblée de Tbilissi qui devient pour lui une nouvelle tribune pour critiquer le gouvernement du président Chevarnadze.

Ce dernier est acculé à la démission face aux manifestations pacifiques qui ont suivi les législatives de novembre 2003 qualifiées de truquées par l'opposition et que Saakachvili estime avoir gagné.

C'est la Révolution de la Rose, qui va évincer les vieilles élites héritées de la période soviétique. Fin 2003, Saakachvili accède à la présidence

2004 à 2013 : président de la Géorgie

Le 4 janvier 2004, Mikheil Saakachvili remporte l'élection présidentielle avec plus de 96 % des voix, devenant ainsi le plus jeune président européen. À l'époque, il suscite beaucoup d'espoirs, promettant de transformer un pays ravagé par plus d'une décennie de crises politiques, et de guerres contre des provinces séparatistes. Ce polyglotte, pro-occidental, qui a étudié en France et aux Etats-Unis, parle également de l’importance d’avoir de meilleures relations avec la Russie. 

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En 2005, George W. Bush, alors président des Etats-Unis, avait salué la Géorgie de Saakachvili comme un "phare de la démocratie" et des sénateurs américains l'avaient même proposé au prix Nobel de la paix. L'actuel dirigeant américain, Joe Biden, l'a qualifié en 2012 de "George Washington d'Europe de l'Est".

Lors de sa présidence, il a en effet mené une croisade efficace contre la corruption, réformé une police touchée notoirement par ce fléau, emprisonné des chefs criminels et reconstruit des infrastructures en ruine. Il a aussi mis en oeuvre des réformes économiques propices aux affaires, obtenant une multiplication par trois du Produit intérieur brut (PIB) par habitant.  

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Accusations d'autoritarisme

Mais le héros de la "Révolution de la rose" Mikheïl Saakachvili est un personnage controversé. Sous sa présidence, de nombreux critiques ont dénoncé des atteintes aux libertés et son penchant autoritaire, citant notamment la violente répression de manifestations antigouvernementales. Pour certains, Mikheïl Saakachvili est aussi l'homme de la défaite dans la guerre éclair de 5 jours contre la Russie en 2008. Une humiliante défaite, dont il est tenu en partie responsable. 

Sur fond de tension avec Moscou, M. Saakachvili avait envoyé l'armée pour reprendre en main la région séparatiste d'Ossétie du Sud, soutenue par la Russie qui avait riposté en faisant entrer ses troupes en Géorgie.

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En 2012, Mikheïl Saakachvili perd les législatives au profit du parti du milliardaire Bidzina Ivanichvili, son grand rival et fondateur du parti du Rêve géorgien. 

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2013, Mikheïl Saakachvili quitte la Géorgie

Après son départ de Géorgie en 2013, Saakachvili a vécu un temps aux Etats-Unis avant d'entamer en Ukraine une nouvelle carrière politique, soutenu un temps par l'ex-président Petro Porochenko, avec lequel il s'est ensuite brouillé. 

La Géorgie est plongée dans une crise politique depuis l'année dernière, lorsque les partis d'opposition ont dénoncé des fraudes massives aux élections législatives remportées de justesse par le parti au pouvoir.

Le retour et l'arrestation de Mikheïl Saakachvili ne devrait qu'accentuer la crise politique en Géorgie, où se tiennent des élections locales vues comme un scrutin clé pour le parti au pouvoir du Rêve géorgien.

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