Et la Reine d’Angleterre ? Laissera-t-elle son royaume dans l’état où elle l’a trouvé en entrant ?
Elle va laisser un royaume très amoindri. Les derniers lambeaux de l’Empire britannique se sont effilochés. La Grande-Bretagne n’est plus la grande puissance qu’elle était il y a soixante ans. Cela dit, à travers toutes les tribulations de son règne, elle a permis à la Grande-Bretagne de s’interroger sur son identité et de garder son profil irréductible. La Reine d’Angleterre est une icône. Elle est la femme la plus connue au monde. Sa disparition constituera un trauma pour les britanniques. Et je pense que son successeur ne pourra pas remettre en cause l’institution qu’elle incarne.
Certaines monarchies européennes sont-elles aujourd’hui menacées ?
Ce qui est frappant c’est la légitimité des souverains. Dans toutes les monarchies d’Europe, il y a une très large adhésion populaire qui se manifeste dans les sondages. On est partout au-delà de 65% d’opinions positives, plus de 80% au Danemark. Une majorité de la représentation nationale, des élus, ne souhaite pas non plus remettre en cause l’institution. Et d’ailleurs, si dans l’une des monarchies européennes, l’adhésion populaire disparaissait du jour au lendemain, la monarchie n’aurait pas la force de résister. Elle s’effacerait naturellement. A contrario, je vous fais remarquer qu’en France, les dispositions constitutionnelles relatives à la révision de la Constitution interdisent que l’on remette en cause la nature républicaine au sens étroit du terme, à savoir un chef d’Etat élu. Dans les monarchies en revanche, un simple vote du Parlement abolirait la monarchie sans aucun problème. Mais ce n’est pas la volonté actuellement. Dans les années 50, le roi Farouk d’Egypte en exil déclarait : « en l’an 2000 il ne restera que les rois de pique, de cœur, de carreau, de trèfle et la Reine d’Angleterre ». Il s’est trompé.