Fil d'Ariane
La Grèce poursuit ses recherches d'éventuels survivants au lendemain du chavirement d'un bateau surchargé de migrants, un naufrage meurtrier. Celui-ci pourrait avoir fait des "centaines" de morts.
Image du chalutier de migrants avant son nauffrage le 14 juin 2023.
Soixante-dix-huit corps ont jusqu'ici été retrouvés en mer au large des côtes de la péninsule du Péloponnèse, selon les gardes-côtes qui ont ainsi revu à la baisse un bilan de 79 morts annoncé la veille.
Mais l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) a dit "redouter que des centaines de personnes supplémentaires" se soient noyées "dans l'une des tragédies les plus dévastatrices en Méditerranée en une décennie".
Le porte-parole du gouvernement grec, Ilias Siakantaris, avait assuré mercredi que des informations non confirmées faisaient état de 750 personnes à bord du chalutier.
Deux patrouilleurs, une frégate de la marine, trois hélicoptères et neuf autres navires continuaient à inspecter les eaux à l'ouest des côtes du Péloponnèse, l'une des zones les plus profondes de la Méditerranée.
La cour suprême grecque a ordonné une enquête pour déterminer les causes du drame qui a choqué la Grèce, accusée depuis des années par des ONG et des médias internationaux de refouler des migrants en quête d'asile dans l'UE.
Un deuil national de trois jours a été décrété, interrompant ainsi la campagne électorale en vue du scrutin législatif du 25 juin.
Mais certains journaux ne cachaient pas leur colère face à ce nouveau drame touchant des migrants. Le quotidien de centre-gauche Efsyn affichait ainsi en Une et en six langues ce simple mot: "Honte!".
Le pape François, très sensible à la thématique migratoire, s'est quant à lui dit "profondément consterné" par ce naufrage.
Dans le port de Kalamata (sud-ouest) où ont été acheminés les survivants, "c'est vraiment horrible", assurait à l'AFP Erasmia Roumana, une employée du HCR. Les rescapés sont "dans une très mauvaise situation psychologique (...) Beaucoup sont en état de choc, ils sont accablés".
Jusqu'à présent, 104 personnes ont pu être secourues et devraient être prochainement transférées dans un centre d'accueil pour migrants de Malakasa, au nord-est d'Athènes.
Les rescapés "sont tous des hommes", a déclaré la porte-parole des garde-côtes, faisant craindre que des femmes et des enfants, qui embarquent généralement aussi sur ces embarcations, ne figurent parmi les disparus.
Ces rescapés sont en majorité des Syriens (47), des Egyptiens (43), ainsi que 12 Pakistanais et deux Palestiniens, selon les autorités grecques.
"Nous ne savons pas ce qu'il y avait dans la cale, mais nous savons que des passeurs enferment les gens", avait affirmé le porte-parole du gouvernement mercredi sur ERT.
Un survivant a également indiqué à des médecins de l'hôpital de Kalamata qu'il avait vu une centaine d'enfants dans la cale du bateau, selon ERT. Plus de 20 personnes restent hospitalisés à Kalamata, a précisé la chaîne publique.
"Ils souffrent surtout de pneumonie, de déshydratation, d'hypothermie", a indiqué Manolis Makaris, directeur du département cardiologique de l'hôpital de Kalamata, à la radio municipale d'Athènes.
Une image diffusée par les gardes-côtes montrait un chalutier bleu, de 25 à 30 m de long, et manifestement en mauvais état surchargé de personnes, rassemblées sur le pont de la proue à la poupe et même sur le toit de la passerelle.
"Les cales seraient remplies d'enfants et des femmes dont le nombre n'était pas précisé", a relevé Manolis Makaris en évoquant des témoignages de rescapés.Selon les autorités portuaires grecques, un avion de surveillance de l'agence européenne Frontex avait repéré le bateau mardi après-midi mais il n'est pas intervenu car les passagers ont "refusé toute aide".
"On ne demande pas aux personnes à bord d'un bateau à la dérive s'ils veulent de l'aide (...), il aurait fallu une aide imminente", a affirmé à ERT Nikos Spanos, expert international des incidents maritimes.
Selon les autorités grecques, les migrants étaient partis de Libye et se dirigeaient vers l'Italie. Le moteur du bateau a lâché peu avant 23h00 GMT mardi et le navire a chaviré dans les eaux les plus profondes de la Méditerranée, à 47 milles nautiques (87 km) de Pylos, en mer Ionienne, a précisé M. Siakantaris, coulant en 10 à 15 minutes.
Selon plusieurs responsables, les rescapés ne disposaient pas de gilets de sauvetage. Les survivants sont temporairement hébergés dans un entrepôt du port de Kalamata afin d'être identifiés par les autorités, qui recherchent les passeurs.
Visiblement sous le choc et fatigués, ces rescapés étaient allongés ou assis sur des matelas de fortune installés dans ce hangar et assistés par des équipes de la Croix-Rouge notamment.
Les corps de victimes ont été transférés au cimetière de Schisto, dans la la banlieue ouest d'Athènes où une autopsie aura lieu, selon la télévision publique.