Des touristes américains munis de masques de protection à Amritsar, en Inde le 16 août 2009 (AFP)
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Grippe A : état des lieux
"La pandémie de grippe A/H1N1 s’étend rapidement, mais son évolution future est imprévisible. Partout dans le monde, l’immense majorité des cas continuent d’être caractérises par des symptômes bénins et par une guérison pleine et entière, sans nécessité d’intervention médicale. Bien que le virus soit pratiquement identique dans toutes les zones affectées, l’impact de la pandémie risque d’être plus sérieux dans les pays où les systèmes de santé sont peu performants [...] Dans de tels contextes, il faut s’attendre à ce que la pandémie impose un lourd fardeau à des moyens et des services de santé déjà insuffisants. Les pays où les services de santé sont mis à très forte contribution par des maladies comme le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme auront les plus grandes difficultés face à une pandémie à grande échelle." Extrait de l'appel à l'action de l'OMS, 17 août 2009
Le bilan de la grippe A/H1N1
Le nombre de décès de grippe A par pays et les pays qui ont des cas confirmés au 25 octobre 2009 - Source : OMS
Par ordre croissant : - de 1 à 10 morts (plus petits cercles) - de 11 à 50 morts (petits cercles) - de 51 à 100 morts (cercles moyens) - 101 morts et plus (grands cercles) - Les pays où il existe des cas confirmés de grippe A (rectangle rose)
« Il faudrait 1 milliard de dollars pour que les pays pauvres puissent faire face à la grippe A »
Entretien avec Isabelle Nuttall, médecin et porte-parole de l’Organisation mondiale de la santé (OMS)
Quel est le plan d’intervention de l’OMS pour lutter contre la grippe A? L’Organisation mondiale de la santé préconise - Une détection rapide des cas de maladies - Un protocole de traitement des malades déclarés - Des mesures visant à limiter la propagation trop rapide de l’épidémie dans un pays, pour éviter que les systèmes de santé ne soient débordés, même si la maladie n’est pas grave - Cela peut aller de la fermeture des écoles à la limitation des rassemblements de masse, mais elles sont établies en fonction des pays - D’informer les populations Existe-t-il des régions plus à risque que d’autres ? À priori, tous les pays sont à risque depuis le 11 juin 2009, date à laquelle l’Organisation mondiale de la santé a déclaré la pandémie de grippe A /H1N1. Le nombre de cas notifiés dans chaque pays est cependant variable. Les premiers pays touchés comme le Mexique, les Etats-Unis et le Canada, observent une diminution des malades de la grippe A, tandis qu’on note une augmentation des malades au Chili, en Australie, en Argentine et en Uruguay, où la maladie s’est développée un peu plus tard. Comment organisez-vous votre collaboration avec les gouvernements ? L’OMS a des relations avec les États de manière systématique et régulière, cela n’a rien de nouveau. Nous leurs donnons des lignes directrices pour renforcer les systèmes de surveillance, et diagnostiquer rapidement des cas de grippe, afin d’intervenir très vite et d’agir. Chaque pays a sa propre politique et met en œuvre des moyens appropriés pour répondre à l’augmentation du nombre de cas de malades. Il faut savoir que la préparation des pays membres de notre organisation (ndlr : l’OMS compte 193 pays) face aux éventuelles pandémies a commencé il y a très longtemps, avant même que l’on parle de la grippe A. En 2006, nous avons travaillé avec tous les États pour qu’ils soient prêts à répondre à une possible pandémie de grippe aviaire. Tout ce qui a été fait autour de la grippe aviaire H5N1 depuis plus de 3 ans reste valable. Les plans élaborés à l’époque ont été modifiés pour les adapter à la situation actuelle. Le virus de la grippe A/H1N1 au jour d’aujourd’hui reste modéré dans son expression clinique, c'est-à-dire que ce n’est pas une maladie grave mais qui se transmet facilement. L’objectif de l’OMS est d’aider les pays pauvres à avoir accès à des médicaments antiviraux et également aux vaccins lorsqu’ils seront disponibles.
Seringue contenant un vaccin contre la grippe A - AFP (11août 2009)
Y aura-t-il assez de vaccins pour tous les pays ? Il est clair qu’il n’y aura pas de vaccins en quantité suffisante au début de la production. Elle va augmenter au fur et à mesure. L’OMS a conseillé de vacciner d’abord les groupes à risque, c'est-à-dire, le personnel médical, les femmes enceintes et les personnes qui ont des maladies chroniques sous-jacentes. Mais chaque pays est libre de décider en fonction de sa politique sanitaire. Les pays riches ont déjà fait des commandes de vaccins et espèrent les recevoir dès qu’ils seront disponibles. Nous travaillons actuellement avec les laboratoires pharmaceutiques afin d’obtenir des vaccins pour les pays qui n’ont pas pu faire des commandes à l’avance. Ceci dit, les laboratoires Roche nous ont fait un don de 5,6 millions de doses de Tamiflu (ndlr : médicament utilisé dans le traitement de la grippe A). L’OMS l’a redistribué aux pays nécessiteux. Disposez-vous de fonds pour aider les pays en développement ? L’OMS travaille dans le cadre des Nations Unies pour une mobilisation de fonds. Et aussi avec la Banque mondiale pour qu’il y ait des fonds spéciaux mis à la disposition des pays pauvres pour les aider à affronter une propagation rapide du virus sur leur territoire. L’organisation s’est chargée d’avoir un stock de médicaments antiviraux qui a déjà été distribué aux pays pauvres. Et nous travaillons actuellement pour avoir des vaccins disponibles pour ces même pays. Il faudrait 127 millions de dollars à l’OMS pour aider tous les pays affectés par la pandémie. Mais les Nations Unies estiment à 1 milliard de dollars les besoins totaux des pays pauvres pour faire face à la maladie. Pour que ces pays puissent acheter les médicaments et les vaccins nécessaires. Ce milliard de dollar n’est pas encore disponible en tant que tel. Nous avons lancé un appel de fonds. Pour l’instant, une grande partie de l’Afrique Subsaharienne est relativement épargnée. Y a-t-il une explication à cela ? Il n’y a pas vraiment d’explication. Les derniers cas déclarés dans cette zone sont au Ghana et en Zambie. Il est possible que la transmission du virus en Afrique se fasse de façon plus tardive, mais elle se fera néanmoins. Quelles sont les recommandations de l’OMS ? Nous n’imposons aucune restriction sur les voyages et sur la circulation des biens et des personnes. De toute façon, du moment où la pandémie a été déclarée, il n’y a plus moyen d’arrêter la transmission et donc la circulation du virus. Ce qu’il faut faire maintenant c’est de surveiller une éventuelle mutation qui le rendrait dangereux. Il faut rapidement prendre en charge les malades et éviter que la transmission ne soit très rapide dans un pays. Propos recueillis par Christelle Magnout20 août 2009