L'Iran a reconnu pour la première fois, samedi 5 novembre, avoir fourni des drones à la Russie. Téhéran assure toutefois que les livraisons ont été effectuées avant l’invasion de l’Ukraine, le 24 février dernier. L’aveu confirme les accusations de Kiev contre Moscou, soupçonné d'utiliser des drones iraniens pour ses frappes contre les civils et les infrastructures ukrainiennes.
«
Nous avons fourni à la Russie un nombre limité de drones, des mois avant la guerre en Ukraine », a finalement admis, samedi 5 novembre, le ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amir-Abdollahian, cité par l'agence officielle
Irna.
C'est la première fois que Téhéran fait état de la livraison de drones à Moscou. Malgré les accusations répétées de Kiev et de ses alliés occidentaux, l’Iran se bornait jusqu’alors à
nier ces affirmations.
Le 22 octobre dernier, la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne réclamaient conjointement l’ouverture d’une enquête «
impartiale » des Nations unies (ONU) au sujet des livraisons de drones iraniens à la Russie pour mener sa guerre en Ukraine.
En réponse, l’ambassadeur et représentant permanent de la République islamique à l’ONU, Amir Saïd Iravani, adressait, le 25 octobre,
une lettre de mise en garde au secrétaire général de l’institution, Antonio Guterres. «
L'enquête de l'ONU, dans le cadre de la résolution 2231, sur les allégations sans fondement liées à l'utilisation de drones iraniens dans la guerre en Ukraine est illégale. »
Le diplomate avait d’ailleurs balayé les accusations la veille. «
Nous sommes prêts à étudier l'allégation sur la vente de drones, lors d'une réunion conjointe avec l'Ukraine. Nous n'avons envoyé aucune arme ou drone en Russie pour une utilisation dans la guerre contre l'Ukraine. »
Instrument de terreur psychologique
Peu après l'aveu des autorités iraniennes concernant ses drones livrés à Moscou, la diplomatie ukrainienne a aussitôt réagi. «
Téhéran doit se rendre compte que les conséquences de la complicité dans les crimes (...) d
e la Russie contre l'Ukraine seront bien plus importantes que le bénéfice du soutien de la Russie, a déclaré sur Facebook le porte-parole du ministère ukrainien des Affaires étrangères, Oleg Nikolenko.
Par conséquent, le ministère des Affaires étrangères, dirigé par Dmytro Kouleba, en étroite coordination avec les agences ukrainiennes compétentes, continuera de prendre les mesures les plus strictes pour empêcher la Russie d'utiliser des armes iraniennes pour tuer des Ukrainiens et détruire nos infrastructures critiques. »
Le chef de la diplomatie irannienne s’est, en outre, dit enclin à examiner toute «
preuve » de la part de Kiev d'un recours aux drones iraniens dans le conflit.
Il y a plusieurs jours, Kiev a déjà affirmé qu'«
environ 400 drones » iraniens ont déjà été utilisés contre la population ukrainienne et que Moscou en a commandé environ 2.000.
Ces engins à bas coûts, l’équivalent de quelque 20.000 dollars, sont massivement apparus sur le théâtre ukrainien ces dernières semaines. Moscou les envoie en nombre pour économiser son stock de missiles de croisière qui s’amenuise, à mesure que perdure son invasion.
Ces Shahed-136, renommés Geran-2 par les Russes, servent aussi d’instrument de terreur psychologique, en raison notamment, d’un son caractéristique. Les Ukrainiens les désignent ainsi comme des « mobylettes. »
Relations diplomatiques limitées
L'aveu de Téhéran sur ces livraisons de drones à Moscou marque encore un peu plus le rapprochement entre la Russie et l'Iran entamé ces derniers mois, face à une Ukraine largement soutenue par les Etats-Unis et l'Union européenne. Ce, alors que la Chine se tient à l'écart de toute implication directe dans la guerre.
L'Iran a, en revanche, démenti la fourniture de missiles à la Russie et qualifié ces accusations de «
complètement fausses. » Des articles de presse faisaient état ces derniers jours de potentielles livraisons de missiles sol-sol iraniens à la Russie.
Malgré les dénégations de Téhéran ces dernières semaines, l'UE et le Royaume-Uni ont annoncé de nouvelles sanctions visant trois généraux iraniens et une entreprise d'armements «
responsables de fournir à la Russie des drones kamikazes » pour
bombarder l'Ukraine.
En septembre, Kiev a, pour sa part, décidé de réduire considérablement ses relations diplomatiques avec Téhéran.
(Re)voir : Ukraine : la guerre des drones