Fil d'Ariane
C'est un florilège de petites histoires qui rejoignent la grande, avec un "H" majuscule. Au fil des pages, et donc des siècles, on croise Henri III, Marie Stuart, le pape Clément VII, Bonaparte, François Mitterrand et quantité d'autres noms
célèbres. Tous ces personnages, à un moment de leur vie, ont partagé quelque chose avec un chien.
"100 chiens qui ont fait l'histoire" (Les Editions de l'Opportun) nous révèle ces petits secrets canins.
En contrepoint à ces faits souvent touchants, parfois terribles, Dorica Lucaci a eu la bonne idée de mentionner le statut social de ces animaux au fil des époques.
On y découvre des traditions souvent étonnantes.
Ainsi, celles des gisants. Un chien représente la foi, la fidélité au souverain et au royaume. Il est aussi le guide dans le royaume des morts. Quand il tient un os entre ses pattes, c’est le signe que le corps se trouve sous le gisant.
Charles II d'Angleterre, grand amateur de petits épagneuls avait un favori : Mumper.
Dorica Lucaci précise : "Lors du naufrage du navire Gloucester, le roi abandonna tout sans état d'âme à l'exception de ses chiens et de ses prêtres. On dit même que le réputé médecin Sir Charles Scarbourgh avait alors dû se disputer une planche avec ce brave Mumper".
Le soldat Adolf Hitler avait un chien, Foxl, dans les tranchées en 1915. Ce fox-terrier traquait les rats. Malgré le fracas des bombes, le chien lui restait fidèle. Le futur dictateur l'avait apprivoisé. Foxl fut enlevé deux ans plus tard, laissant Hitler dans un immense désarroi.
En 1943, une chienne, Blondi, un berger allemand, partage le quotidien du Führer qui se distrait des performances de l'animal : "Elle pouvait monter sur une échelle, sauter par-dessus un obstzacle d'une hauteur considérable (1,80m)n ou bien "chanter" comme un soprano colorature, la plus haute de toutes les voix, ou comme un contralto, la voix la plus grave" affirme l'historienne. En avril 1945, le médecin de Hitler tua Blondi et ses petits avec une injection de cyanure.
Si tu veux un ami à Washington, prends un chien.
Déclaration attribuée au président américain Harry Truman
Fala, terrier écossais donné au Président Franklin Roosevelt. Les deux sont inséparables. En Août 1941, Fala est à la Conférence de la Charte de l'Atlantique dans la baie Placentia, à Terre-Neuve avec son maître et Winston Churchill. En septembre 42 et avril 43, il accompagne son maître pour inspecter des installations de défense. En 1944, il fait une sortie en mer sur les îles Aléoutiennes. Les rumeurs se répandent que Fala a été accidentellement laissé sur une des îles.
Les républicains accusent Roosevelt d'avoir dépensé l'argent des contribuables, soit des millions de dollars, pour rapatrier Fala. En réaction, en septembre 44, Roosevelt prononce le fameux Fala's speech (discours de Fala).
Le président, vibrant, affirme que ses attaques l'ont touché, lui et sa famille, mais aussi que tout cela a eu un effet sur son chien : "Son âme écossaise était furieuse" précisera-t-il. Gros succès. Fala devient si populaire qu'il reçoit tout à coup des milliers de lettres, au point qu'on lui attribue un secrétaire pour répondre à tout son courrier...
Un chien pour mieux capter les voix des électeurs ? La leçon restera.
Elle sera suivie par Nixon, Kennedy et même Obama. Les Américains connaissent son chien Bo, un chien d'eau portugais et sa femelle Sunny.
Il faudrait aussi évoquer Laïka, la petite chienne russe devenant le 3 novembre 1957 la première créature vivante ayant jamais été propulsé dans l’espace. Devenue malgré elle héroïne de l'Union Soviétique, elle ne put jamais goûter à aucune gloire :
les ingénieurs soviétiques n'avaient prévu pour Laïka que des provisions et de l'oxygène pour tenir une semaine. Elle restera plusieurs mois en orbite autour de la terre et le 14 avril 1958, Sputnik 2, qui la transportait, se désintègrera avant même son arrivée sur la Terre.
Il faudrait aussi évoquer Corbu, le labrador du président roumain, Nicolae Ceausescu. Le toutou avait sa voiture avec chauffeur.
Qui a oublié cet autre labrador, Baltique, qui fut offert au président Mitterrand ? Michel Rocard, Premier ministre, lui offrit un jouet en mousse afin que le chien puisse se défouler : l'effigie de Margaret Thatcher, Premier ministre du Royaume-Uni !
De Gaulle, Pompidou, Giscard, Sarkozy, Hollande, tous ces présidents français, parfois fameux cabots eux-mêmes, ont eu ou ont encore un chien.
Dans l'actualité récente, la maltraitance animale dans les abattoirs fait les gros titres. Dorica Lucaci évoque Descartes. Le philosophe (1596-1650) soutenait une hypothèse éthologique selon laquelle les animaux étaient, en fait, des machines dénuées de conscience et incapables de souffrir. Longtemps, ce concept "d'Animal-machine" sera partagé, au point d'influencer négativement les relations hommes-animaux.
L'ouvrage fourmille d'anecdotes, tantôt drôles, tantôt cruelles. Le style est agréable et les pages se laissent dévorer sans problème. Oui, on peut être mordu par un tel ouvrage.