Le français : un paysage pour mes rêves
Par Shen Dali, écrivain et professeur de littérature à l’Université de Pékin, traducteur de Hugo et Balzac - Chine
En tant qu’écrivain francophone, je suis l’auteur en français de deux romans : « Les Enfants de Yenan » (éd. Stock, 1985) et « Les Amoureux du lac » (éd. Maisonneuve et Larose, 2004), ainsi que de poèmes. J’ai séjourné ou enseigné dans plusieurs pays francophones en Europe et au Québec. Dans mes œuvres, j’ai toujours présenté la Francophonie comme paysage à nourrir mes rêves de liberté. Je souhaite partager dans la création littéraire l’héritage des cultures francophones riches de tous les siècles passés, y puiser l’inspiration et faire de l’exotisme une esthétique du Divers, une connaissance de l’Autre. Le mot « francophonie », inventé par le géographe français Onésime Reclus à la fin du 19ème siècle, a pris depuis de l’ampleur. Avec le temps, le fleuve francophone coule désormais vers la Chine qui n’appartient pourtant pas à cette communauté linguistique. De fait, la francophonie ne se réduit pas uniquement à la terre de France : elle ouvre, par l’utilisation de la langue française, un espace culturel planétaire. A l’ère de la tutelle, le français était, dans le cœur des colonisés, une langue aliénante. Aujourd’hui, il n’est plus perçu comme l’instrument d’une servitude morale aux mains des expansionnistes de l’Hexagone. Au contraire, cette belle langue, véhicule d’univers si différents qui a marqué des époques et des civilisations, respire au rythme de la vitalité française et constitue un monde multiple. En ce sens, le français est un riche moyen de communication au carrefour des échanges, à l’échelle internationale. Certains intellectuels chinois ayant adopté le français comme langue seconde d’usage courant cherchent à résister à la menace du monopole de l’anglo-américain pour préserver le multilinguisme. Ils constatent avec regret qu’en France, dans les milieux d’affaires notamment, on s’abandonne à l’américanomanie et que le franglais envahit la télévision. Pour moi, la Francophonie n’est autre qu’un ailleurs où il est possible de conjuguer l’unité et la diversité : de réussir à fusionner tout en restant soi.
Pays non membre de la Francophonie, qui compte seulement 15 500 étudants en français.
L’étude de la langue française se situe en 4ème position en Chine (après l'anglais, le japonais, le russe).