Iran : la France "condamne" le lancement d'une fusée iranienne, les Etats-Unis "préoccupés"

La France a "condamné" vendredi 31 décembre le lancement la veille d'une fusée par Téhéran au moment où les négociations sur le programme nucléaire iranien ont repris et se trouvent selon elle en plein "progrès". Les Etats-Unis se disent "préoccupés" par cette avancée susceptible selon Washington de bénéficier au programme balistique de Téhéran.
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Le ministère de la Défense iranien a publié jeudi 30 décembre 2021 cette photo du lancement de la fusée "Simorgh" ou "Phoenix", en Iran. 

​(Iranian Defense Ministry via AP)
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"La France condamne ce lancement qui n'est pas conforme à la résolution 2231 du Conseil de sécurité des Nations unies", a indiqué la diplomatie française dans un communiqué. Une réaction à l'annonce la veille par l'Iran du lancement dans l'espace une fusée transportant trois appareils de recherche spatiale.

"Ces activités sont d'autant plus regrettables qu'elles interviennent à un moment où nous enregistrons des progrès dans la négociation nucléaire à Vienne", souligne Paris. La France n'est pas la première à réagir.

Jeudi, Washington a de son côté exprimé ses inquiétudes après cette annonce. Les Occidentaux soupçonnent l'Iran de chercher à développer, en utilisant la technologie de ses lanceurs de satellites, des lanceurs balistiques à longue portée capables d'emporter des charges conventionnelles ou nucléaires.

"Les Etats-Unis restent préoccupés par le développement iranien de lanceurs spatiaux, qui pose un risque de prolifération", a dit une porte-parole du département d'Etat, qui a toutefois réaffirmé que Washington "souhaite un retour mutuel au respect total de l'accord" de 2015 visant à empêcher l'Iran d'obtenir l'arme nucléaire.

Une crainte partagée par Paris. "Du fait de la grande proximité des technologies employées pour les lancements spatiaux et les tirs balistiques, ce lancement participe directement aux progrès déjà préoccupants de l'Iran dans son programme de missiles balistiques. Le rôle du ministère de la Défense dans ce lancement témoigne du lien étroit entre ces deux programmes", estime le Quai d'Orsay.

"Ce lancement fait par ailleurs suite au tir de missiles balistiques le 24 décembre", également non conformes à la résolution 2231 qui "appelle l'Iran à ne pas procéder à des activités liées aux missiles balistiques conçus pour être capables d'emporter des armes nucléaires", fait-il valoir.

"Trois appareils de recherche dans l'espace"

Côté iranien, peu d'explication. "Le lanceur de satellites Simorgh a envoyé trois appareils de recherche dans l'espace", a annoncé Ahmad Hosseini, porte-parole de l'unité spatiale du ministère iranien de la Défense cité par la télévision d'Etat.

Cette dernière a montré brièvement les images du tir d'une fusée depuis un endroit désertique, se félicitant d'"un autre accomplissement des scientifiques iraniens".

"Les objectifs de recherche prévus pour ce lancement ont été atteints", a indiqué Ahmad Hosseini sans donner plus de précisions. "Il s'agissait d'un lancement préliminaire et nous aurons des lancements opérationnels dans un proche avenir", a-t-il promis.

Les médias locaux n'ont pas précisé d'où le lancement de jeudi avait eu lieu. Des médias américains, en citant des experts et des images satellites, avaient indiqué plus tôt en décembre que la République islamique se préparait à lancer une fusée à partir du centre spatial de Semnan, à quelque 300 km à l'est de Téhéran.

Pourparlers nucléaires en cours

L'annonce du jeudi 30 décembre intervient en effet en plein pourparlers pour sauver l'accord de Vienne qui ont été relancés fin novembre après cinq mois d'interruption entre Téhéran et les pays encore parties au pacte (France, Royaume-Uni, Allemagne, Russie, Chine).

(Re)voir Iran : les négociations sur le nucléaire reprennent, que faut-il en attendre ?

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Les négociations visent à faire revenir dans l'accord les Etats-Unis, qui l'avaient quitté en 2018 et avaient rétabli des sanctions contre l'Iran. Les Etats-Unis participent aux négociations de manière indirecte.

L'accord, validé par la résolution 2231 du Conseil de sécurité de l'ONU, enjoint Téhéran à "ne mener aucune activité liée aux missiles balistiques conçus pour pouvoir emporter des charges nucléaires, y compris les tirs recourant à la technologie des missiles balistiques".

Plusieurs essais iraniens de lancements spatiaux

Téhéran avait annoncé en février avoir testé un nouveau lanceur de satellites équipé de son "plus puissant" moteur à combustible solide. 

Selon le Pentagone et des images satellites du centre spatial de Semnan, l'Iran avait tenté à la mi-juin de lancer un satellite dans l'espace, sans succès. Téhéran de son côté avait nié l'échec du lancement.

En février 2020, l'Iran avait échoué à mettre en orbite un satellite d'observation scientifique, baptisé Zafar ("Victoire" en persan). Son lancement avait été condamné par Paris et Washington, qui avaient accusé Téhéran de vouloir renforcer ses compétences dans le domaine des missiles balistiques par le biais du lancement de satellites.

Deux mois plus tard, en avril 2020, les Gardiens de la Révolution, l'armée idéologique de la République islamique, avaient lancé leur premier satellite militaire.

Les Etats-Unis avaient alors estimé que ce lancement prouvait que le programme spatial iranien était destiné à des fins militaires plus que commerciales.

Affirmant n'avoir aucune intention de se doter de l'arme atomique, Téhéran assure que ses programmes balistique et spatial ne vont pas à l'encontre de la résolution 2231.