Fil d'Ariane
Un groupe soutenant la contestation en Iran déclenchée par la mort de Mahsa Amini, a piraté une chaîne de la télévision d'Etat, diffusant une image du guide suprême Ali Khamenei en feu.
Une image du guide suprême Ali Khamenei en feu, entourée d'un viseur a été diffusée à la télévision nationale iranienne par un groupe soutenant la contestation en Iran déclenchée par la mort de Mahsa Amini, ce dimanche 9 octobre 2022.
"Le sang de nos jeunes dégouline de tes doigts", indique un message apparu à l'écran lors de la diffusion samedi soir du journal télévisé, accompagnant une photo manipulée d'Ali Khamenei, montré entouré de flammes, la tête dans le viseur.
"Il est temps de ranger tes meubles (...) et de te trouver un autre endroit pour y installer ta famille à l'extérieur de l'Iran", peut-on lire sur un autre message accompagnant la photo.
#BREAKING The Edalat-e Ali hacktivist group hacked the Iranian state TV's live news broadcast, displaying a photo of Khamenei with the verse "The Blood of Our Youths Is on Your Hands" along with photos of #MahsaAmini and three other girls killed in #IranProtests. pic.twitter.com/dYM7flUBQt
— Iran International English (@IranIntl_En) October 8, 2022
La cyberattaque, qui a duré quelques secondes, a été revendiquée par un groupe se faisant appeler Edalat-e Ali (La justice d'Ali) qui appuie le mouvement de contestation en Iran, le plus important depuis les manifestations contre la hausse des prix l'essence en 2019.
(Re)voir : Iran : retour sur plusieurs années de contestation et de répression
L'Iran est le théâtre de manifestations depuis la mort le 16 septembre de Mahsa Amini, une femme kurde iranienne de 22 ans décédée trois jours après son arrestation par la police des mœurs à Téhéran pour avoir selon celle-ci enfreint le code vestimentaire strict pour les femmes en République islamique d'Iran.
L'ONG Iran Human Rights basée à Oslo a fait état d'au moins 95 morts depuis le 16 septembre. Selon un dernier bilan iranien donné le 27 septembre, environ 60 personnes ont été tuées, dont une dizaine de policiers.
En août 2021, Edalat-e Ali avait mis en ligne des vidéos montrant des gardiens de la prison d'Evine à Téhéran, en train de battre ou de maltraiter des détenus.
Plusieurs médias en persan basés à l'étranger ont partagé sur les réseaux sociaux une vidéo montrant la cyberattaque de samedi. Vers la fin de la vidéo, on peut voir le présentateur du journal télévisé l'air crispé, ses yeux fixant la caméra.
En Iran, l'agence de presse Tasnim a confirmé que la télévision d'Etat avait "été piratée pendant quelques instants par des agents anti-révolutionnaires".
(Re)voir : Iran : piratage de la télévision nationale et poursuite des manifestations
Samedi 8 octobre au soir, alors que le mouvement entrait dans sa quatrième semaine, des manifestations ont eu lieu dans plusieurs villes du pays y compris à Téhéran.
Et les rassemblements de solidarité se sont poursuivis à l'étranger.
Selon l'analyste iranien Omid Memarian, une vidéo a montré des protestataires à Téhéran chantant "Mort au dictateur".
Ailleurs, des écolières ont scandé "Femme, vie, liberté" à Saqez, ville natale de Mahsa Amini dans la province du Kurdistan (nord-ouest), et marché en agitant leur foulard au-dessus de leur tête, a indiqué l'ONG de défense des droits humains Hengaw, basée en Norvège.
Selon des images en ligne, sur une grande banderole placée sur un viaduc de l'autoroute Modares traversant le centre de Téhéran, il est écrit "Nous n'avons plus peur. Nous nous battrons".
(Re)voir Iran : "Cela fait 43 ans que les femmes luttent"
Samedi 9 octobre au soir, deux membres des forces de sécurité ont été tués lors des manifestations, l'un à Téhéran "par une foule armée" et l'autre à Sanandaj, la capitale du Kurdistan, selon l'agence officielle Irna.
L'agence a confirmé des protestations dans différentes villes, où des manifestants ont lancé des cocktails Molotov contre des mosquées, des centres de Bassidji, milice paramilitaire, et des bureaux d'imams de la prière.
"A Téhéran, la police a utilisé des gaz lacrymogènes pour disperser la foule", a-t-elle indiqué, ajoutant que les manifestants avaient "scandé des slogans et incendié et endommagé des biens publics, notamment un poste de police et des poubelles".
Vendredi 7 octobre, les autorités iraniennes ont affirmé que Mahsa Amini était décédée des suites d'une maladie et non de "coups".
Mais le père de la jeune femme, Amjad Amini, qui avait affirmé que sa fille était en bonne santé avant son arrestation, a rejeté le rapport médical dans une interview à Iran International, une chaîne de télévision en persan basée à Londres.
"J'ai vu de mes propres yeux que du sang avait coulé des oreilles et de la nuque de Mahsa", a-t-il dit.
Des militants et des ONG avaient affirmé qu'elle avait souffert d'une blessure à la tête durant sa détention.
L'Iran accuse des pays étrangers d'attiser les manifestations, notamment les Etats-Unis, son ennemi juré.
Par ailleurs, l'IHR, citant l'ONG Baluch Activists Campaign, a donné un nouveau bilan de 90 morts dans la répression de manifestations la semaine dernière à Zahedan dans la province du Sistan-Baloutchistan (sud-est), qui ne sont pas liées au décès de Mahsa Amini. Selon des ONG, les manifestations ont été déclenchées après des accusations de viol d'une adolescente par un policier.