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Iran : que signifient les manifestations contre la politique du président Hassan Rohani ?

Depuis ce jeudi 28 décembre 2017, des manifestations ont lieu dans plusieurs villes d'Iran, dont Mashhad, deuxième plus grande agglomération du pays. La "vie chère" semble au cœur des revendications, mais les slogans demandant le départ du président Rohani questionnent sur l'ampleur et les véritables aspirations du mouvement de contestation. Que se passe-t-il en Iran en cette fin d'année 2017 ? 
Des centaines de personnes ont défilé en Iran, à Mashhad, la ville sainte chiite, mais aussi à Neyshabour et Kashmar, ce jeudi 28 décembre 2017. Les manifestants dénoncent la hausse des prix, causée selon eux par la mauvaise gestion du président Hassan Rohani et la corruption du pouvoir, alors que les accords sur le nucléaire de 2015 et la fin de l'embargo auraient normalement dû améliorer la situation économique du pays. Depuis samedi soir 30 décembre, Internet est coupé pour les téléphones portables.
 
Carte Iran



Ce vendredi 29 décembre, selon l'association Comité de soutien des droits de l'homme en Iran, "la métropole du Kurdistan d'Iran manifeste en solidarité avec Mashhad et les villes qui hier se sont soulevées". Notons que cette association basée en France est un organe des Moudjahidine du peuple, opposé au régime iranien et placé plusieurs années durant sur la liste des organisations terroristes par les Etats-Unis et le Conseil de l'Union européenne.  
 
Sur les réseaux sociaux, des images de manifestations dans d'autres villes circulent :
 
Le chômage a atteint 12,4% en Iran cette année, soit plus de 3 millions de personnes sans emploi. Hier, face aux manifestations, la police est intervenue, avec quelques arrestations, sans grandes démonstrations de force. Ce vendredi, les slogans de "à mort Rohani" commencent visiblement à inquiéter les autorités qui répriment les manifestants plus violemment. La crainte d'une montée en puissance des contestataires à travers le pays commence à voir le jour chez les dirigeants iraniens, selon les observateurs et soutiens des manifestants : 
 
Les revendications semblent prendre une tournure plus "révolutionnaire" et la problématique de chèreté de la vie n'est peut-être pas — au final — le cœur de ce qui peut être considéré comme un début de soulèvement populaire contre le pouvoir en place : 
 

L'analyse de Slimane Zeghidour, notre éditorialiste :
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Thierry Coville, chercheur à l'Institut de relations  internationale et stratégiquess (IRIS), spécialiste de l'Iran, répond à nos questions sur le mouvement de contestation qui débute en Iran.
Thierry Coville
Thierry Coville, chercheur à l'IRIS et spécialiste de l'Iran


Les manifestations débutés hier étaient-elles prévisibles ?

Thierry Coville : Oui et non. D'après ce qu'on sait, il semblerait que les manifestations qui ont lieu d'abord à Mashhad ont été organisées par des éléments radicaux, on va dire. Ca peut être suite à l'échec du candidat radical qui a échoué contre Rohani et qui est de Mashhad. Ce qui s'est passé c'est que ça a pu échapper aux organisateurs avec tout de suite des slogans contre la situation économique et contre le régime. 

Qui manifeste principalement ?

T.C : La situation sociale et économique en Iran est compliquée avec notamment une situation de chômage très élevé qui touche surtout les jeunes diplômés. C'est difficile d'estimer précisément le chômage en Iran, mais on pense que c'est autour de 16 à 18%. Ca crée une situtation sociale explosive avec en plus le sentiment que tout le monde n'est pas égal devant la loi. Si vous mélangez tout ça avec la période très dure des sanctions dont l'Iran n'est pas sorti malgré la levée en 2016, il y a un mécontentement assez important. Qui touche les plus pauvres mais aussi les classes moyennes. Donc je pense que monsieur tout le monde est dans la rue en Iran. 

Le mouvement de contestation dans la rue peut-il s’amplifier ?

T.C : Ce qui est très clair c'est que les autorités ont déjà arrêté des gens hier. Il y a un fond pour le populisme en Iran, Ahmadinejad était déjà sur ce créneau là. Mais il y a un niveau d'éducation élevé dans ce pays et je ne crois pas que les gens, particulièrement dans les villes, soient prêts à transformer ces manifestations en mouvement général de grande ampleur. Tout ça traduit de toute manière une très grande attente envers Rohani.

Que risquent de faire les dirigeants iraniens si le mouvement contine ?

T.C : Rohani a annoncé la hausse du prix de l'essence, la diminution de moitié du nombre de gens qui recevront des subventions d'Etat, donc c'est un terrain propice au populisme. Ahmadinejad va surfer sur ce mécontentement. Ensuite, si ça déborde il y aura une réponse répressive et sinon, cela met surtout une pression politique sur Rohani. Il y a beaucop de gens qui ont voté pour lui et qui regrettent leur décision. Ils pensaient que tout allait changer avec Rohani, et ce n'est pas le cas. C'est une déception, parce qu'il ne fait pas grand chose, mais la situation est compliquée…