Israël : La répression jusqu'au web ?

Image
Netanyahu loi peuple juif
Le premier ministre israélien Benyamin Netanyahou et son gouvernement ont fait du web un nouveau terrain de chasse des contestations arabes.
©Jim Hollander / AP Photo
Partager3 minutes de lecture
Le jeudi 19 juillet 2018 restera une date marquante dans l’histoire israélienne. Les députés de la Knesset ont approuvé un projet de loi proclamant qu’Israël est un "Etat national du peuple juif", réduisant le statut des arabes. Même si ces derniers n’étaient pas reconnus comme des citoyens à part entière, c’est désormais un texte officiel qui fige cette réalité. Une loi qui symbolise un climat délétère pour des arabes dont les moyens de contestations sont de plus en plus limités. Car la répression ne se fait pas uniquement dans la rue, elle les suit désormais jusqu’au web.

Ils sont plusieurs dizaines de milliers à défiler dans les rues de Tel Aviv ce 4 août. Leurs contestations ciblent la nouvelle loi votée par la Knesset, proclamant qu’Israël est “l’Etat nation du peuple juif”. L’Etat hébreu réserve donc exclusivement le droit à l'autodétermination aux juifs. Les arabes, mais aussi leur langue, perdent officiellement un statut qui n’était déjà plus réel. Cette loi vient, encore plus, restreindre les libertés des arabes en territoire israélien. Des libertés sans arrêt mises à mal sur le terrain et récemment, aussi sur Internet.

Le web, nouvelle cible du gouvernement

Un rapport du site 7amleh, qui réalise des observations sur l’état des libertés sur les réseaux sociaux dans le monde arabe, dénonce la censure étatique de l’Etat israélien.
Selon eux, un certains nombre de lois jugées liberticides mènent à une purge des réseaux sociaux par l’Etat israélien.

Des affirmations confirmées par le journaliste Glenn Greenwald ou encore le média israélien Haaretz. Selon eux, la ministre de la justice Ayelet Shaked a affirmé que l’Etat hébreu a formulé des demandes de suppression de contenus sur Facebook et Youtube. 95 % d’entre elles auraient été satisfaites.

Des ONG menacées

Au-delà des accords avec les géants du web, l'Etat veut instaurer des peines d’emprisonnement, qui peuvent aller jusqu’à 10 ans, aux personnes filmant des soldats de l’armée israélienne.
Avec cela, les militants perdent leurs seuls moyens de pouvoir dénoncer les exactions des soldats israéliens.

Proposée par Robert Ilatov, député d’extrême droite, une loi s’attaque notamment aux ONG qui utilisent les réseaux sociaux afin de publier des vidéos montrant les abus de soldats israéliens. Il ne cache d'ailleurs pas ses intentions : "A de nombreuses reprises, ces organisations passent la journée entière aux côtés de soldats israéliens à attendre en retenant leur souffle quelques actions qu’ils pourraient manipuler dans le but de calomnier l’armée", déclare-t-il dans le texte de proposition de loi. Hasard du calendrier... ou pas, le texte de loi a été déposé quelques semaines après la libération anticipée d’un soldat israélien, reconnu coupable d’avoir achevé un assaillant palestinien blessé. Un crime qui avait été rendu public par l'ONG B’Tselem sur les réseaux sociaux.

Selon le porte-parole de l’ONG B'tselem, Amit Gilutz, le gouvernement se trompe de combat : "Si le gouvernement trouve l’occupation trop embarrassante pour être filmée, il devrait travailler à y mettre fin et non pas s’attaquer aux photographes", déclare-t-il dans le Washington Post.

De la cybersécurité à la cyber-répression ?

Israël est devenu un des leaders mondiaux en terme de cybersécurité. Le gouvernement Netanyahu a récemment décidé d'accélérer sa coopération avec le secteur privé à travers la loi mais aussi en investissant des dizaines de millions de dollars pour stimuler la cyber-industrie.
Une coopération qui laisse, malgré tout, le seul Netanyahu décisionnaire lorsqu'il s'agit de définir les profils des cyber-menaces.

Une crainte pour les ONG qui redoutent de voir l'agenda politique du gouvernement transposé et que, sous couvert de lutte contre le cyber-terrorisme, il en profite pour purger la contestation.

Sur fond de violation de vie privée et de censure, le confit israélo-palestinien n'a, plus que jamais, plus de frontières.