Israël : que signifie la décision de la Cour suprême à propos de la réforme judiciaire ?

Le lundi 1er janvier, la Cour suprême israélienne annonce avoir invalidé une disposition clé de la réforme judiciaire très controversée promue par le gouvernement de Benjamin Netanyahu. Pourquoi cette réforme était-elle contestée ?

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Manifestation israel

Des Israéliens protestent contre les projets du gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu de réformer le système judiciaire et soutiennent la Cour suprême avant l'audience cruciale du 28 septembre 2023 à Jérusalem.

AP Photo/Ohad Zwigenberg
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C’est un projet qui divisait profondément la société israélienne depuis près d’un an. Finalement, la Cour suprême a invalidé une disposition de la réforme judiciaire. Cette mesure invalidée prévoyait d'ôter au pouvoir judiciaire le droit de se prononcer sur "le caractère raisonnable" des décisions du gouvernement ou du Parlement israélien. Ainsi, aucun contre-pouvoir n’aurait été en mesure de contrôler les décisions de la majorité gouvernementale. 

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Selon le gouvernement de coalition, alliant des partis de droite, d'extrême-droite et des formations juives ultra-orthodoxes, cette réforme visait à corriger un déséquilibre, en renforçant le pouvoir des élus sur celui des magistrats. Huit des quinze juges de la Cour suprême ont voté pour l'invalidation de cette mesure, a indiqué le ministère de la Justice. 

Que contient cette réforme ?

Outre la disposition invalidée par la Cour suprême, la réforme judiciaire prévoyait d’autres éléments. Le gouvernement israélien compte faire adopter une clause dite "dérogatoire" qui permettrait au Parlement, avec un vote à la majorité simple, d'annuler une décision de la Cour suprême.

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La réforme prévoit aussi d’intervenir sur la nomination des juges à la Cour suprême. Actuellement, ces derniers sont nommés par un groupe de juges, de députés et d'avocats du barreau, sous supervision du ministre de la Justice. La réforme propose de retirer les avocats de ce panel, où siègeraient à leur place deux citoyens, en plus d'un ministre. La Knesset (le parlement) organiserait également des audiences publiques au sujet des nominations.

À travers cette réforme, le gouvernement souhaite également réduire l'influence des conseillers juridiques au sein des ministères. Leurs recommandations sont citées par les juges de la Cour suprême lorsqu'ils statuent sur la bonne conduite du gouvernement. Le ministre de la Justice souhaite qu'elles soient clairement considérées comme des avis non contraignants.

Un projet fortement décrié

Le site d’information israélien Ynetnews rappelle que dès son annonce au mois de janvier 2023, cette réforme a été à l’origine d’un “clivage sans précédent dans la société israélienne”. Elle a même déclenché une vague massive de manifestations dans tout le pays pendant la majeure partie de l’année”. 

Ce projet est donc à l’origine d’un des plus importants mouvements de contestation de l'histoire d'Israël. D’importantes manifestations ont eu lieu principalement à Tel Aviv, mais aussi dans tout le pays, tout au long de l’année. Début 2023, chaque semaine, les israéliens sont descendus dans la rue pour protester contre cette réforme. 

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En juillet, alors qu’intervient un vote au Parlement sur la mesure invalidée ce 1er janvier par la Cour suprême, les manifestations reprennent de l’ampleur. La Knesset vient valider cette mesure à 64 voix sur 120. Puis, en septembre, c’est au tour des quinze juges de la Cour suprême de se pencher sur la question, pour rendre leur décision le 1er janvier.

Depuis le 7 octobre, les manifestations liées à la réforme ont été éclipsées par la guerre à Gaza. Mais selon le quotidien Israel Hayom, la décision “historique” de la Cour suprême menace “de rouvrir les fissures [... ] qui ont précédé la guerre actuelle du pays contre le Hamas.

En effet, les réservistes militaires faisaient parti des centaines de milliers de manifestants opposés à cette réforme militaire. Or, ils sont mobilisés depuis le début de la guerre. “Alors que les réservistes ont rapidement repris leur service lors du déclenchement de la guerre], on ne sait toujours pas ce qui se passerait si [la réforme judiciaire] est relancée. Une reprise des manifestations pourrait saper l’unité nationale et affecter la préparation de l’armée si les soldats refusaient de se présenter”, craint le journal Israel Hayom.

Une décision saluée par l’opposition 

Le chef de l'opposition et ancien Premier ministre Yaïr Lapid salue la décision de la Cour suprême. Il juge que la Cour a "fidèlement rempli son rôle en protégeant les citoyens d'Israël". Cette décision "met fin à une année difficile de conflits qui nous ont déchirés de l'intérieur et ont conduit à la pire catastrophe de notre histoire", déclare-t-il sur X (ex-Twitter), se référant à l'attaque du Hamas. 

La décision "doit être respectée", réagit -également sur X- Benny Gantz, membre du cabinet de guerre et ancien rival de Benjamin Netanyahu, appelant à l'unité "pour gagner la guerre, ensemble". Le Mouvement pour la probité du pouvoir, qui avait déposé le recours contre cette clause, salue une décision "historique". 

Le projet de réforme judiciaire est derrière nous, désormais, explique au quotidien français Le Monde un opposant israélien, qui ne souhaite pas être cité. Et la décision la plus importante est que la Cour suprême a affirmé qu’elle était en mesure de se prononcer sur des Lois fondamentale.