Italie : qui succèdera à Mario Draghi ?

Jeudi 21 juillet, Mario Draghi démissionne de son poste de président du Conseil en Italie. Dans la foulée, le président Sergio Mattarella dissout le parlement. Des élections anticipées sont prévues au mois de septembre. Quels partis sont donnés favoris ? Tour d’horizon.
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Le président italien Sergio Mattarella, au milieu, annonce la dissolution du parlement le 21 juillet 2022.
Gregorio Borgia/AP
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Après près d’un an et cinq mois, Mario Draghi quitte la présidence du Conseil des ministres en Italie. Jeudi 21 juillet, il a remis la démission de son gouvernement au président Sergio Mattarella. Ce dernier a pris acte de sa décision et a dissout le parlement. "La situation politique a conduit à cette décision", déclare-t-il lors d’une allocution télévisée. De ce fait, des élections anticipées auront lieu à l’automne. 

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Les médias italiens avancent plusieurs dates pour ces élections : le 18 et 25 septembre, ou encore le 2 octobre. Trois partis se démarquent déjà. Fratelli d’Italia, parti post-fasciste présidé par Giorgia Meloni, est donné en tête dans les intentions de vote, à près de 24%. Il arrive devant le Parti démocrate (22%) et la Ligue (14%) selon un sondage de l’institut SWG réalisé le 18 juillet. Le chef du parti remportant les élections sera désigné nouveau président du Conseil. 

Un parti post-fasciste en tête dans les sondages

L’archi-favori des sondages est la coalition dite "de centre-droite", qui réunit Forza Italia, le parti de droite de Silvio Berlusconi, et l’extrême droite représentée par la Ligue du tribun populiste anti migrants Matteo Salvini et Fratelli d’Italia. Dans les intentions de votes, c’est le parti post-fasciste présidé par Giorgia Meloni qui est donné premier dans les intentions de votes. 

Giorgia Meloni
La présidente du parti Fratelli d'Italia Giorgia Meloni lors d'un rassemblement le 4 juillet 2020 à Rome.
Riccardo De Luca/AP

Giorgia Meloni est à la tête de la formation politique post-fasciste Fratelli d’Italia, qu’elle a elle-même fondée en 2013. Journaliste de formation, cette femme politique de 45 ans s’engage en politique en 1992 au Front de la jeunesse du Mouvement social italien, une organisation héritière du fascisme de Mussolini. Elle est alors âgée de 15 ans. À 31 ans, elle devient ministre pour la Jeunesse dans le quatrième gouvernement de Silvio Berlusconi, en 2008. Elle devient ainsi la plus jeune ministre de l’histoire du pays. 

Dès l’annonce de la démission de Mario Draghi le 14 juillet, Giorgia Meloni est déjà en campagne. Interrogé par l’hebdomadaire français Marianne, le professeur de science politique à l’université de Rome la Sapienza Antimo Luigi estime que le parti politique de Giorgia Meloni, Fratelli d’Italia "est aujourd’hui le seul parti en réelle opposition sur le plan politique et culturel." Selon lui, "les Italiens ont un sentiment de précarité de plus en plus fort et ils se retournent, par conséquent, vers le seul parti qui prêche la révolte."

La gauche à la tête du pays ?

Enrico Letta, du Parti démocrate est la deuxième personnalité susceptible de succéder à Mario Draghi. Par ailleurs, son parti est le seul membre de la coalition nationale à lui être resté loyal. Le poste de président du Conseil des ministres ne lui est pas inconnu : il l’a été pendant un peu moins d’un an, du 28 avril 2013 au 22 février 2014. 

Enrico Letta
Enrico Letta lors d'un vote de confiance le 25 février 2014. 
 
Andrew Medichini/AP

Il entre dans la vie politique en adhérant à la Démocratie chrétienne, puis au Parti populaire Italien au début des années 1990. En 1998, il entre au gouvernement en tant que ministre délégué aux Politiques communautaires, à 32 ans. Il occupera ensuite les postes de ministre de l’Industrie, du Commerce et de l’Artisanat (1999-2001), de député européen (2004-2006), de secrétaire d’État à la présidence du Conseil des ministres (2006-2008) et de vice-secrétaire du Parti démocrate (2009-2013), avant de devenir président du Conseil des ministres.

Il quitte la vie politique en démissionnant de ce poste. En mars 2021, il fait son retour en devenant secrétaire du Parti démocrate italien. Lors des élections municipales d’octobre 2021, le parti est arrivé dans de nombreuses grandes villes italiennes, comme Naples, Milan, Rome, Turin et Bologne. 
 

L’extrême-droite à l’origine de la chute de Draghi


La Ligue de Matteo Salvini est le troisième parti donné favori par le sondage de SWG. Le parti post-fasciste de Silvio Berlusconi Forza Italia recueille 7,4% des intentions de vote et le Mouvement 5 Étoiles (M5S) de Giuseppe Conte 11,2%. Le 21 juillet, ces trois partis refusent de participer au vote de confiance du Sénat. En effet, Mario Draghi s’était dit prêt à rester à son poste seulement si les partis de sa coalition rentraient dans le rang autour d’un "pacte" de gouvernement, déjà mis en péril par une première défection du M5S la semaine précédente.

Lors de ce vote de confiance, seuls le centre et la gauche incarnée par le Parti Démocrate ont voté en sa faveur, entre autres parce qu’ils redoutent plus que tout les élections anticipées. Dans toutes les enquêtes d’opinion, ils sont donnés battus par la droite. Les poids-lourds de la coalition ont préféré voter contre Mario Draghi, les yeux rivés sur la campagne électorale à venir. 

Matteo Salvini, secrétaire fédéral de la Ligue depuis 2013 peut donc prétendre au poste de président du Conseil des ministres. Entre le 1er juin 2018 et le 5 septembre 2019, il était vice-président de ce Conseil, qui avait Giuseppe Conte à sa tête. Il occupe également le poste de ministre de l’Intérieur. Sa politique de lutte contre l’immigration lui fait gagner en popularité. Par exemple, il refuse à des navires humanitaires transportant des migrants venus de Libye d’entrer dans des ports italiens. 

Matteo Salvini
Matteo Salvini lors d'une conférence de presse le 7 juin 2022.
Gregorio Borgia/AP

À la fin du premier gouvernement Conte, Salvini redevient sénateur et siège dans l’opposition. Il quitte l’opposition lorsque son parti apporte son soutien à Mario Draghi pour former un nouveau gouvernement, après la démission du second gouvernement Conte. Avec la fin de la coalition, chaque parti retourne désormais vers ses propres horizons. Le gouvernement sortant continuera toutefois d’assurer les affaires courantes jusqu’à la tenue des élections.