










Jacques Chirac restera l'un des personnages politiques les plus populaires de la Ve République, tant pour son caractère haut en couleurs que pour son côté grand fauve politique.
Avec son allure de jeune premier, Jacques Chirac aurait pu faire une carrière de comédien. Mais c'est la politique qu'il choisit.
Sait-il déjà en 1965 lors de son premier mandat, comme conseiller municipal à Saint Ferréol en Corrèze, que la France toute entière deviendra son destin ? Durant toute sa carrière, Jacques Chirac serre des milliers des mains. Il n'hésite pas non plus à partager le verre de l'amitié. La politique est justement pour lui une affaire d'hommes et d'amitiés.
Son mentor Georges Pompidou le qualifie de "Bulldozer" tant rien n'est susceptible de stopper le jeune ambitieux. Et en politique on ne donne rien : il faut prendre.
Député de Corrèze, le jeune énarque passe de secrétariats d'Etat en ministères. Jamais loin de lui, son épouse Bernadette, rencontrée sur les banc de Sciences Po, son garde-fou, son cerveau droit durant toute sa carrière.
En 1974, il lâche Jacques Chaban-Delmas, dans sa quête présidentielle, au profit de Valéry Giscard d'Estaing le centriste. Giscard, élu président, le nomma Premier ministre. L'entente tourna court. Chirac claqua la porte.
Je ne dispose pas des moyens que j'estime aujourd'hui nécessaires pour assumer efficacement mes fonctions de Premier ministre.
Jacques Chirac, 25 août 1976
Le propre en politique selon Jacques Chirac est de ne jamais tomber mais de rebondir.
Nouvelle ère, naissance du parti gaulliste le RPR. Une machine de guerre dont l'objectif est de le mettre sur orbite vers la présidentielle.
Première étape : la mairie de Paris qu'il souffle au nez et à la barbe du candidat de Valéry Giscard d'Estaing.
1986 : retour à l'Elysée dans le costume de Premier ministre. Première cohabitation de la Vème République, et nouvelle ambiance glaciale avec cet autre président, François Mitterand, qu'il affronte lors de l'élection présidentielle de 1988.
Ambiance tendue aussi lors du débat de l'entre-deux-tours, le 28 avril 1988, entre les deux hommes quand Jacques Chirac lance : "Ce soir, je ne suis pas le Premier ministre. Et vous n'êtes pas le président de la République. Nous sommes deux candidats à égalité, qui se soumettent au jugement des Français. Vous me permettez donc de vous appeler Monsieur Mitterrand.".
Après deux candidatures et deux échecs à la présidentielle, Jacques Chirac est élu président en 1995. Une malencontreuse dissolution de l'Assemblée nationale deux ans plus tard, et la réélection en 2002 contre Jean-Marie Le Pen avec 82,1% au second tour. Une deuxième législature marquée par le "non" à Georges Bush pour la guerre en Irak.
Je veux donner toutes leurs chances au désarmement de l'Irak dans la paix.
Jacques Chirac, mars 2003
Autre moment retentissant et, pas si improvisé que cela, le 22 octobre 1996 à Jérusalem face au virulent service d'ordre israélien. "Qu'est-ce que vous voulez ? Que je prenne l'avion et rentre en France ? C'est cela que vous voulez ? Alors laissez-les faire. Il n'y a pas de danger, pas de problème. Ce n'est pas une méthode. C'est une provocation."
Fin de mandat : Jacques Chirac est amoindri politiquement. Les affaires comme les emplois fictifs du RPR se rapprochent dangereusement. Jacques Chirac parle alors d'"histoires abracadabrandestesques".
Amoindri aussi physiquement suite à un AVC en 2005. Les derniers mois de son mandat sont difficiles. Mai 2007, une image forte : il transmet la plus haute fonction à un autre animal politique envers lequel le resentiment est toujours vif, Nicolas Sarkozy. Quatre ans plus tard, goguenard, il soutiendra son adversaire à la présidentielle : "Je peux dire que je voterai Hollande".
La toute dernière apparition publique de Jacques Chirac date de 21 novembre 2014.
Il n'est visiblement, plus le même. La démarche, la poignée de main, plus rien n'était assuré. Le "Bulldozer" dont parlait Georges Pompidou ne pouvait plus bousculer grand-chose. L'émotion est visible chez ses proches et les adversaires d'hier, réels ou supposés.
Ce jour-là, l'ancien président s'installe dans l'auditorium du musée du Quai Branly. Ce lieu, consacré aux arts premiers d'Afrique, d'Asie, d'Océanie et des Amériques, qu'il a tant voulu, lui permet de faire partager son amour pour l'art : la statuaire africaine ou asiatique, la brutalité apparente et la complexité des codes.