JO 2024 : le lutteur franco-arménien Snjoyan dit adieu à sa participation aux Jeux

En raison du conflit entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie, son pays d'origine, le lutteur français Gagik Snjoyan renonce à se rendre à Bakou pour y disputer les qualifications pour les Jeux. Dire adieu à son "rêve olympique" a été la décision "la plus difficile de (sa) carrière"...

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Gajik Snjoyan,champion de lutte

Gajik Snjoyan, vice-champion du monde de lutte grevo-romaine. Capture d'écran Instagram, Fédération de lutte française

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Sélectionné dans un premier temps pour ce tournoi qualificatif en tant que N.1 français dans sa catégorie des 67 kg, Snjoyan était pourtant prêt à aller défendre ses chances en Azerbaïdjan. Mais les inquiétudes de sa famille pour sa sécurité l'ont fait changer d'avis.

"Tout Arménien qui entre sur le territoire azerbaïdjanais risque de ne pas revenir. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est la vie qui le montre", décrivait le combattant de 22 ans au cours d'un entretien réalisé la veille de la compétition le 4 avril. "Sincèrement, c'est compréhensible. Si vous avez suivi les tensions entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan ces derniers temps, c'est vraiment compliqué. Aucun Arménien ne va en Azerbaïdjan et inversement."

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Des différends territoriaux opposent les deux pays voisins du Caucase depuis plusieurs décennies dans un conflit issu de la dislocation de l'Union soviétique. En septembre 2023 lors d'une offensive éclair, les troupes azerbaïdjanaises ont repris aux séparatistes arméniens la région du Haut-Karabakh, enclave située en Azerbaïdjan, et la situation reste instable aujourd'hui.

J'ai décidé de penser à ma famille d'abord. Gagik Snjoyan, champion de lutte greco-romaine

Malgré des mesures de sécurité renforcées proposées par la Fédération française, il s'est décidé à faire une croix sur le tournoi, la décision "la plus difficile de (sa) carrière".
"Je n'ai jamais été confronté à ce genre de situation. Dans ma tête, des situations comme ça, ça n'arrive pas à moi, ça arrive aux autres. Et quand ça nous arrive, franchement ce n'est pas simple à gérer. D'un côté on a la famille, et de l'autre côté, on a notre rêve, toute notre sueur qui a coulé depuis des dizaines d'années."

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Né à Erevan en 2001, c'est dans son pays natal que Snjoyan a fait ses premiers pas en lutte gréco-romaine, avant d'atterrir fin 2013 en France, où sa famille a fait une demande d'asile. "En Arménie, il y a trois ou quatre salles de lutte dans chaque ville, un peu comme les terrains de foot en France. C'est le sport que faisait mon père, que faisait toute ma famille, mes oncles et mes cousins... Je baignais dedans en fait, c'était sûr, c'était mon destin."

Mais Snjoyan regrette surtout que la Fédération internationale ait décidé d'organiser ce TQO en Azerbaïdjan. "C'est inadmissible, on ne peut pas faire ça. Il fallait mettre le tournoi dans un pays de paix. Le plus gros problème vient de là." 

En renonçant à cette compétition qualificative pour les Jeux de Paris, Gagik Snjoyan a donc laissé sa place au N.2 français Mamadassa Sylla. Un déchirement pour celui qui n'avait déjà pas pu défendre ses chances aux Championnats du monde 2023 en raison d'une blessure à l'épaule.

"Cela fait deux fois d'affilée que, par manque de chance, je n'arrive pas à participer."
À Bakou, son remplaçant Mamadassa Sylla a su profiter de ce coup du destin. En atteignant la finale du TQO, le combattant de 30 ans s'est offert son billet olympique, barrant la route à Snjoyan. "Je n'ai même pas eu le droit de montrer de quoi je suis capable", regrette-t-il.