Le Premier ministre sortant Hashim Thaçi remporte sans surprise les élections législatives tenues ce dimanche au Kosovo. Victoire pourtant relative pour l'ancien chef de guerre, et chantier considérable tant au plan économique que politique. Parrainé par les États-Unis, son pays n'est toujours pas reconnu par l'ensemble de la communauté internationale, dont la Russie qui ne se prive pas de rappeler les origines douteuses de son indépendance.
Etat de doute
"C'est une victoire du Kosovo et de ses citoyens. Nous allons immédiatement nous mettre à l’œuvre, jour et nuit, pour édifier l'État que nos citoyens souhaitent". Malgré l'accent triomphant, le Premier ministre kosovar sortant, Hashim Thaçi, dont le parti est arrivé en tête des législatives de dimanche, était à la recherche lundi d'une majorité parlementaire lui permettant de gouverner pour un troisième mandat consécutif cette jeune entité indépendante de la Serbie depuis 2008. Son Parti démocratique du Kosovo (PDK) obtient 31,21% des voix, suivi du principal parti d'opposition, la Ligue démocratique du Kosovo (LDK, 26,13 %) mais, avec 35 des 120 sièges du Parlement, il devra impérativement chercher des partenaires pour former une majorité. Du côté de l'opposition, qui avant le scrutin excluait une alliance avec le parti de Thaçi, la LDK peut compter sur 30 sièges, le parti Autodétermination (Vetevendosje) sur 15 et l'Alliance pour l'avenir du Kosovo (AAK) de Ramush Haradinaj sur 10 sièges. Telle qu'elle se profile, surtout, la répartition des mandats fait gagner en importance le soutien des députés des Serbes du Kosovo qui ont répondu à l'appel des autorités à Belgrade de se rendre aux urnes. Leur participation au scrutin - quelque 53.000 des 120.000 Serbes du Kosovo ont voté selon la presse à Belgrade -, représentait un des principaux enjeu du vote de dimanche. Les 10 sièges au Parlement kosovar qui leurs sont garantis par la loi sont en position de faire la différence dans la lutte pour le pouvoir. Ancien chef de la guérilla indépendantiste reconverti dans la politique, Hashim Thaçi (46 ans), s'est présenté aux élections fragilisé par une mauvaise situation économique et un taux de chômage de 35%. Au Kosovo, l'un des pays les plus pauvres d'Europe, dévasté par la corruption endémique et le crime organisé, 47% de la population (1,8 million d'habitants) vit dans la pauvreté avec environ 80 euros par mois, alors que le salaire mensuel moyen est de 350 euros. Vingt-quatre ans après sa conception et six ans après sa naissance officielle, le statut de ce naguère morceau de Yougoslavie reste d'ailleurs incertain au regard du droit international.
Né dans la douleur
Profitant de la dislocation de la fédération socialiste Yougoslave bâtie par Tito et de l'isolement diplomatique du leader ultra-nationaliste serbe Slobodan Milosevic, les députés du Kosovo avaient proclamé dès 1990 l'indépendance assez symbolique du territoire (alors province autonome majoritairement peuplée d'"Albanais" et incluse dans la Serbie, elle-même l'une des républiques Yougoslaves). Celle-ci est confirmée l'année suivante par un « référendum » ... sans plus de valeur juridique internationale. Élu au terme d'un scrutin « clandestin », l'intellectuel charismatique Ibrahim Rugova devient le premier président de la « République du Kosovo », mais c'est plus une société parallèle qu'un État. Déçus par l’indifférence de la communauté internationale, des Albanais rejettent alors l’autorité de Rugova et forment l'Armée de libération du Kosovo (UCK). Celle-ci entreprend vers 1997 des actions de guérilla. Milosevic y répond par plusieurs massacres. Enhardies par les précédents de Croatie et de Bosnie-Herzégovine, les puissances occidentales décident alors d'intervenir militairement. L'OTAN, dont c'est la première action armée depuis sa création, effectue durant 78 jours de mars à juin 1999 des centaines de bombardements sur la Serbie, Belgrade comprise. Ceux-ci n'arrêtent pas immédiatement Milosevic mais exacerbent les violences de part et d'autre. L'armée serbe rase les maisons. Des centaines de milliers d'"Albanais" terrorisés prennent le chemin de l'exil, vers l'Albanie, la Macédoine et le Monténégro. L'intervention militaire de l'OTAN n'a aucune légalité onusienne mais elle est chaleureusement applaudie – en France, notamment – par une presse et une intelligentsia surchauffées dans ce que le journaliste Dominique Vidal nommera l'« une des plus grandes manipulations médiatiques » du dernier demi-siècle. Éditorialistes et philosophes y rivalisent de bellicisme, traitant de « munichoises » les rares voix discordantes (Régis Debray, Jean-François Kahn ...). Le gouvernement allemand, de son côté, justifie sa participation à la guerre en publiant en avril un plan de déportation massive (« Fer à cheval ») des populations albanaises imputé aux Serbes. On saura plus tard qu'
il s'agissait d'un faux et de nombreux observateurs officiels ou non gouvernementaux (OSCE, Amnesty International, TPIY) confirmeront que les crimes de guerre, hélas, étaient largement perpétrés
des deux côtés . Cela n'a plus beaucoup d'importance : Milosevic s'est incliné en juin 99 et le Kosovo est placé par les « vainqueurs » sous protectorat des Nations-Unies. Une autorité civile est instituée, dirigée par l'ex (et futur) ministre français Bernard Kouchner.
De fait
Jusqu'en 2008, le statut final du territoire reste indéterminé, un temps symboliquement présidé par Ibrahim Rugova (qui décède en 2006). En dépit de son passé criminel établi et de son implication présumée dans d'innombrables trafics, (dont celui d'organes), l'UCK en devient de facto le dirigeant. Particulièrement désirée des États-Unis, l'indépendance du Kosovo est prononcée - pour la seconde fois - le 17 février 2008 par son « parlement » sous la direction d'Hashim Thaçi mais sa validité internationale reste contestée. Un peu plus de la moitié seulement des États membres de l'ONU reconnaissent aujourd'hui le Kosovo. Au sein même du Conseil de Sécurité, la Russie et la Chine y demeurent opposées. Cinq pays de l'Union européenne – concernés directement ou non par le risque irrédentiste - s'y refusent (Espagne, Grèce, Roumanie...). D'un statut proche de celui de la République turque de Chypre du Nord, il n'est pas membre de l'OSCE et demeure exclu des grandes manifestations sportives internationales (football, jeux olympiques). Une partie du territoire du Kosovo reste sous tutelle serbe et continue d'échapper à son autorité. En dépit d'infléchissements largement imposés, Belgrade, du reste, continue de ne pas admettre son indépendance. Et la Russie ne s'est pas privée récemment de rappeler abondamment le précédent Kosovar (qu'elle condamne pourtant, tout comme … l'Ukraine) pour justifier le référendum en Crimée, qualifié, lui, d'illégal par les … occidentaux.
Le Kosovo (d'après Wikipédia)
Le Kosovo possède une superficie de 10 877 km². C’est une région essentiellement montagneuse, avec toutefois deux plaines : La plaine du Kosovo proprement dite, ou Kosovo oriental ; le Kosovo oriental (Kosovo Polje en serbe et Fusha e Kosovës en albanais) correspond au bassin supérieur de la Sitnica, affluent de la Morava occidentale, qui se jette dans le Danube. À l’origine, le terme « Kosovo » désignait la vaste plaine constituant la partie orientale de la province de Kosovo telle qu’on la connaît actuellement12. La plaine du plateau occidental, la Métochie que les Serbes nomment Metohija et que les Albanais appellent Rrafsh i Dukagjinit (plateau de Dukagjin) ou simplement Dukagjin ; ce plateau correspond au bassin supérieur du Drin Blanc (Beli Drim en serbe et Drini i Bardhë en albanais) qui rejoint le Drin Noir (Drini i Zi en albanais) à Kukës (Albanie) pour se jeter dans la mer Adriatique. Les deux bassins sont séparés par la chaîne de collines de la Drenica. Cette division en deux plaines se retrouve dans le nom de Kosovo-et-Métochie, et a eu une influence dans l'histoire. Ainsi, après les guerres des Balkans (1912-1913), le Kosovo a été intégré à la Serbie, alors que l'essentiel de la Métochie a été rattachée au Monténégro. Le Kosovo possède une auto-suffisant en eau. Les rivières se jettent dans la mer Egée, la mer Noire et la mer Adriatique. Les principaux cours d'eau au Kosovo sont: i Drini Bardhë (122 km de long) dans la région de Peja, Sitnica (90 km), Bistrica e Pejës (62 km), Morava e Binçës (60 km), dans la région de Gjilan, Lepenci (53 km), près de Ferizaj et Kaçanik, Ereniku (51 km), près de Gjakova, Ibri (942 km), près de Mitrovica et Bistrica e Prizrenit (31km), près de Prizren. La principale centrale électrique du Kosovo est alimentée par le charbon, source importante de pollution de l'environnement. (d'après Wikipédia)