Fil d'Ariane
Dès la porte d’entrée de cette immense bâtisse du parc des expositions de la porte de Versailles, dans le sud-ouest de Paris, l’on est accueilli par la musique et les danses polynésiennes. En ce jour d’ouverture de sa quatrième édition, il y a foule au salon de la gastronomie des Outre-mer et de la Francophonie. Particuliers et professionnels slaloment joyeusement dans des allées aux noms évocateurs : avenues cannelle, pavot, safran, piment ou vanille.
Et pour cause : les épices sont le thème choisi cette année par la célèbre chef Babette de Rozières, présidente et fondatrice de ce salon. Un parcours sensoriel est d’ailleurs proposé au public. Une ballade pour l’éveil des sens, qui permet de (re)découvrir les produits venus des Antilles françaises, de Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna, Saint-Pierre-et-Miquelon ou encore La Réunion.
Sur ce parcours aux effluves odorantes, l’on peut ainsi croiser Sylvie Sinimalé, gérante réunionnaise de Passion épices, une boutique ouverte il y a deux ans dans le cinquième arrondissement parisien, qui vend des produits venus directement de l’île de La Réunion. « Je travaille avec les petits producteurs locaux, nous précise-t-elle. Je commercialise essentiellement les épices, car comme vous savez, La Réunion est associée depuis le 18e siècle à la route des épices. Nous en avons énormément. J’ai par exemple là du poivre noir fabuleux. Il y aussi du piment et ce curcuma prestige ; et pourquoi prestige ? Tout simplement parce que le producteur travaille uniquement avec la racine – plante herbacée rhizomateuse, c’est de ses rhizomes réduits en poudre qu’est extrait le curcuma. »
Juste en face du stand de Sylvie Sinimalé, celui de l’un de ses compatriotes, qui propose une dégustation gratuite de plats réunionnais ; des petites coupelles qui permettent de découvrir cette cuisine épicée et goûteuse. Venu de la région parisienne ce matin pour redécouvrir des saveurs parfois oubliées, Ademar, chauffeur d’autobus guadeloupéen d’une cinquantaine d’années, se laisse tenter par du riz à la sauce tomate, agrémentée de piment rouge.
La vanille de Tahiti est très peu connue en métropole.
Sandrine Etterlen
Quelques allées plus loin, c’est à la découverte d’une autre épice que l’on est invité : la vanille de Tahiti. Ici, c’est Sandrine Etterlen, une jeune bretonne, passionnée par cet or noir de Polynésie, qui se propose de faire voyager nos papilles. « C’est vrai que la vanille de Tahiti est très peu connue en métropole, glisse-t-elle, avec un large sourire. Et pourtant, la vanille de Taha’a est exceptionnelle. D’ailleurs, cette île, qui fait partie des îles Sous-le-Vent, en Polynésie française, s’appelle aussi l’île Vanille. C’est là où il y a le plus de producteurs de vanille. Je les ai rencontrés au cours d’un voyage sur place. Depuis, ils sont devenus des amis. Et comme le grand public ne connait pas du tout leur vanille, j’ai décidé de la promouvoir. » Très prisée par les grands chefs de cuisine, la vanille de Tahiti a des arômes puissants et de grandes qualités gustatives.
Attiré par les rythmes très entraînants d’une belle biguine, jouée par un orchestre qui occupe l’une des deux scènes qui encadrent le carré d’exposition, nous nous retrouvons avenue moutarde, juste à côté du stand du Guadeloupéen Fabrice Calabre, président du groupe Cochon Plus, dont le siège est aux Abymes, en Guadeloupe. Il propose son jambon à la dégustation, accompagné d’un excellent melon. Un vrai régal.
Charcutier, traiteur et restaurateur, Fabrice Calabre élève lui-même ses cochons, qu’il transforme notamment sous forme de jambon. Un produit qui est fait à partir d’essences du pays comme le bois d’Inde - un petit arbre dont les feuilles, utilisées ici, dégagent une forte odeur de girofle, d’anis ou encore de poivre. Les décoctions de bois d’Inde, auxquelles on ajoute le piment végétarien, servent de base à la saumure du jambon de Fabrice Calabre. Dernière spécificité, le fumage à la canne à sucre.
Nous bouclons notre ballade gastronomique avenue Ras Al Hanout, devant le stand en forme de bar la Louisiane, invitée d’honneur du salon. Ici, un couple est à la barre : le Français et Cajun d’adoption Phil Van Roy, et surtout, Sarah Savoy, « la voix des Cajuns ». Chanteuse et accordéoniste, Sarah est accompagnée de ses amis musiciens, qui jouent des rythmes typiquement cajuns. Avec un large sourire, cette jeune quadragénaire avoue qu’elle est à la fois, épouse, mère, artiste-musicienne, barmaid, restauratrice…
D’ailleurs, avant de m’accorder quelques minutes d’interview, elle aidait à la préparation des repas de midi, tout en servant des cocktails aux clients, nombreux, sensibles aux sons et aux odeurs qui se dégagent de la cuisine. Sarah Savoy et son mari sont très heureux d’être là. Un honneur que leur fait Babette de Rosières, qui leur en avait fait la promesse en août dernier, lors d’une de ses visites en Louisiane.