Ce qui pourrait faire sortir la "gauche pacifiste" de sa réserve semble être malheureusement une intensification du conflit, une escalade militaire menant à encore plus de morts civiles : paradoxe inquiétant de l'attentisme des pacifistes qui semble être pourtant la règle depuis le départ de l'opération "Pilier de défense". Peut-être parce que la situation est différente de celle de 2008-2009, bien plus inquiétante pour Israël, mais aussi par le soutien que le gouvernement compte parmi la population israélienne qui désire avant tout être protégée des tirs du Hamas dirigés vers le sud d'Israël ?
Sur la page Facebook de Jcall (European Jewish Call for Reason, groupe de pression juif européen pacifiste), les commentaires vont bon train, et l'on sent, malgré la lettre ouverte adressée dimanche à Benyamin Netanyahu de dizaines d'intellectuels et d'artistes appelant à un cessez-le-feu pour parvenir à un accord de paix, que la situation actuelle de Gaza fait douter les membres les plus engagés dans un processus pacifique. La propagande tant du côté de "Tsahal" (l'armée israélienne qui diffuse par exemple des messages vidéos rassurants d'une guerre éthique) que du Hamas, n'aide en rien à créer un consensus pacifiste…au sein même du mouvement pacifiste.
Les images atroces d'enfants gazaouis victimes des bombardements israéliens alors qu'ils sont en réalité syriens ne peuvent que semer le doute dans les esprits, empêcher d'imaginer un accord avec le Hamas, organisation réputée pour l'instrumentalisation de la population de la bande de Gaza. Pour Michel Warchawski, journaliste et militant pacifiste israélien, la cause pacifiste est de toute manière réduite à sa plus simple expression depuis plus de 10 ans : "Le mouvement pacifiste large qui pouvait créer des manifestations de centaines de milliers de personnes est terminé depuis août 2000. Le discours mystificateur d'Ehud Barak (alors premier ministre travailliste d'Israël), juste avant la deuxième intifada, a tué le mouvement pacifiste qui a dit, "on s'est trompés, la droite a eu raison". Pour le militant, si il a y encore une gauche pacifiste en Israël, "elle est très réduite, et les manifestants indignés contre la politique de Netanyahu ont toujours bien souligné qu'ils étaient un mouvement social et pas politique". 84% de la population d'Israël soutient l'opération militaire "Pilier de défense", et il faudrait, dit Michel Warchawski, "que le prix à payer pour Israël, c'est triste à dire, soit plus fort. Là, il y aurait peut-être une réaction de la gauche pacifiste. Mais je n'y crois pas, et elle serait de toute manière de faible ampleur…".