La Palestine à l'ONU, un symbole fort

La Palestine est devenue jeudi un Etat observateur aux Nations unies, lors d'un vote historique à l'Assemblée générale de l'ONU qualifié par le président palestinien Mahmoud Abbas d'"acte de naissance" et accueilli par une explosion de joie à Ramallah.
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La Palestine à l'ONU, un symbole fort
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Jour de liesse en Palestine

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30.11.2012André Viollaz - AFP
La Palestine à l'ONU, un symbole fort
Le président Mahmoud Abbas et la délégation palestinienne applaudissent le vote de l'Assemblée générale de l'ONU faisant de la Palestine un Etat observateur, le 29 novembre 2012 à New York (Photo AFP-Stan Honda)
La Palestine est devenue jeudi un Etat observateur aux Nations unies, lors d'un vote historique à l'Assemblée générale de l'ONU qualifié par le président palestinien Mahmoud Abbas d'"acte de naissance" et accueilli par une explosion de joie à Ramallah. Le vote de cette résolution, qui fait de "l'entité" palestinienne un "Etat observateur non membre" de l'ONU, a été acquis à une majorité confortable mais pas écrasante de 138 voix pour, 9 contre dont les Etats-Unis et Israël et 41 abstentions parmi les 193 pays membres. Cette nouvelle stature internationale donne aux Palestiniens accès à des agences de l'ONU et à des traités internationaux et constitue une victoire diplomatique majeure. Mais elle expose l'Autorité palestinienne à des représailles financières américaines et israéliennes. A Ramallah (Cisjordanie), siège de l'Autorité palestinienne, plusieurs milliers de Palestiniens ont accueilli ce vote par des acclamations, des tirs en l'air et des scènes de liesse populaire, a constaté l'AFP. Dans l'hémicycle même de l'Assemblée générale à New York, les délégués palestiniens se sont congratulés et ont brandi brièvement un drapeau palestinien.
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Le président palestinien, Mahmoud Abbas, devant l'Assemblée générale de l'ONU, le 29 novembre 2012 (Photo AFP-Stan Honda)
Mahmoud Abbas, très applaudi à son arrivée à la tribune, a estimé qu'il s'agissait de la "dernière chance de sauver la solution à deux Etats" (Israël et un Etat palestinien). Il a promis de "tenter de ranimer les négociations" de paix avec Israël, au point mort depuis plus de deux ans, sans toutefois prendre d'engagements précis. "Le temps presse, la patience s'épuise et l'espoir s'amenuise", a-t-il averti. Evoquant les "droits nationaux inaliénables" des Palestiniens, il a affirmé que ceux-ci "n'accepteront rien de moins qu'un Etat de Palestine indépendant avec Jerusalem-est comme capitale, sur tout le territoire palestinien occupé en 1967, vivant en paix et en sécurité aux cotés de l'Etat d'Israël". Il a fait plusieurs références à "l'agression israélienne" à Gaza, une semaine après un cessez-le-feu entre le Hamas qui contrôle ce territoire et Israël. Lors d'une réception à l'issue du vote, M. Abbas a qualifié la journée d'"historique", tout ne prévenant que "la route était longue et difficile" jusque l'indépendance. Le mouvement islamiste palestinien Hamas s'est lui aussi félicité de cette "nouvelle victoire sur le chemin de la libération de la Palestine". "Le Hamas la considère comme un succès unitaire qui suscite la joie au sein de notre peuple", a déclaré à l'AFP Ahmed Youssef, un dirigeant du mouvement dans la bande de Gaza. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a pour sa part dénoncé un discours "diffamatoire et venimeux". Selon lui, "la décision de l'ONU ne changera rien sur le terrain. Il n'y aura pas d'Etat palestinien sans arrangements garantissant la sécurité des citoyens d'Israël". "En présentant leur demande à l'ONU, les Palestiniens ont violé leurs accords avec Israël, et Israël agira en conséquence", a-t-il dit.

Menaces de sanction

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L'ambassadeur israélien à l'ONU, Ron Prosor, le 29 novembre 2012 devant l'Assemblée générale à New York (Photo AFP-Henny Ray Abrams)
Parmi les mesures de rétorsion possibles, Israël pourrait bloquer les taxes qu'il perçoit pour le compte de l'Autorité palestinienne ou réduire le nombre de permis de travail pour les Palestiniens. Le Congrès américain pourrait de son côté refuser de verser 200 millions de dollars d'aide promis aux Palestiniens. En compensation, la Ligue arabe a promis aux Palestiniens un "filet de sécurité" de 100 millions de dollars par mois. Israéliens et Américains, qui ont voté contre la résolution, s'inquiètent de la possibilité qu'elle donnerait aux Palestiniens de poursuivre Israël devant la Cour pénale internationale, qui ne traite qu'avec les Etats. Des responsables palestiniens ont évoqué cette hypothèse mais M. Abbas n'y a pas fait allusion. Il a promis dans son discours "d'agir de manière responsable et positive dans les prochaines étapes". Cette résolution "met davantage d'obstacles sur le chemin de la paix", a estimé Hillary Clinton, la chef de la diplomatie américaine. Elle a réaffirmé que la création d'un Etat palestinien ne pouvait résulter que de négociations directes avec Israël. Le vote a coïncidé avec l'anniversaire de l'adoption par l'ONU en 1947 du plan de partage de la Palestine mandataire, qui prévoyait un Etat juif et un Etat arabe. Devant un Comité de l'ONU qui commémorait cet anniversaire, le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon a demandé solennellement jeudi aux dirigeants palestiniens et israéliens de "ranimer le processus de paix" en reprenant des "négociations directes". La résolution appelle à une reprise de ces négociations et évoque l'objectif d'un Etat de Palestine coexistant "aux côtés d'Israël en paix et en sécurité, sur la base des frontières d'avant 1967". Elle "exprime l'espoir que le Conseil de sécurité considèrera de manière favorable" la candidature de la Palestine comme Etat membre à part entière, déposée en septembre 2011 par M. Abbas mais torpillée par une menace de veto américain. Outre les Etats-Unis et Israël, sept autres pays ont voté contre (Canada, République tchèque, Iles Marshall, Micronésie, Nauru, Palau, Panama). Les Européens ont voté en ordre dispersé: France, Italie, Espagne, Suède notamment se sont prononcés en faveur, de même que la Turquie et la Suisse. Mais le Royaume uni et l'Allemagne se sont abstenus. La Russie et la Chine ont voté pour. Selon des diplomates, plusieurs pays européens considéraient que le moment était mal choisi, entre la réelection de Barack Obama et des élections législatives prévues en Israël. Le président français François Hollande a appelé jeudi soir à la reprise des négociations entre Palestiniens et Israéliens "sans conditions et le plus rapidement possible".