Les images pédopornographiques diffusées sur Internet ne cessent de proliférer. Il y a 10 ans, moins d’un million de contenus circulaient. Aujourd'hui, on en dénombre 45 millions rien qu'aux États-Unis. Un phénomène incontrôlé et incontrôlable ? C'est ce que révèle une récente enquête du New York Times.
L'ampleur du phénomène est sans précédent.
Une enquête du New York Times, publiée cette semaine, révèle que le nombre de contenus pédopornographiques signalés sur Internet n'a jamais été aussi important aux Etats-Unis.
Leur diffusion n'a cessé de croître depuis 10 ans, jusqu'à exploser cette année. De 18,4 millions en 2017 à 45 millions d'images en 2018. Le nombre d'images et de vidéos d'enfants abusés sexuellement, voire torturés, a été multiplié par plus de deux l'an dernier.
Leur publication échappe au contrôle des autorités américaines et des géants d'Internet qui semblent déployer peu d'efforts pour les contrer à l'instar des discours de haine et de la propagande terroriste.
Les organismes chargés de l'application de la loi dévoués à ce problème sont en sous-effectif et dépourvus de fonds, alors que, proportionnellement, le nombre de cas ne cesse de croître.
Selon le
New York Times, le Département de la Justice, auquel le Congrès a confié la gestion de ce phénomène, aurait été négligeant. Il n’a, par exemple, produit que deux des six rapports obligatoires destinés à compiler des données sur les crimes contre les enfants commis sur Internet et à fixer des objectifs permettant de les éliminer.
La première personne nommée pour s’occuper de cette activité, Francey Hakes, a déclaré qu'il était clair dès le départ que personne "
n'avait l'impression que ce poste était aussi important que ce qui avait été écrit par le Congrès". Le gouvernement fédéral n’a pas non plus respecté les objectifs de financement fixés par la loi.
Le
New York Times ajoute que le département de la Sécurité intérieure des États-Unis a consacré, cette année, près de 6 millions de dollars du budget de ses unités de cybercriminalité à la lutte contre la fraude en matière d'immigration, épuisant ainsi 40% du budget dans ce simple secteur.
Les systèmes de sécurité contournés
Même si la pédopornographie n’est pas récente, son expansion est liée à l’explosion du numérique. La multiplication des supports permettant les visionnages et le stockage de ce type de contenus n’a cessé de faciliter le développement du phénomène.
Ces contenus sont d’ailleurs parfois visibles ou transmissibles via des plateformes telles que Facebook Messenger, le moteur de recherche Bing de Microsoft et le service de stockage Dropbox.
Légalement, les plateformes et géants d’internet sont contraints de faire des signalements lorsqu’ils identifient de tels contenus. Néanmoins, ils ne sont pas tenus de traquer, ni les contenus, ni les diffuseurs. Et de leur côté, les enquêteurs sont dépassés sur le plan technique, mais aussi financier.
Une réalité problématique pour les entreprises qui gèrent ces logiciels, car même si elles tentent d’établir une forme de contrôle sur ces contenus, les hackers ont accès à des moyens informatiques sophistiqués qui leur permettent de contourner les systèmes de sécurité mis en place.
En dehors de ces outils "officiels" grand public, il existe en effet ce que l’on appelle le "dark web" ou "deep web", cette partie d'Internet difficilement accessible pour les non-initiés, qui facilite toute transaction ou diffusion de ces contenus pédopornographiques (mais pas que, la vente et l’achat d’armes, de drogues, d’organes est aussi possible sur cette face cachée d’Internet) et rend le travail de repérage des autorités encore plus complexe.
Pédopornographie sur Skype
Internet a clairement changé les pratiques pédophiles. Auparavant, les touristes pédophiles se déplaçaient jusqu'en Asie du Sud-Est ou encore au Maroc. Aujourd'hui, ils sont de plus en plus nombreux à rester derrière leur ordinateur. Des pédophiles se servent de logiciels de "live-stream" tels que Skype, pour regarder en direct des enfants abusés sexuellement à des kilomètres.
Lors d'un séminaire sur la question, organisé par la France, à Singapour, en juin 2019, les représentants de Skype n’étaient pas là, quand Facebook était présent. Une absence regrettée par les organisateurs, tant la plateforme est devenue l'un des principaux moyens de diffusion de ces contenus.
En France, ce phénomène inquiète les autorités qui travaillent, à coup de séminaires, sur l’exploitation sexuelle des mineurs, en relation avec leurs homologues d’autres pays. Une coopération entre les forces de police de différents pays, qui se révèle indispensable dans la lutte contre la diffusion de ces contenus.