« Je peux dire que je suis tiré d’affaire! », s’exclame Auf. Trémolos dans la voix, le jeune homme n’en revient toujours pas d’avoir échappé aux chasseurs d’homosexuels dans son pays. Usaam Mukwaya Auf assiste ce soir à la projection
d’Uganda : the homophobic crusade (
Ouganda : la croisade homophobe. Voir extrait ci-dessous), un documentaire sur la situation difficile des homosexuels en Ouganda, dont il est le personnage principal. Auf a quitté l’Ouganda il y a 5 mois grâce à une demande d’asile déposée à l’ambassade de France à Kampala en 2009. Il a acquis, depuis, le statut de réfugié politique, mais reste très inquiet pour ses copains homosexuels comme lui, restés au pays. Tout commence en juillet 2008, lorsque Auf est arrêté et emprisonné en Ouganda avec d’autres militants des droits de la communauté LGBT (ndlr : lesbiennes, gays bisexuels et transgenres). Les activistes homosexuels manifestaient contre l’inertie du gouvernement ougandais face à l’accroissement de la contagion par le virus du sida dans la communauté gay. C’est le début d’une descente aux enfers. Photos et portraits des activistes homos sont fréquemment publiés dans les tabloïds ougandais. Déjà peu tolérés, les homosexuels sont dorénavant pourchassés. Auf perd son emploi de boulanger et son logement. Sa famille rompt les liens avec ce fils devenu « infréquentable » et désormais au bord de la dépression nerveuse. Le 14 octobre 2009, le gouvernement soumet au Parlement,
l’Anti-Homosexuality Bill, un projet de loi qui prévoit un emprisonnement à vie pour les homosexuels ou même la peine de mort. Une peine de trois ans de prison est également requise « pour ceux qui ne dénonceraient pas dans les 24 heures à la police, les homosexuels connus dans leur entourage. » La délation est encouragée. Mais le Parlement a repoussé le vote de l
’Anti-Homosexuality Bill, grâce au tollé international suscité par ce projet de loi jugé « liberticide » par les organisations de défense des droits humains,
Amnesty International en tête. Les États-Unis et le Royaume–Uni, principaux donateurs de l’Ouganda, s'y sont également opposés.