Edson Arantes do Nascimento, dit Pelé, s'est éteint ce 29 décembre, à l'âge de 82 ans, emporté par une longue maladie. De par son génie et ses statistiques invraisemblables, celui qui était surnommé le « Roi » figure au Panthéon des joueurs ayant marqué l'histoire de son sport. Il aura tout au long de sa vie bénéficié d'une immense popularité au Brésil, son pays natal, et dans le monde du football.
«
Ramenez ce trophée à la maison ! » Le 24 novembre 2022, quelques heures avant l’entrée en lice de l’équipe nationale brésilienne de football en Coupe du monde au Qatar, face à la Serbie, Pelé, tout comme «
200 millions de cœurs battant à l’unisson » est derrière les siens. Après deux décennies de disette, l’idole en son pays se dit «
sûr que nous aurons une fin heureuse. » Le Brésil ne gagnera pas la Coupe du monde 2022.
La
Seleção, quintuple vainqueure de la compétition, record mondial, reste toujours orpheline du titre depuis 2002. Loin des années glorieuses de l'ère du « Roi », grand artisan du palmarès brésilien sur la scène internationale.
Précocité et statistiques affolantes
Le légendaire numéro 10 auriverde, que d’aucuns considèrent comme le meilleur joueur de tous les temps, a construit sa légende dans son Brésil natal. À l’époque, Edson Arantes do Nascimento, de son nom complet, fils d’un modeste joueur professionnel, roule sur tout le monde.
À Santos, son club brésilien, l'un des plus connus de la planète à l'époque, où il évolue 18 saisons, il affiche une précocité et des statistiques hors norme. En témoigne, exemples parmi tant d’autres, ses 58 buts inscrits en 38 rencontres de championnat de l'État São Paulo en 1958 ou encore les 49 plantés en 27 matchs en 1965.
Au total, bien que les décomptes varient, il inscrit la bagatelle de
767 buts en 831 matchs officiels. La Fédération internationale de football (Fifa), qui enregistre aussi les joutes amicales, compte, de son côté, 1.281 buts pour 1.363 rencontres.
Né le 23 octobre 1940 à Très Coraçoes («
Trois Cœurs » en français), le jeune Pelé fait ses débuts à Santos, à l’âge de 15 ans. En 1956, il enfile pour la première fois la tunique avec les professionnels face aux Corinthians et à 16 ans, il fait ses premiers pas en sélection.
Le prince de la Coupe du monde
Il enlève sa première Coupe du monde à 17 ans, en Suède, lors du Mondial 58, durant lequel il inscrit six buts dont deux lors de la finale contre le pays hôte (5-2). Il reste toujours le plus jeune joueur de l’Histoire à avoir remporter le trophée et le seul et unique footballeur à avoir soulevé trois fois la Coupe du monde en 1958, 1962 et 1970.
Au cours de l’exercice 62, l’esthète se blesse toutefois dès le deuxième match de phase de poules, victime d’un tacle assassin d’un défenseur tchécoslovaque. En 1966,
bis repetita après une grosse faute du Portugais Joao Morais. Touché au genou, il déclare forfait pour le reste du tournoi, le seul qu'il ne remportera pas.
De par ses qualités physiques exceptionnelles, sa vitesse, sa robustesse, sa détente verticale digne d'un Cristiano Ronaldo, sa virtuosité balle au pied, Pelé a marqué son époque mais aussi les suivantes, et surpassé les autres grands noms de son temps.
Sa carrière est jalonnée de records et de titres en pagaille. En club comme en sélection, le joueur rafle tout. Copa America avec sa sélection, Copa Libertadores, coupes du Brésil, championnats et coupes de São Paulo avec son club, son palmarès est impressionnant.
Des actions légendaires
Dribbles innovants et chaloupés, percées dévastatrices, chevauchée en solitaire ponctuée d'un but... Le monstre sacré de la discipline assure par ailleurs le spectacle et se fend d’une ribambelle d’actions iconiques.
A l’instar de ce grand pont sans ballon face au portier de l’Uruguay en demi-finale du Mondial 1970, situation qu’il ne concrétise pas mais qui reste gravée dans les mémoires. Ou de ce but en finale, quand il effectue un coup du sombrero au-dessus d’un défenseur scandinave avant de marquer d’une volée.
Au pied du mythique stade Maracaña de Rio de Janeiro, une plaque immortalise le souvenir du plus beau but inscrit dans son enceinte. L’œuvre de Pelé évidemment. En 1961, à l’occasion d’un tournoi réunissant les meilleures formations de l'État de São Paulo, O Rey, parti de son propre camp, concrétise une chevauchée lors de laquelle il élimine sept joueurs de Fluminense. Ovation de tout un stade et des supporters adverses.
« Le transfert du siècle » à New York
Durant l'essentiel de sa carrière, son club, Santos, refuse toutes les offres venues des grands clubs européens, comme le Real Madrid ou le Milan AC, qui veulent s'attacher les services du génie.
En 1971, un an après son dernier sacre mondial, il prend sa retraite internationale, malgré les supplications des supporters. Fort de ses dix titres de champion de l’État de São avec son club, il raccroche une première fois les crampons en 1974.
Mais le Cosmos de New York, qui travaille depuis plusieurs années sur ce que nombreux considèrent comme «
le transfert du siècle », le convainc de reprendre du service pour développer le football aux États-Unis. Les mouvements du « Roi » intéressent jusqu’au plus haut niveau. Le président du Brésil de l’époque en personne, Ernesto Geisel, lui intime de rester au pays pour «
le bien de son peuple. »
En juin 1975,
O Rey signe finalement un contrat de trois ans accompagné d’un pont d’or. Il décroche aux États-Unis le dernier titre de sa carrière à 37 ans, celui de champion de la ligue nord-américaine (NASL) en 1977.
Aura éternelle
En guise de jubilé, il organise une rencontre entre le Cosmos et son club de cœur, Santos, le 1
er octobre de la même année. Un événement suivi par quelque 700 millions de télespectateurs.
Après sa retraite sportive, le monstre sacré est sollicité tous azimuts. En 1994, il devient ainsi, entre autres, ministre des Sports de son pays durant quatre années. Il est également nommé ambassadeur auprès de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco), pour laquelle il récolte des fonds pour les enfants défavorisés. Sa renommée et son charisme demeurent intacts, sa voix est largement écoutée.
Parmi les plus grandes légendes de ce sport, il est désigné «
joueur du siècle » par la Fifa en 2000 et se voit décerné un Ballon d'Or d'honneur en 2013. 45 ans après son retrait, son aura est éternelle. Et le football n'en finira jamais d'aduler son « Roi ».