L'économie américaine au bord du gouffre

L'économie américaine risque de plonger dans une grave récession entrainant avec elle l'Europe et l'Asie si aucun accord n'est trouvé d'ici le 1er janvier 2013 entre démocrates et républicains en terme de fiscalité et de réduction budgétaire. C'est ce qu'on appelle "le fiscal cliff". La "falaise budgétaire" du haut de laquelle la première puissance mondiale pourrait s'effondrer. 
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L'économie américaine au bord du gouffre
“J'ai besoin d'un peu d'air mais je n'ai pas de parachute“ - caricature de Dave Granlund.
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Alimentant peur et incompréhension, le fameux "fiscal cliff" a envahi le débat américain au point qu'il a été nommé mot de l'année 2012 par le célèbre dictionnaire anglais Collins. En français, les traductions sont des plus variées : "falaise", "mur", "précipice", "budgétaire" ou "fiscal", ou encore "Grand Canyon budgétaire" voire "Himalaya fiscal". Concrètement, cette expression imagée désigne l'effondrement de l'économie américaine si aucun accord en matière budgétaire et fiscale n'est trouvé d'ici à la fin de l'année entre le président démocrate Obama et les républicains, majoritaires à la Chambre des Représentants.  1 Pourquoi une telle crainte ? Comment un tel scénario catastrophe peut-il survenir alors que la reprise est en train de s'installer (bon an mal an) dans le pays ? - Parce que, d'une part, au 1er janvier 2013, les multiples allègements fiscaux qui ont été pris depuis 10 ans pour soutenir la croissance du pays doivent s'arrêter net. Notamment, les colossales baisses d'impôts accordées par l'ancien président républicain Georges W. Bush aux contribuables les plus aisés. - D'autre part, parce que des réductions budgétaires drastiques, tant au niveau de la défense que de la santé, doivent entrer en vigueur dans le courant de l'année prochaine pour abaisser le niveau d'endettement des Etats-Unis. Une obligation d'assainissement des dépenses publiques qui avait été actée en août 2011 dans le cadre du "Budget Control Act".  2 Les conséquences ? Résultat, si rien n'est fait, 90% des ménages se retrouveront frappés par une sévère hausse d’impôts, de l’ordre de 3 500 dollars pour un revenu moyen, pour la seule année 2012-2013. La consommation sera brutalement freinée faisant plonger l'économie américaine dans la récession. Le Congressional Budget Office a estimé que la croissance chuterait de 2,3 % en 2012 à -0,3 % en 2013, avec une flambée du chômage et une hausse des prestations sociales. Au niveau mondial, cette crise américaine aurait nécessairement des répercussions. Une baisse de la consommation au sein de la première puissance économique mondiale entraînerait une forte chute des importations. De quoi inquiéter l’Europe et la Chine, principaux exportateurs vers les États-Unis.
Le "fiscal cliff" vu par M. Burns des Simpson, le chef local des républicains (propriétaire de la centrale nucléaire de la ville) :"Imaginez que l’économie est une voiture, et que c’est l’homme riche qui la conduit. Si vous ne donnez pas de l’argent au conducteur, il vous fera plonger en bas de la falaise. C’est du bon sens !"
 3 Comment trouver un accord ? Mais, avant qu'elle n'explose, la bombe catastrophe peut être désamorcée, et ce de différentes manières. D'où le débat qui a fait rage ces derniers mois aux Etats-Unis. Barack Obama et le camp démocrate souhaitent maintenir une partie des exemptions fiscales, mais seulement sur les classes moyennes et les plus pauvres. Ils veulent aussi conserver les budgets sociaux les plus nécessaires. En revanche, ils veulent taxer les ménages les plus riches et les revenus du capital, aujourd’hui impfosés à 15% contre 30% pour les revenus du travail. Pour leur part, les républicains s'opposent à toute hausse fiscale. Le seul levier possible à leurs yeux : une réduction générale des dépenses publiques, sauf pour l'armée. Bref, chacun défend sa traditionnelle doxa. Le compromis s'avère difficile, voire impossible. Dans "le grand marchandage", John Boehner, le chef des républicains à la Chambre des Représentants, a tout de même fini par proposer un plan alternatif en acceptant une hausse fiscale uniquement pour les revenus dépassant le million de dollars, ce qui concernerait 0,3% des Américains. Pour la base républicaine, cette concession était déjà trop importante. John Boehner a été mis en minorité. Il a alors renoncé à négocier avec la Maison Blanche à partir de cette proposition. Quelques jours avant Noël, le 21 décembre, c'est Barack Obama qui, à son tour, a fait un pas vers le camp adverse : voter avant dix jours la prolongation des exonérations fiscales pour 98 % des Américains et l'extension des indemnités exceptionnelles pour les chômeurs en fin de droit. Les républicains, fortement divisés, n’ont pas encore donné leur réponse. Après s'être envolé avec sa famille à Hawaï son archipel natal où il passe traditionnellement les fêtes de fin d'année, Barack Obama a décidé d'écourter ses vacances pour reprendre les discussions à Washington. Selon certains observateurs, dans ce rapport de force, le président serait le mieux placé pour faire passer sa politique. Si aucun accord n'est conclu, les impôts augmenteront pour tout le monde. Barack Obama pourra alors demander à ce qu'un allégement fiscal soit voté pour une large majorité des Américains (mais pas pour les plus riches). Une mesure que les républicains ne pourront pas rejeter. Mais cette manœuvre ne résoudrait en rien la crise politique et institutionnelle que traverse depuis plusieurs années les Etats-Unis, et ne contribuerait pas à rassurer les marchés. Un accord clair serait plus sain tant pour l'économie que la démocratie américaine.
27.12.2012Reportage de Radio Canada
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Vu par les dessinateurs de presse

Le phénomène du "fiscal cliff" est devenu un thème fétiche pour les dessinateurs de presse qu'ils penchent du côté démocrate ou républicain. Cliquez sur les dessins pour les agrandir.
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"Plus loin", crie Obama. Sur la pancarte en bois : "Dette nationale".
"Ne vous inquiétez pas. Quatre ans de lemmings vont atténuer votre chute". Sur la banderole: "Nous, les moutons"
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"Vous avez joint les bureaux du Congrès. Veuillez-nous excuser, nous ne pourrons pas répondre à votre appel cette fois-ci".
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Sur la banderole : "Fin". Sur la pancarte : "Les 4 prochaines années".