Un mois après son entrée à l'Elysée, Emmanuel Macron parait en position de force pour s'assurer une majorité sans partage après un premier tour des législatives où son parti a facilement battu ses adversaires. Un premier tour marqué par une abstention record, 51% du jamais vu sour la Vème République.
Selon les résultats définitifs, en voix, le mouvement présidentiel, la République en marche (REM) arrive nettement en tête (32,3%), devant LR-UDI (21,5%) et le FN (13,2%). Le PS et son allié PRG obtiennent 9,5% et sont légèrement devancés en voix par La France insoumise (11%) de Jean-Luc Mélenchon.
"Macron en marche vers une majorité écrasante" (Le Figaro),
"Macron plie le match" (L'Opinion),
"Un coup de maître" (Le Parisien),
"L'OPA" (Libération). Les titres des quotidiens nationaux lundi 12 juillet ne laissent aucun doute sur la couleur de la future
"chambre bleu Macron" (L'Humanité).
Abstention historique
La presse et l'ensemble des commentateurs insistent aussi sur le taux d'abstention qui a atteint le niveau record de 51,29%, du jamais vu aux législatives sous la Ve République.
"Moins d'un électeur sur deux s'est déplacé aux urnes. Alors qu'on nous explique que nous sommes dans une nouvelle page de la vie politique française, il n'y a aucune appétence", a estimé le socialiste Luc Carvounas, tandis que Brice Hortefeux (Les Républicains) fait valoir que
"pour le parti d'Emmanuel Macron, il y a un électeur sur sept seulement qui lui apporte son suffrage".
"Notre électorat manifestement, lui, s'est déplacé", a rétorqué le porte-parole de la REM Benjamin Griveaux, tandis que son homologue du gouvernement Christophe Castaner a vu dans cette abstention
"l'échec" de cette élection. Et les représentants de la future majorité présidentielle de rappeler l'engagement du chef de l'Etat d'introduire une dose de proportionnelle au Palais-Bourbon.
Recul sans précédent de la gauche
Selon les projections par sièges, REM et son allié du MoDem raviraient dimanche prochain entre 400 et 455 des 577 sièges, très largement au-dessus de la majorité absolue (289 élus).
De quoi aviver les craintes d'une chambre monolithique. Mais "
la caporalisation n'est pas l'état d'esprit d'En Marche", a assuré M. Griveaux. Après seulement un an d'existence, la REM a réussi à dynamiter les partis traditionnels de gauche et de droite.
Le Parti socialiste, qui contrôlait la moitié de l'Assemblée sortante, s'effondrerait avec ses alliés autour de 15 à 40 sièges, soit encore moins que les 57 de la débâcle de 1993. La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon obtiendrait 10 à 23 fauteuils, PCF inclus.
"Tous ensemble, nous pouvons avoir une centaine de députés de gauche", a jugé M. Carvounas.
Il s'agit néanmoins d'un
"recul sans précédent de la gauche", a reconnu le premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis, éliminé dans sa circonscription parisienne comme les anciens ministres Mathias Fekl, Pascale Boistard, Aurélie Filippetti, François Lamy, Kader Arif, Christian Eckert...
Le candidat du PS à la présidentielle, Benoît Hamon, a également été éliminé dès le 1er tour, tout comme les ex-ministres écologistes Cécile Duflot et Emmanuelle Cosse. D'autres sont en ballottage très défavorable, comme Najat Vallaud-Belkacem. Protégés par le camp Macron, Stéphane Le Foll, Marisol Touraine et l'ex-Premier ministre Manuel Valls sont en revanche en ballottage favorable.
Une droite en recul
La droite, qui espérait priver le nouveau président Macron de majorité, terminerait avec 70 à 130 élus LR et UDI. Dont une partie devrait soutenir la majorité présidentielle.
"Je suis pour la présomption de confiance". "Qu'on se donne 18 mois" et
"on verra ce que ça donne", a prôné l'ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, tandis que Jean-François Copé redoute "un pouvoir sans limites" d'Emmanuel Macron.
Quant au Front national, il obtiendrait seulement 1 à 10 sièges, contre 2 lors de la précédente législature. Avec un score de 13,2% très éloigné de celui de Marine Le Pen au premier tour de la présidentielle (21,3%).
"Nous pouvons avoir beaucoup plus de députés que ce qui a été annoncé", a cependant assuré son vice-président Florian Philippot. A commencer par Mme Le Pen, en tête avec 46% des voix dans le Pas-de-Calais.
Quatre députés seulement (dont deux pro-Macron) ont été élus au premier tour, contre 36 en 2012. Effet de la faible participation, il n'y aura qu'une seule triangulaire le 18 juin, dans la 1ère circonscription de l'Aube, contre 34 il y a cinq ans.
Cinq des six ministres candidats sont largement en tête dans leur circonscription, seule Annick Girardin étant en difficulté.
Retrouvez ici l'analyse de Bruno Cautrès, chercheur au
CEVIPOF.