Législatives en Allemagne : les forces en présence
Conçu pour donner voix au chapitre à toutes les sensibilités politiques, ou presque, le système électoral allemand oblige les grands gagnants des urnes à s'allier aux formations minoritaires pour gouverner. Ainsi le jeu des tractations entre partis sera-t-il prépondérant au lendemain de ces législatives 2013. Grands favoris, nouveaux-nés sur la scène politique ou partenaires de coalition aguerris, tour d'horizon des forces en présence.
Sozialdemokratische Partei Deutschlands, SPD (Parti Social-démocrate)
Trop à gauche pour séduire le centre
Crédité de 22 % des intentions de vote fin août, le SPD (social-démocrate) reste le deuxième parti politique allemand. Les sociaux-démocrates, s'ils améliorent leur score, ambitionnent de former le prochain gouvernement avec les Grünen. Jusqu'au débat télévisé du 1er septembre, Peer Steinbrück, le candidat du parti, avait du mal à convaincre avec un programme jugé trop "à gauche" (taxation des plus riches), notamment pour la frange centriste du SPD. Trois sociaux-démocrates ont occupé le poste de chancelier depuis la guerre : Willy Brandt de 1969 à 1974, Helmut Schmidt de 1974 à 1982 et Gerhard Schröder de 1998 à 2005.
Christlich Demokratische Union Deutschlands, CDU (Union chrétienne-démocrate)
N° 1 dans les sondages, mais pas dans les Länder
Menée par Angela Merkel, la CDU, alliée depuis sa fondation, en 1945, à la CSU bavaroise, continue à dominer la vie politique allemande. Principale formation de droite, elle est créditée de 41 % d'intentions de vote par les récents sondages. Ces deux dernières années, pourtant, la CDU a essuyé une série d'échecs aux élections régionales qui relativise ces résultats. Trois chanceliers de la CDU – Konrad Adenauer, Ludwig Erhard et Kurt Georg Kiesinger – se sont succédé entre 1949 et 1969. Puis le parti est revenu au pouvoir entre 1982 et 1998 avec Helmut Kohl, et depuis 2005 avec Angela Merkel.
Jürgen Trittin et Claudia Roth, candidats des Grünen
Alliés au SPD, Die Grünen, issus du mouvement pacifiste et écologiste en 1980, participent au gouvernement par intermittence depuis 1998, avec des personnalité comme Joshka Fischer. Touchés par l'émergence des Pirates et de la décision de Merkel de sortir du nucléaire, ils ne sont plus, aujourd'hui, crédités que de 10 % des intentions de vote. Reste que depuis la prestation réussie de Peer Steinbrück lors du débat du 1er septembre, les Grünen reprennent des couleurs à la perspective d'une coalition avec le SPD. Parmi les propositions des Grünen, la journée végétarienne dans les cantines a récemment créé la polémique.
Freie Demokratische Partei, FDP (Parti libéral-démocrate)
Sur la sellette
Rainer Brüderle, chef de file du FDP
Allié traditionnel des conservateurs, le FDP détient l'un des enjeux majeurs de ce 22 septembre. Après avoir frôlé les 15% en 2009, il ne recueille plus que 5 % des intentions de vote. Or s'il ne dépasse pas le seuil d'éligibilité au Bundestag, la CDU/CDU, à défaut d'autres alliés, devra se résoudre à une grande coalition avec le SPD pour gouverner. Représentés dans l'actuel gouvernement par Philipp Rössler, vice-chancelier et ministre de l'Economie, et par Guide Westerwelle, ministre des Affaires étrangères, le FDP n'a pas réussi à imposer les baisses d'impôt promises à sa base (professions libérales, PME) ; il a également souffert de l'émergence de l'AfD, le nouveau parti eurosceptique et des accusations de sexisme contre son chef de file Rainer Brüderle.
Die Linke (La Gauche)
Trop de divergences pour une alliance
Gregor Gysi et Sahra Wagenknecht, les chefs de file
Issu de l'ancien parti unique de RDA, rejoint par les communistes de l'ouest et les déçus du SPD, dont Oskar Lafontaine, Die Linke rallierait 10 % des suffrages aux législatives du 22 septembre. Infréquentable pour les conservateurs de la CDU, elle a pourtant peu de chance de figurer au nouveau gouvernement, sauf à s'allier au SPD. Mais "Est-ce que Die Linke est capable de former une coalition ?" s'interroge Peer Steinbrück. Le commentaire d'un responsable de Die Linke lui fait écho : "Il y a trop de différences de fond." Pour autant rien n'est figé, car on a déjà vu Die Linke s'allier aux Grünen lors d'élections régionales.
Piratenpartei Deutschland, Piraten (Parti des Pirates)
L'enfant prodige
Bernd Schlömer, chef de file des Pirates
Le PP est un mouvement citoyen qui se démarque par le profil atypique de ses élus, étudiants ou travailleurs. Créé en 2006, il a percé lors des législatives 2009 pour atteindre 12% des intentions de vote en 2012. Miné par le manque d’expérience et les conflits internes, il n’est plus, aujourd'hui, crédité que de 3 % des intentions de vote. Simple crise de croissance ? Cela reste à voir, d'autant plus que depuis les révélations d’Edward Snowden, les Pirates connaissent un regain de visibilité, car la protection des données est leur cheval de bataille.
Alternative für Deutschland, AfD (Alternative pour l’Allemagne)
Eurosceptique, mais pour l'Europe
Bernd Lucke, l'un des fondateurs de l'AfD
Lancé début 2013 par une poignée d'économistes, de journalistes et d'universitaires, ce parti se dit euro-sceptique, mais pour l'Europe, libéral et conservateur, démocratique et raisonnable. Bref, une alternative sérieuse aux autres partis politique, si bien que, à quelques semaines des législatives, il est crédité de 3 % des votes, au coude à coude avec les Pirates. Contrairement au Front national en France ou au Mouvement 5 étoiles en Italie, l'AfD cible un électorat contestataire, mais pas extrémiste. Il surfe sud le ras-le-bol des Allemands qui, principaux contributeurs aux plans de sauvetage, juge la politique étrangère de l'Allemagne trop laxiste.
Nationaldemokratische Partei Deutschlands, NPD (Parti national-démocrate)
La chute
Holger Apfel, chef de file du NPD
Avec 1,5 % des intentions de vote, le NPD reste négligeable sur le plan national, mais reste très présent dans les anciens Länder d'Allemagne de l'Est, où il est représenté au Parlement de Saxe et de Mecklembourg-Poméranie occidentale. En proie à des difficultés financières et administratives, soupçonné de soutenir les groupes néo-nazis et miné par des guerres fratricides, le NDP, à la veille de ces législatives, se trouve au bord de la faillite de l'interdiction.