Fil d'Ariane
Diffusé en direct sur internet dans plusieurs villes nord-américaines, ce débat est une initiative des organismes « Maudits français » et « French morning ». Comme il était impossible d’inviter 19 personnes à débattre, les organisateurs ont défini des critères précis afin d’en sélectionner certains : les candidats invités devaient représenter des partis ayant obtenu au moins 5% des votes lors du premier tour de la présidentielle ou avoir organisé au moins quatre événements distincts sur le continent.
Six candidats ont ainsi été retenus : Frédéric Lefebvre, député sortant du parti "Les Républicains" ; Roland Lescure du mouvement "La République en Marche" ; Yan Chantrel du "Parti socialiste" ; Clémentine Langlois représentante de "La France insoumise" ; Damien Regnard divers droite et Arnaud Dumas de Rauly, du mouvement "À nous la démocratie".
A noter que le candidat du Front national, Denis Franceskin, qui pourtant remplissait ces critères, a refusé de participer à ce débat qui a duré pendant deux heures en abordant quatre thèmes précis : la moralisation de la vie politique, l’éducation, l’économie et la fiscalité. Autre question souelvée, celle de savoir dans quelle partie de l’hémicycle ils siégeront s’ils sont élus : le gouvernement ou l’opposition ? Une question qui s’adressait surtout à certains des candidats…
Frédéric Lefebvre n’est plus à présenter : politicien de carrière, ex-ministre sous la présidence Sarkozy, il brigue ici un deuxième mandat. Déjà accusé il y a quatre ans d’avoir été parachuté dans cette circonscription, il n’a visiblement pas eu cure de ces commentaires puisqu’il n’y vit toujours pas - il réside dans la région parisienne.
Il se targue pourtant d’avoir rempli son mandat en défendant les intérêts de ses compatriotes d’Amérique du Nord et n’a eu de cesse durant le débat d’affirmer qu’il « connaît bien le nouveau président », que le nouveau Premier ministre est un « ami » et qu’il entretient aussi des liens étroits avec plusieurs des membres du nouveau gouvernement. Voilà pourquoi il se dit prêt à travailler avec le pouvoir en place.
Les Français n’en peuvent plus de ces querelles permanentes et ils ont raison.
Frédéric Lefebvre (LR)
« Je vote un texte quand je pense qu’il est bon pour la France, ça m’a permis de faire des avancées importantes pour mes compatriotes, déclare-t-il en entrevue. Je me bats contre les "chicailleurs " politiques, les Français n’en peuvent plus de ces querelles permanentes et ils ont raison. Le fait que j'aie cette relation de confiance avec le nouveau président, le fait en même temps que j'ai eu une relation de travail depuis longtemps avec le nouveau Premier ministre, ou avec un certain nombre de ministres, évidemment c'est une chance pour construire notamment pour les Français qui vivent loin de la France ».
Durant la campagne présidentielle, Frédéric Lefebvre a d’ailleurs pris ses distances avec le candidat de son parti, François Fillon, qu’il n’a soutenu que du bout des lèvres. « La question n’est pas de se distancer, tient-il à préciser, je suis un homme loyal. Mais à force de se radicaliser, d’être dans l’opposition, c’est caricatural et ça les Français n’en veulent plus. » Il reste que Frédéric Lefebvre est le candidat du parti "Les Républicains" et il faudra voir justement si les Français d’Amérique du Nord vont maintenir le rejet des partis traditionnels comme ils ont fait lors du premier tour de la présidentielle.
Auquel cas, celui qui pourrait profiter de cette tendance serait le candidat du mouvement d’Emmanuel Macron, Roland Lescure. Cet économiste réputé, que la Caisse de dépôt et placement du Québec est venu recruter il y a maintenant 8 ans, a donc fait son plongeon définitif en politique le 11 mai dernier en devenant le candidat de "La République en marche" – il a démissionné de son poste de vice-président de la Caisse début avril pour faire campagne pour Emmanuel Macron au Québec
« Je suis très content de porter ses couleurs, je trouve que ce mouvement est absolument fantastique de renouvellement, je bénis le jour où j’ai décidé de faire ça. On est en train de changer les pratiques, et il faut aussi aller les changer à l’Assemblée nationale », déclare-t-il en entrevue.
La dernière fois que j’ai vérifié, il n’y a qu’un seul candidat investi par Emmanuel Macron et c’est moi.
Roland Lescure (LREM)
Roland Lescure, qui vivait sa première expérience de débat politique, a aimé l’exercice, même si Frédéric Lefebvre, vantant ses relations avec le nouveau président, ne se gênait pas pour piétiner ses plates-bandes. « La dernière fois que j’ai vérifié, il n’y a qu’un seul candidat investi par Emmanuel Macron et c’est moi. C’est vrai qu’on a entendu énormément de "name dropping" comme on dit, du monde qui connaît énormément de monde. Je suis réaliste, j’espère avoir mes chances mais sans travail on n’a rien, je sais que comme disait Jacques Brel, le talent c’est trois choses : le travail, le travail et encore du travail, donc on y va un obstacle à la fois, la priorité c’est le premier tour… Et le défi majeur c’est de sortir le vote… Mais c’est sûr que mon vœu le plus cher, c’est de me retrouver dans cette équipe colorée dans quelques mois ».
Pour ce faire, Roland Lescure a développé son programme sur trois axes : améliorer l’accès à l’éducation en français pour les enfants des Français qui vivent en Amérique du Nord, notamment en embauchant des enseignants ; rendre équitable la fiscalité pour ses compatriotes ici ; et simplifier également l’accès à l’administration française pour le renouvellement des passeports et autres papiers d’identité, notamment en développant les services par internet. "La République en marche" compte sur une armée de 4 000 « marcheurs » et marcheuses » qui travaillent fort pour faire élire leur candidat.
Le mouvement de Jean-Luc Mélenchon est aussi très actif en Amérique du Nord, avec 44 groupes qui organisent des événements un peu partout sur le territoire de la première circonscription en faveur de leur candidate, Clémentine Langlois.
Je ne pouvais plus rester derrière mon poste de télévision sans passer à l'action.
Clémentine Langlois (La France insoumise)
Cette mère de famille, entrepreneure dans le numérique est installée à Ottawa, la capitale canadienne. Elle a décidé de joindre les rangs « mélenchonistes » parce qu’elle voulait s’impliquer dans la vie publique. « C'est le constat de cette urgence écologique, sociale et démocratique que l'on vit en France et à l'étranger, explique-t-elle. Aujourd'hui je ne pouvais plus rester derrière mon poste de télévision sans passer à l'action, cette urgence on doit la porter tous en tant que citoyen et se mettre en action pour défendre les valeurs de notre République, liberté égalité et fraternité ».
Tout aussi novice en politique que l’est Roland Lescure, elle a bien défendu son programme durant le débat et les partisans de Jean-Luc Mélenchon sont nombreux, surtout à Montréal où il a obtenu plus de 24% des voix lors du premier tour de la présidentielle et où vit la plus grande communauté française en Amérique du Nord.
Implanté à Montréal également depuis 2011, Yan Chantrel porte les couleurs du Parti socialiste. Il a, au cours de la dernière année, sillonné l’Amérique du nord de long en large pour aller à la rencontre des Français qui y vivent, une démarche qu’aucun autre candidat n’a fait précise-t-il : « Et donc je pense être fort riche de cette expertise, de ces rencontres, qui m'ont permis de mettre au point un programme et une plateforme participative unique en son genre. Grâce à cette démarche sur le fond, je suis allé chercher des électeurs de Macron et de Mélenchon. Il faut changer la façon de faire de la politique et je suis prêt à le faire. On est sur un territoire qui reconnait le mérite et l’effort, je pense avoir donné le gage à mes concitoyen que je méritais leur confiance parce que j’ai fait tous les efforts pour ça ». Mais Yan Chantrel pourrait lui aussi être la victime de la vague qui a balayé les partis traditionnels lors des présidentielles.
C’est sur cette vague que compte bien aussi surfer le candidat indépendant Arnaud Dumas de Rauly, entrepreneur installé à New York, qui a fondé son mouvement « À nous la démocratie ».
Il a lui aussi voulu s'engager en sentant souffler le vent du changement : « Je me suis présenté à cause de ce besoin de renouvellement. Il me semble que les Français sont aujourd'hui enfin prêts à travailler sur cette relation qu'ils ont avec le gouvernement, ce renouveau de la classe politique, et en finir avec les professionnels de la politique… je ferai un mandat, deux maximum, je ne compte pas faire de la politique ma vie professionnelle ».
Il précise qu’il n’a pas voulu joindre le mouvement "En Marche" parce qu’il y avait trop de points de divergences avec son programme. « Il faut en faire beaucoup plus, ajoute-t-il, il faut rendre les politiciens responsables de leurs actes ».
Une opinion que partage Damien Regnard, candidat indépendant, homme d’affaires installé à la Nouvelle-Orléans et qui avait fini troisième lors des dernières législatives. Sa candidature est axée sur : « La proximité, l'intégrité, l'honnêteté la fidélité et tout ça dans la mise en place de relations bilatérales entre la France et nos compatriotes d'ici et les élus, les représentants des 50 États aux Etats-Unis et des 10 provinces au Canada. Il faut travailler tous ensemble. Je ne demande pas de l’argent à la France, je suis là pour permettre à la France d’exporter et pour aider les Français à faire des affaires sur le continent nord-américain. Je connais bien les problématiques de nos compatriotes ici, contrairement au député sortant qui ne pourrait pas vous l’expliquer puisqu’il vit toujours à Paris ».
Les six candidats ont été unanimes dans leur volonté de moraliser la vie politique et ont tous promis transparence et honnêteté au cours de leur mandat s’ils sont élus. Un meilleur accès à l’éducation en français fait aussi partie de leurs priorités, sur ce dossier, tout le monde était d’accord. Et ils ont également tous dénoncé le fait que le vote électronique ait été supprimé pour ces législatives, rendant ainsi difficile le vote pour les centaines de milliers d’électeurs français qui vivent sur ce si grand continent qu’est l’Amérique du Nord.
Ils se sont donc tous engagés à œuvrer, s’ils sont élus, pour faciliter le vote et le simplifier dans l’avenir.
Maintenant, qui sortira gagnant de ce premier tour ? Réponse après le 3 juin !
> Ci-dessous, la liste complète des candidats: