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©TV5MONDE/sujet de Jean-Luc Eyguesier
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Législatives en Iran : un test pour les réformateurs

Les Iraniens votent ce vendredi 26 février. Ces législatives, premier scrutin depuis la signature de l'accord sur le nucléaire en juillet dernier, font figure de test pour le président Hassan Rohani, qui voudrait imposer son courant réformateur.

Ce vendredi 26 février, les Iraniens choisiront pour quatre ans les 290 députés (dont 9 femmes) de leur Parlement (Majlis). Ils renouvelleront aussi les 88 membres de l'Assemblée des experts qui, élus pour huit ans, seront probablement appelés à choisir le successeur de l’ayatollah Khamenei, 76 ans et malade, lorsqu'il viendra à disparaître.

Les deux chambres sont actuellement dominées par le courant conservateur du guide suprême. Pour faire contrepoids, modérés et réformateurs s'agrègent autour du président actuel Hassan Rohani.

L'espoir des réformateurs

Élu en 2013, le président dit modéré Hassan Rohani et ses alliés, dont l'ancien président Ali-Akbar Hachemi Rafsandjani, espèrent obtenir une majorité de représentants pour avoir les coudées franches au Parlement et faire passer leurs réformes politiques et sociales. Et pourtant, le guide suprême et son clan conservateur ont tout fait pour les entraver en opposant leur veto à des milliers de candidatures via le Conseil des Gardiens (6 religieux, 6 juristes), chargé d’approuver les candidats. Sur plus de 12 000 inscrits pour le Parlement, la moitié seulement a eu l’aval du Conseil.

Quant au renouvellement des membres de l'Assemblée des experts, seulement 161 sur 801 candidats ont été approuvés. Cette sélection a largement favorisé le clan conservateur du Guide suprême, qui s'accroche au status quo.

C'est par cette même mécanique que Mahmoud Ahmadinejad avait accédé à la présidence en 2005. Mais depuis le mouvement de contestation de 2009, violemment réprimé par le gouvernement, beaucoup d'Iraniens comptent sur les élections pour prendre leur revanche sur les conservateurs. Même si le camp conservateur a le soutien des médias, de l'Etat, et des forces de police pour faire campagne, les modérés ont appris, eux, à contourner la censure sur les réseaux sociaux.

A Téhéran, beaucoup d'électeurs annoncent leur volonté de voter réformateur, même si les candidats leur sont inconnus, ne serait-ce que pour contrer les conservateurs, à la fois au Parlement et à l'Assemblée des experts. En 2013, n'ont-ils pas déjà réussi à porter à la présidence le "modéré" Hassan Rohani ?

Que veulent les Iraniens ?

"Les problèmes sont si nombreux qu'on ne peut même pas les énumérer", lance Yadollah, petit commerçant d'un quartier populaire du sud de Téhéran. Plus spécifiquement, les Iraniens s’inquiètent de la rudesse de leur quotidien face à une inflation dont le gouvernement affirme qu’elle est contenue à moins de 10 %.

Selon la Banque mondiale, elle est, certes ramenée à environ 13% contre 45,1% en 2012, mais reste forte, alors que le chômage est en hausse, à 11,4% en 2014. "L’essentiel, et le plus urgent, ce sont les problèmes économiques. S’ils continuent à s’aggraver, il deviendra de plus en plus difficile de gérer les tensions dans la région", dit Musa, un habitant de Téhéran.

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Les moins de 30 ans, qui comptent pour 60 % de la population iranienne, sont particulièrement touchés par le chômage : "Les jeunes diplômés sont nombreux à être au chômage. Le logement, l’économie et l’emploi devraient être les priorités du Parlement. Les gens en ont marre de la politique, ils veulent que le Parlement trouve une solution à leurs problèmes," assure Seyd, étudiant à Téhéran.

Aujourd'hui, l'économie iranienne est en souffrance, le cours du pétrole s'est effondré. Du coup la croissance est en berne, à l'instar des autres pays producteurs de pétrole. Tout va donc dépendre de l'ouverture du pays aux investissements étrangers, comme le permet désormais la levée des sanctions et de l'embargo.

Le contexte a changé

La signature de l'accord sur le nucléaire a aussi influé sur le rôle de l'Iran sur l'échiquier régional et international. C'est l'actuel président Hassan Rohani qui a relancé les négociations. Le 14 juillet 2015, ces discussions ont mené à un accord historique garantissant le caractère civil du programme nucléaire iranien en échange d'une levée progressive des sanctions internationales

Le président iranien table sur le soutien des jeunes, plutôt favorables à sa politique de réformes. En outre, toute une partie de l'électorat est soulagé par l'ouverture du pays à l'international. Aujourd'hui, l'Iran s'affirme comme puissance régionale chiite face à l'Arabie saoudite sunnite, notamment en Syrie et au Liban, en Irak et au Yémen.

Les électeurs mobilisés ?

Dans une dépêche de l'agence de presse iranienne IRIB, le président Rohani estime que "la participation massive et enthousiaste de la nation iranienne aux élections est nécessaire et d'une grande importance".

S'exprimant ce mercredi 24 février lors de la réunion du Conseil des ministres, il appelle les différentes couches de la société à se présenter massivement aux urnes le 26 février, pour les élections législatives et de l'Assemblée des Experts. "Cette participation renforcera la démocratie, la puissance nationale et le capital social du pays, et démontrera l'union et l'éthique islamique", a-t-il fait valoir, selon l'agence iranienne.

Lors des législatives de 2012, le taux de participation atteignait 60%. La mobilisation des électeurs ce 26 février sera aussi l'un des enjeux du scrutin, certains observateurs craignent un fort taux d'abstention dans les régions éloignées de la capitale.


Les élections iraniennes en chiffres

Electeurs : 54 915 024 (sur 79 millions d'habitants), dont 60 % ont moins de 30 ans.
Candidats (après désistement) : 4844 candidats pour le Parlement, dont 10 % de femmes
                                                           159 pour l’Assemblée des experts, dont aucune femme
Sécurité : 250 000 policiers sont mobilisés