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Ces derniers mois, la tension est remontée de plusieurs crans. Cela a commencé en août 2015 quand deux soldats sud-coréens ont sauté sur une mine, récemment posée par le nord, explique un officiel à Séoul – qui refuse d’être cité comme tous les représentants du gouvernement, le sujet des relations avec le Nord étant qualifié de trop sensible. Le Sud a alors riposté en réactivant sa propagande par haut-parleur, une première depuis onze ans. Le Nord en a aussitôt fait de même.
Alors que l’affaire semblait se calmer, l’essai nucléaire auquel a procédé Pyongyang en janvier, le quatrième en dix ans, a amené Séoul à fermer la zone économique de Kaesong, en territoire nord-coréen, qui employait 53 000 personnes et représentait la principale source de devises pour Pyongyang. Le Nord a alors procédé à plusieurs tirs de missile – y compris depuis un sous-marin, une première – qui ont été sanctionnés par l’ONU par des mesures qui isolent un peu plus le dernier régime totalitaire de la planète. Cette séquence s’est terminée début mai avec la convocation par Kim Jong-un d’un congrès du Parti des travailleurs qui a consacré sa toute-puissance pour présider aux destinées des 23 millions de Nord-Coréens.
«Depuis la fin du congrès, l’intensité de la propagande a diminué d’intensité, explique le major-général Urs Gerber, responsable de la délégation suisse auprès de la Commission de supervision de l’armistice par les Etats neutres (lire ci-dessous). Depuis nos baraquements, situés sur la frontière, on entend surtout les haut-parleurs du Nord. Mais suivant le sens du vent, ceux du Sud sont aussi audibles. Pour ma part cela ne m’empêche pas de dormir même si je dois parfois mettre des bouchons dans les oreilles.»
Aux abords des baraquements bleus de l’ONU, les gardes sud-coréens, tous équipés de grosses lunettes de soleil, sont figés dans une posture de Taekwondo, poings serrés, «pour impressionner l’adversaire». Le bâtiment du centre où est disposée une table avec deux micros placés précisément sur la ligne de démarcation, est le lieu où les émissaires des deux camps peuvent négocier. La dernière rencontre remonte à novembre dernier. Depuis, tous les canaux de discussions ont été coupés.
«Il est peu probable que l’on retourne à la table de négociation prochainement, indique une source officielle à Séoul. Les provocations se poursuivent à la frontière. Et pour l’envisager, le Nord doit donner des garanties sur la dénucléarisation de son territoire.» Un geste impensable après la proclamation par Kim Jong-un du statut de puissance nucléaire de la Corée du Nord.
Depuis une colline environnante, le guide militaire indique le passage de la frontière à travers la forêt. Des guérites et systèmes de caméras ponctuent un paysage dominé par deux mâts où flotte un drapeau national se faisant face à quelques centaines de mètres de distance. Le nord-coréen trône à plus de 160 mètres (record mondial), une petite victoire sur le Sud. Au pied de ces mâts s’étendent deux villages modèles, les seules habitations situées dans la zone démilitarisée, construits en 1955, un temps où la Corée du Nord était plus riche que son voisin du Sud ou que la Chine. Aujourd’hui, le village du Nord, Kijong, est vide. Celui du Sud, Daesong («le village de la liberté»), est peuplé de 200 paysans placés sous l’autorité de l’ONU et fermé aux étrangers.