Liban : le Parlement échoue pour la 12ème fois à élire un président

Le Parlement libanais a échoué pour la douzième fois mercredi 14 juin à élire un président, le bras de fer avec le puissant Hezbollah pro-iranien aggravant le risque d'une vacance prolongée dans le pays. Le Liban en plein effondrement économique est sans président depuis plus de sept mois et dirigé par un gouvernement démissionnaire aux pouvoirs réduits.
 

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Liban Parlement

Les législateurs libanais se réunissent pour élire un président au parlement à Beyrouth, au Liban, le 14 juin 2023.@AP Photo/Hassan Ammar.

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Le Parlement compte 128 députés et aucun camp n'y dispose d'une claire majorité. Mercredi, ni un ancien ministre soutenu par le Hezbollah ni un économiste appuyé par ses adversaires, n'ont obtenu le nombre suffisant de voix pour être élu.

 Jihad Azour FMI

Dans cette photo d'archive du 13 novembre 2018, Jihad Azour, directeur du département Moyen-Orient et Asie centrale du Fonds monétaire international, donne une conférence de presse à Dubaï, aux Émirats arabes unis. @AP Photo/Kamran Jebreili.

Au premier tour, Jihad Azour, un responsable du Fonds monétaire international (FMI), a obtenu 59 voix, contre 51 voix pour son concurrent, l'ancien ministre Sleimane Frangié. Tout candidat a besoin de 86 voix pour être élu au premier tour.

Les députés du Hezbollah et de ses alliés, soutenant Sleimane Frangié, sont ensuite sortis pour empêcher, faute de quorum, la tenue d'un deuxième tour au cours duquel 65 voix, soit la majorité absolue, sont suffisantes pour élire un président.

Liban : vote Parlement

Le législateur libanais Michel Moussa vote alors que le parlement se réunit pour élire un président au parlementà Beyrouth, au Liban, le 14 juin 2023. @AP Photo/Hassan Ammar.

Les parlementaires du Hezbollah et de ses alliés avaient déjà eu recours à la même tactique lors des sessions précédentes. Le parti domine la vie politique et dispose d'un puissant bras armé.

Ce qui s'est produit aujourd'hui est un véritable soulèvement des députés libanais (...) qui ont dit "non aux diktats et aux menaces".

Samy Gemayel, député chrétien et chef du parti des Kataëb

Hassan Fadlallah, un député du Hezbollah, a pour sa part assuré que "le pays ne peut être dirigé par (...) la confrontation mais par l'entente". "Pour nous, le dialogue est essentiel pour élire un président".

"Confrontation et défi "

Jihad Azour, qui a suspendu sa mission au FMI pour mener sa campagne, avait affirmé lundi vouloir "contribuer à une solution et ne pas être un facteur de crise".
Ancien ministre des Finances (2005-2008), il avait assuré que sa candidature ne constituait "un défi pour personne", en réponse au Hezbollah qui l'a qualifié de candidat "de confrontation" et de "défi".

Michel Moawad

Le législateur libanais et candidat à la présidentielle Michel Moawad, au centre, s'entretient avec d'autres législateurs lors d'une session pour élire un nouveau président libanais, au parlement, à Beyrouth, au Liban, le 20 octobre 2022. @AP Photo/Hussein Malla.

Un premier candidat soutenu par les adversaires du Hezbollah, le député Michel Moawad, avait déjà été qualifié de tel par la formation chiite, avant de se retirer la semaine dernière au profit de Jihad Azour.

Sleimane Frangié, dont le grand-père a été président du Liban, avait de son côté promis dimanche d'être "le président de tous les Libanais", malgré son alliance avec le Hezbollah et l'amitié qui le lie au président syrien Bachar al-Assad.
En vertu du système confessionnel de partage du pouvoir, la présidence du Liban est réservée à un chrétien maronite.

Blocage

Face à ce blocage et "en l'absence d'une pression internationale importante", le plus probable est que le pays entre dans une "période de vacance prolongée" qui pourrait durer plusieurs mois, estime l'analyste Karim Bitar.
Le quotidien Al-Akhar, proche du Hezbollah, titrait mercredi sur toute sa première page: "Le vide".

Lors de la dernière élection présidentielle, le camp du Hezbollah avait paralysé l'action du Parlement pendant plus de deux ans pour imposer l'élection de Michel Aoun, son allié, en 2016.

Par le passé, les députés attendaient souvent des directives de leurs différents "parrains" étrangers avant de voter.

 Jean-Yves Le Drian et Michel Aoun

Sur cette photo publiée par le photographe officiel du gouvernement libanais, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian et le président libanais Michel Aoun, se saluent au palais présidentiel à Beyrouth, au Liban, le 6 mai, 2021. @Dalati Nohra via AP

Seul pays à s'impliquer réellement dans ce dossier, la France, ancienne puissance mandataire, doit dépêcher à Beyrouth l'ancien ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, nommé "envoyé personnel pour le Liban" du président Emmanuel Macron.

Paris a appelé mardi les responsables libanais à "prendre au sérieux" la session parlementaire et "en faire l'occasion d'une sortie de crise".
Washington a également exhorté le Parlement libanais "à finir le travail" et élire un nouveau président avec "un sentiment d'urgence".

Pour Karim Bitar, l'impasse pourrait mener à "des négociations qui aboutiraient à une solution autour d'un troisième homme, et une élection décidée d'avance, comme la plupart des autres scrutins dans l'histoire du Liban".