L'Ukraine ouvre ses champs aux OGM

La notion de "biotechnologie", alias OGM, apparaît au détour de l'une des 2 134 pages de l'accord d'association entre l'Ukraine et l'Union européenne. Dernièrement, le pays a légiféré sur cette question, qui participe donc au "rapprochement" entre Kiev et Bruxelles.
Image
Maïs OGM Monsanto MON810
Un cultivateur présente des épis de maïs génétiquement modifiés, ici en Allemagne en 2007.
AP/Sven Kaestner
Partager 3 minutes de lecture

L'Ukraine et l'Union européenne ont tenu leur premier sommet ce 27 avril 2015. Cette rencontre doit avoir lieu une fois par an, selon l'accord d'association signé en juin 2014. Ratifié en septembre 2014 par les parlements ukrainien et européen, celui-ci doit entrer en vigueur le 1er janvier 2016.

Coïncidence de calendrier, peu après cette ratification par son Parlement, le président ukrainien Petro Porochenko promulguait une loi sur la sécurité sanitaire des produits agroalimentaires (loi 1602-VII). Celle-ci doit permettre d'harmoniser la législation ukrainienne avec celle qui est en vigueur au sein de l'Union européenne. Parmi ses dispositions, l’adoption des principes européens en matière de régulation des organismes génétiquement modifiés (OGM).

Jusque là, la culture de semences OGM était interdite dans le pays, doté de très bonnes terres arables - on l'appelait le grenier de la Russie -, et exportateur de céréales de premier plan (3e exportateur mondial de maïs en 2013/2014, 4e d'orge et 6e de blé).

Paysans chargeant paille Ukraine Brody
Des paysans chargent de la paille, près de Brody,  à 440 Km à l'Ouest de Kiev, en juillet 2013.
AP/Efrem Lukatsky

Début novembre 2013, à peine trois semaines avant que la révolution ne s'installe place Maïdan, un amendement à cette loi, préparé par six organisations agricoles ukrainiennes (lien en anglais), allait déjà en ce sens. L'argument de ses auteurs ? « Des semences de maïs et de soja transgéniques sont déjà utilisées dans le pays, en dépit de leur interdiction par la loi. »
 

Promouvoir l'usage de biotechnologies

Cette question des OGM se retrouve - de manière discrète - dans l'accord d'association. L'un de ses articles, le numéro 404, a été mis en lumière à l'été 2014 par une étude de l'institut Oakland (lien en anglais), un think tank américain travaillant notamment sur les questions environnementales. Placé dans le 17e chapitre de l'accord (lien en anglais) consacré à l'agriculture et au développement rural, l'article préconise entre autres de « promouvoir une production agricole moderne et durable (…) incluant le développement de l'usage de méthodes de production biologiques, mais aussi l'usage de biotechnologies. » Autrement dit, d'OGM. L'article suivant indique un rapprochement entre les législations en vigueur chez les deux parties de l'accord.

La culture d'OGM se ferait dans les mêmes proportions qu'en Union européenne Christophe Noisette, d'Inf'OGM

Selon Christophe Noisette, rédacteur en chef d'Inf'OGM, un média associatif de veille sur la question des organismes génétiquement modifiés, la culture d'OGM en Ukraine « se ferait dans les mêmes proportions qu'en Union européenne » : le but étant de commercer entre Ukraine et Union européenne, le pays n'aurait pas d'intérêt à cultiver des espèces interdites chez sa voisine.

Pour rappel, la Commission européenne a annoncé le 24 avril dernier avoir autorisé la culture de 17 OGM dédiés à l'alimentation humaine ou animale (dont dix nouvelles autorisations et sept renouvellements).

Soja Monsanto Etats-Unis 2008
Un agriculteur montre des semences de soja transgéniques, ici aux États-Unis en 2008.
AP/Dan Gill

Un investissement dans les semences non-OGM

Parmi ces semences autorisées en Europe, onze proviennent du controversé Monsanto. Doté d'un bureau à Kiev, le groupe a lancé un plan d'investissement de 140 millions de dollars (126 millions d'euros) dans le pays en mai 2013. Son objectif : mettre en route d'ici août 2015 une unité de « semences conventionnelles », donc non-OGM, destinées au marché ukrainien et à l'exportation (lien en anglais).

Un positionnement qui, au vu du contexte, laisse Christophe Noisette sceptique : « Une fois que le réseau est en place, s'il y a une demande d'OGM, il suffit de changer le type de semences employées... »