En l'espace de 25 ans, les politiques de prévention, d'actions sociales ont été réduites de façon drastique en France. L'époque où des éducateurs de rue accompagnaient des jeunes en rupture sociale et accueillaient les jeunes désœuvrés dans des MJC semble révolue. Ce sont aujourd'hui des forces de police qui effectuent des contrôles et des quartiers entiers sont désertés par l'action publique. Les prédicateurs religieux fondamentalistes semblent avoir profité de cet abdication des institutions républicaines : quand ce ne sont pas des "imams" en chair et en os qui font souffler le vent de "l'aventure du djihad", les prêches sur Youtube s'en chargent dans des familles où chacun fait sa vie devant un écran. La France n'est pas le seul pays européen à voir une [infime] partie de sa jeunesse partir en Syrie et en Irak combattre aux côtés de Daech, loin de là. Le mouvement suit la courbe du chômage, de l'austérité budgétaire, des affaires de corruption. Toute la question est désormais de savoir si l'engagement de ces jeunes dans une violence radicale, bien qu'alarmante et intolérable, est-elle vraiment de leur seule responsabilité ? Faut-il simplement les punir ou les contraindre à rester sur le territoire ? Quelques éducateurs de rue posent la question : et si la société dans son ensemble avait une part de responsabilité ? Il serait alors habile de chercher des solutions sociales, éducatives, et humanistes, basée sur des réponses inverses à celles de Daech.
Ce que cet ancien éducateur de rue décrit très bien : "Ces organisations, elles parlent aux jeunes (…) Elles s’intéressent à eux, leur donnent des conseils, leur posent des questions, leur montrent qu’ils existent. Pas une fois par semaine, à table, mais sans arrêt, sur Internet. Elles leur donnent l’empathie qu’ils ne reçoivent de personne d’autre. Nous, les adultes, les profs, les travailleurs sociaux, les parents, les journalistes, nous avons tous une responsabilité envers les jeunes. C’est notre indifférence qui les fait partir".
Le djihadiste "repenti", parti 9 mois en Syrie, qui aujourd'hui tente de prévenir les candidats au djihad en dénonçant le lavage de cerveau qu'il a subi et les horreurs perpétrés par Daech représente un exemple intéressant. Il démontre que retenir en France les jeunes candidats au djihad n'est peut-être pas la meilleure solution. Le "tout punitif", le prédictif, la stigmatisation qui semble engagé par la classe politique française ferait, peut-être, plus le jeu du groupe Etat islamique et de ses "fans" qu'autre chose.