"Le Boeing 777 de Malaysia Airlines est tombé dans le sud de l'océan Indien". Sur la foi de nouvelles données satellitaires, le Premier ministre malaisien a fait cette annonce, qui met un terme au supplice enduré par les familles. Mais qui laisse aussi de nombreuses questions sans réponse. Que s'est-il passé sur le vol MH370, où les 239 personnes à bord ont péri, dont 227 passagers. Avant la découverte des boites noires de l'appareil et leur examen, cette tragédie reste l'une des plus mystérieuses de l'aéronautique civile.
Le mystère reste entier "C'est avec profonds regret et tristesse que je dois vous informer que (...) le vol MH370 a fini dans le sud de l'océan Indien," a déclaré Najib Razak, le Premier ministre malaisien. "Aucune des personnes à bord n'a survécu. Nos prières vont aux êtres chers, aux 226 passagers et 13 de nos amis et collègues en ces moments atrocement douloureux," selon un sms de la compagnie aérienne aux familles des victimes cité par la BBC. Pour ces familles, cette annonce brutale met fin au supplice. Il allait entrer dans sa troisième semaine. Depuis ce lundi, les recherches se concentraient dans le sud de l'océan Indien, à l'ouest de Perth, la grande ville des côtes occidentales de l'Australie, où dérivaient des débris pouvant être des indices. C’est désormais le temps des questions. Que s’est-il passé exactement ?
La piste terroriste ? Le 8 mars dernier, le vol MH370 décolle de Kuala Lumpur à 00H41 (16H41 TU vendredi) avec 239 personnes à bord, dont 227 passagers, en direction de Pékin. Le contrôle aérien perd le contact avec l'avion à 1H30. Le Vietnam affirme que l'avion s'est volatilisé dans son espace aérien et lance une opération de recherches. Dans la soirée, Hanoï signale que ses avions ont repéré deux larges traînées de carburant, et les autorités malaisiennes révèlent que deux passagers à bord de l'avion ont embarqué avec des passeports européens volés en Thaïlande. Dès le lendemain, la Malaisie affirme enquêter sur une piste terroriste, sans exclure les autres. Le FBI américain envoie des agents. L'avion semble avoir fait demi-tour, ou effectué un virage vers l'ouest, sans raison apparente. Les fausses pistes se succèdent. Et l’affaire prend rapidement un tour diplomatique. La Chine est inquiète pour ses 153 ressortissants à bord de l'appareil. Elle demande à la Malaisie d'intensifier les recherches et annonce le redéploiement de dix satellites à haute résolution.
Une action délibérée Le samedi 15 mars, c'est le choc : "Les communications de l'avion ont été désactivées, le changement de trajectoire est l’œuvre d'"une action délibérée" et l'appareil a continué de voler près de sept heures", indique le Premier ministre malaisien Najib Razak. L'annonce est importante. Elle écarte un incident mécanique et privilégie la piste d'une décision prise sciemment. Les logements des deux pilotes sont perquisitionnés. Le simulateur de vol privé du commandant de bord est saisi, mais les données ont été effacées. Quelque 26 pays participent aux recherches. A Washington, le lundi suivant, le président de la commission de Sécurité intérieure à la Chambre des représentants, Michael McCaul, estime que les informations des derniers jours "mènent au cockpit". Sur la chaîne Fox News, il ajoute : "Il s'est passé quelque chose avec le pilote". Durement critiquées par les familles chinoises, les autorités malaisiennes délivrent leurs informations au compte-gouttes, ce qui exaspèrent les familles. Les autorités affirment bientôt que les derniers mots reçus par la tour de contrôle "All right, good night !" ("Eh bien, bonne nuit") ont été prononcés par le copilote. Dans le même temps, deux systèmes de communication essentiels de l'avion étaient délibérément désactivés...
Les échos radars Le samedi 22 mars, la Chine annonce la détection par satellite d'un objet pouvant être un indice et diffuse un cliché pris le 18 mars montrant une forme de 22 mètres de long et de 13 mètres de large. Dans le même temps, la France transmet à la Malaisie les coordonnées de nouveaux débris détectés grâce à des "échos radar réalisés par un satellite". Ces débris se situent à 850 km au nord de la zone de recherche australienne. Ce lundi 24 mars, un avion militaire Iliouchine-76 chinois repère des objets de forme carrée et de couleur blanche. Ils se composent de deux éléments relativement grands et de nombreux autres éparpillés sur un rayon de plusieurs kilomètres. Le Pentagone envoie un sonar spécial utilisé pour localiser les boîtes noires qui, en théorie, émettent pendant 30 jours. Un Orion australien aperçoit deux autres objets à 2500 km au sud-ouest de Perth (Australie) : un rond, gris ou vert, et l'autre rectangulaire, orange.
Faire parler les boites noires. D’abord, bien entendu, les retrouver ! Ces boites noires, en réalité rouges et oranges, peuvent enregistrer sur des cartes mémoires près 25 heures de donnés (trajectoire, vitesse, altitude, heure, pression, météo, etc). Elles résistent au feu (1100 °C pendant une heure) et à la pression de l'eau (7000 mètres). Elles possèdent une autonomie de six années. Reste que ces objets, malgré leur étonnante robustesse, ne sont pas immortels. En cas d’immersion, ils émettent un signal ultrason qui peut être capté jusqu’à 6000 mètres de profondeur. Mais selon le Bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA) jamais une boîte noire n'a été récupérée à une telle profondeur. Leur durée de vie serait d'une trentaine de jours. On estime que grâce à elles, 90 % des accidents peuvent être expliqués. Ainsi, on s'en souvient, après 23 mois immergées à 3900 mètres de profondeur dans l'Océan atlantique, les données contenues dans les boîtes noires de l'AF447 d'Air France avaient été intégralement recueillies. Leur examen avait permis de lever le voile sur le mystère du crash Rio-Paris survenu le 1er juin 2009.