Mali : au moins un mort lors d'une manifestation contre les forces françaises
Au moins un civil a été tué ce lundi 18 avril lors d'une manifestation à Kidal, dans le nord du Mali, contre l'arrestation par les forces françaises d'islamistes présumés opérant dans la région.
Soldats français sécurisant l'entre de Gao, dans le nord du Mali, le 10 février 2013.
@AP/Jerome Delay, archives
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Les Maliens manifestaient lundi à Kidal contre les forces française et de l'ONU à Kidal, dans le nord-est du Mali. Une manifestation qui révèle les tensions entre troupes étrangères et populations, trois ans après le lancement de l'intervention internationale dans ce pays. Les manifestants protestaient contre des arrestations effectuées par la force française Barkhane, qui traque les jihadistes à travers le Sahel, selon une source de sécurité africaine au sein de la la Mission de l'ONU (Minusma) et la Coordination des mouvements de l'Azawad (CMA), une ex-rébellion à dominante touareg.
"Un groupe de manifestants, essentiellement composé de femmes rejointes ensuite par un groupe de jeunes dénonçant des arrestations jugées arbitraires et abusives sur des individus dans la région, s'est dirigé vers l'aéroport sécurisé par la Minusma", selon le communiqué. A Kidal, "au moins un civil a été tué lundi au cours d'une manifestation contre les forces étrangères", selon la source de sécurité africaine, la CMA parlant dans un communiqué de "deux morts et plusieurs blessés dont un cas grave parmi les manifestants".
La CMA déplore "un tel comportement de la part des manifestants" et appelle au calme, tout en exigeant de la Minusma "une enquête immédiate pour identifier les auteurs de tirs mortels contre les manifestants et attend la suite qui en résultera car rien ne saurait justifier les tirs à bout portant sur des manifestants". La Minusma a confirmé la manifestation dans un communiqué, précisant que les informations sur d'éventuelles victimes étaient "en cours de vérification".
"Des manifestants se sont introduits par effraction vers 10 heures (locales et GMT) sur la piste de l'aéroport, zone d'accès restreint, saccageant et mettant le feu aux installations sécuritaires", selon le texte, soulignant l'importance de cette piste "pour l'approvisionnement de l'aide humanitaire, le soutien aux populations locales, ainsi que pour les opérations de la Minusma et des forces partenaires".
Un calme précaire régnait à Kidal après la manifestation de lundi, rapportent des témoins.
Touareg arrêtés par Barkhane
La Mission de l'ONU précise être en contact avec les autorités nationales et locales "dans le but d'apaiser les tensions et de comprendre les circonstances des événements qui ont dégénéré ce matin" et s'engage à communiquer "en toute transparence" sur cet événement ultérieurement.
Selon un militaire guinéen de la Minusma joint par l'AFP, "les manifestants demandaient la libération de trois Touareg arrêtés par les Français de l'opération Barkhane, accusés d'être complices des terroristes qui ont récemment posé des mines qui ont tué trois militaires français".
Tensions
Le 27 janvier 2015, trois manifestants avaient été tués par des policiers de la Minusma à Gao, la plus grande ville du nord du Mali, lors d'une protestation violente contre la force de l'ONU, accusée par les participants de favoriser la rébellion.
Trois soldats français ont été tués au Mali par l'explosion le 12 avril d'une mine au passage de leur véhicule blindé près de la ville de Tessalit, au nord de Kidal, ont annoncé les autorités françaises la semaine dernière. L'attaque a ensuite été revendiquée dans un communiqué par le groupe jihadiste AnsarDine de l'ancien chef rebelle touareg devenu islamiste Iyad Ag Ghaly, actif dans la région de Kidal.
Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes jihadistes liés à Al-Qaïda, après la déroute de l'armée face à la rébellion, d'abord alliée à ces groupes qui l'ont ensuite évincée. Les jihadistes ont été en grande partie chassés par une intervention militaire internationale, lancée en janvier 2013 à l'initiative de la France, qui se poursuit actuellement.
Mais des zones entières échappent encore au contrôle des forces maliennes et étrangères, malgré la signature en mai-juin 2015 d'un accord de paix entre le camp gouvernemental et l'ex-rébellion, censé isoler définitivement les jihadistes.