Une politique de croissance qui desserrerait les liens de l'austérité pourrait se faire dans certaines conditions, et dans une certaine mesure, mais avec l'accord… d'Angela Merkel : la chancelière allemande n'acceptera pas une politique de déficits budgétaires en hausse, soutenue dans cette volonté par les Pays-Bas et le Royaume-Uni. Matteo Renzi le sait, et malgré des discours volontaires sur une pause dans l'austérité, sa politique de croissance européenne ne sera possible que pour les "bons élèves", ceux qui acceptent de faire des réformes structurelles, comme le Conseil européen l'a décidé à Bruxelles fin juin 2014. Ce qui est le cas de l'Italie. Mais le problème de fond de l'Italie reste son plan de réduction de la dette, qui avec une croissance quasi nulle semble impossible à aboutir.
C'est ce problème central du redressement économique italien qu'Alberto Toscano souligne : "L'Italie a trop cédé, en 2011, au diktat allemand sur les promesses de réduction de la dette, et maintenant ces promesses sont très difficiles à tenir. L'Italie s'était engagée à cette même époque à amener
le déficit structurel à 0%, et ça c'est très dur, voire impossible à accomplir". Parallèlement, le nouveau Président du Conseil de l'Union européenne est favorable à la création d'
euros-obligations et a rappelé que Jean-Claude Junker, le nouveau commissaire européen l'était lui aussi : "
Avant, Juncker disait qu'il était favorable aux euro-obligations. J'imagine que maintenant qu'il a changé de fonction, il n'a pas changé de position".
Ces euros-obligations devraient permettre, si elles étaient mises en place, d'offrir aux pays de l'euro-zone un taux d'emprunt unique et d'éviter ainsi la spéculation sur les dettes souveraines des Etats. "Renzi et Hollande ont le même combat : la France et l'Italie poussent pour un grand plan d'investissement à l'échelle européenne, mais le moteur financier de ce grand plan, ce sont les euro-obligations, et les Allemands y sont très opposés. Alors, les euro-obligations on en est encore loin", affirme au contraire le journaliste politologue italien.
Aucune chance, donc, pour Renzi, de convaincre la chancelière allemande de changer son fusil d'épaule ? Peut-être pas : "l'une des raisons pour laquelle Renzi a un poids vis-à-vis de Merkel, c'est que Merkel a une peur panique du retour de Berlusconi, et Renzi est un moindre mal. Même quand il hausse le ton contre Merkel. Renzi est considéré par la chancelière comme quelqu'un de raisonnable. Il est vu comme une bonne alternative face à des situations gênantes pour tout le monde si Berlusconi revenait."
La politique de croissance et de sortie de l'austérité de Matteo Renzi ne paraît pas totalement inenvisageable, mais dans une mesure très modeste : les marges de manœuvre du nouveau président du Conseil de l'Union européenne et du Conseil italien sont limitées. Très limitées. Alberto Toscano résume ce chemin étroit vers une sortie de l'austérité avec Matteo Renzi de la façon suivante : "A mon avis, il y aura quelques concessions au cas par cas, mais ce ne sera pas formalisé. Ce seront des attitudes plus compréhensives, mais je ne crois pas qu'il y aura des modifications apportées au traité, ce sera quelque chose de plus opaque. Les pays qui auront des avantages pour obtenir un relâchement budgétaire devront donner des choses en échange : des engagements de réformes structurelles, donc une politique plus libérale. L'Italie l'a fait, donc, en réalité, le problème politique est plus celui d'Hollande que celui de Matteo Renzi."