Fil d'Ariane
Des préparatifs ont été menés lundi dans un bidonville à Koungou à Mayotte. La première opération d'expulsion doit avoir lieu le 25 avril. "C'est le dernier jour de préparation avant la démolition de demain", explique Psylvia Dewas, chargée de projet sur l'habitat insalubre à la préfecture de Mayotte, coordinatrice des opérations de décasage.
Au total, 85 familles de cette opération, initiée depuis un an, sont sous le coup d'une expulsion. Des marquages ont été apposés à l'aube sur 20 habitations qui seront épargnées car sous le coup d'une procédure de référé, précise Psylvia Dewas.
Le quartier de "Talus 2" est un enchevêtrement de tôles bleues et grises, accroché à une colline, où une centaine de familles d'origine comorienne vivent, certaines depuis 35 ans, dans des conditions précaires.
"Sur l'île de Mayotte, on estime à 30% l'habitat en tôle, illégal, construit sans autorisation, ni titre et insalubre et à ce titre dangereux, surtout dans la mangrove ou des pentes, et susceptible de partir au moment de la saison de pluie", explique la coordinatrice. Elle chiffre à 100 000 personnes la population des bidonvilles dans l'archipel.
Dans une école proche, les personnes étaient invitées par les associations à venir organiser leurs hébergements d'urgence, mis à disposition pour 21 jours. "C'est pour proposer des solutions administratives aux personnes qui vont se retrouver à la rue avec leurs enfants. Ce sont des situations dramatiques pour ces familles installées dans les 'bangas' (quartiers insalubres, NDLR) depuis des années", déclare Eric Michel, de l'association Acfav France victimes Mayotte. "Il va y avoir un éclatement, elles vont être reparties sur l'ensemble de l'île, c'est très compliqué", souligne-t-il.
"Je dormirai dehors, quelque part sur une terrasse si quelqu'un veut bien, si personne ne veut et bien je ne sais pas, je prendrai ma natte pour m'installer sur la route et dormir", déclare Mariam Ali M'Hadji, 53 ans, qui fait partie des habitants attendant d'être pris en charge par les associations.
Le gouvernement français entend mener une vaste opération à Mayotte, pour détruire des bidonvilles et expulser les étrangers en situation irrégulière, la plupart comoriens. Quelque 1 800 policiers et gendarmes, dont des centaines de renforts venus de métropole, sont mobilisés pour cette opération baptisée "Wuambushu" ("reprise" en mahorais), pour laquelle Paris n'a pas donné de date précise de lancement ni de fin.
Les deux députés de Mayotte, Estelle Youssouffa (centre) et Mansour Kamardine (droite), ont apporté leur "soutien" à cette opération, critiquée par des organisations de défense des droits humains. "C'est à notre demande, nous Mahorais, que le gouvernement a lancé cette opération. Les bidonvilles sont des foyers d'insécurité, de violence, qui abritent les trafiquants et les gangs qui sèment la terreur", défend Estelle Youssouffa, sur Radio Classique.