Fil d'Ariane
Porter assistance aux migrants naufragés, là où les bateaux des gardes côtes italiens et de l’opération Frontex ne vont pas : dans les eaux internationales de la mer Méditerranée au large des côtes libyennes. Telle est la mission que s’est donnée l’association SOS Méditerranée.
Mi-septembre, Sophie Beau, co-initiatrice du projet avec Klaus Vogel - ancien capitaine de la marine marchande allemande- nous confiait vouloir mettre en place une mission de sauvetage pérenne et indépendante de toute contingence politique.
Et une mission qui soit surtout adaptée. Car les bateaux cargos à qui il est parfois demandé de se dérouter pour porter secours aux migrants en pleine mer peuvent devenir dangereux : « Un porte-conteneur de 300m qui débarque à côté d’un petit bateau en train de couler a toutes les chances de le faire chavirer encore plus vite », nous racontait Sophie Beau.
Pour y parvenir, SOS Méditerranée avait lancé en septembre dernier une campagne de financement participatif relayée par les médias. Des soutiens de personnalités se sont ensuite multipliés comme ceux de l’économiste Thomas Piketty ou encore du journaliste Nicolas Hénin.
Aujourd’hui, cette collecte leur a rapporté 274 723 euros venant de 3 357 donateurs. Des contributeurs allemands ont aussi fait don de 125 000 euros. A cela se sont ajoutées également des promesses de dons de mécènes à hauteur de 200 000 euros. "Des fondations familiales ou d'entreprises, des parlementaires nous ont donné, explique la vice-présidente Fabienne Lassalle. Et la Ville de Paris participe à hauteur de 10 000 euros."
Au total près de 600 000 euros déjà collectés. De quoi louer un bateau pendant un mois avec à son bord une vingtaine de marins aguerris et une équipe médicale de sauvetage de l’ONG Médecins du Monde partenaire de l'opération depuis le début.
Encore fallait-il trouver le bateau approprié en fonction des fonds réunis... Mi-novembre, l'équipe allemande de l'association en a trouvé un de 77m. L’Aquarius, actuellement en préparation en Allemagne, à Sassnitz, pourra accueillir 500 personnes à son bord. Il devrait appareiller dans un mois et se tenir prêt pour des missions de sauvetages dès février en haute mer.
En cette période hivernale, les traversées se font plus rares mais quand elles ont lieu, elles peuvent être davantage dangereuses du fait, bien sûr, de la température de l'eau et des conditions météorologiques difficiles.
Selon l'Organisation Internationale des Migrations (OIM), aucune arrivée de migrants en Italie venant de Libye ou d'Egypte n'a été enregistrée depuis le 19 novembre. L'agence européenne de surveillance des frontières, Frontex observe également une baisse du nombre des arrivées pour le quatrième mois consécutif.
Cependant l'association SOS Méditerranée s'inquiète de voir des gens toujours emprunter la route maritime même en hiver à cause de la fermeture progressive des frontières terrestres au sein de l'Union européenne et du renforcement de leur contrôle.
Alors que l'UE a annoncé que la création d'une nouvelle agence sorte de "super Frontex" sera discutée à la Commission européenne jeudi 17 décembre. Elle pourrait agir aux frontières extérieures d'un pays sans son accord préalable.
Face à ces fluctuations politiques, l'association SOS Méditerranée a donc décidé d'agir et insiste sur le fait que leur mission est menée "à l'initiative et par la société civile européenne", souligne Fabienne Lassalle.