Alors qu'il vient d'accéder à la finale du championnat du monde d'échecs à Dubaï, prévue en novembre 2021, le grand maître russe Ian Nepomniachtchi ne sera pas autorisé à se présenter sous la bannière de son pays. Une interdiction relative à la suspension du pays pour les compétitions internationales jusqu'en décembre 2022.
C’est un détail, rapporté par
The Guardian, qui pouvait paraître anecdotique mais qui a pris des proportions politiques. Le 27 avril dernier, la sextuple championne du monde russe de jeu de dames, Tamara Tansykkuzhina, affronte la polonaise Natalia Sadowska, pour le titre suprême à Varsovie.
Au beau milieu de la partie, un membre de l’organisation retire soudainement les drapeaux russes qui ornent la table. Les mains sur les joues, concentrée, scrutant le damier, la joueuse lève alors la tête, dubitative face à cette intervention inopinée. Elle finit par s’incliner dans cette quatrième manche sur les neuf qui décideront de la vainqueure de la rencontre.
A Moscou, on s’indigne. Le président du Comité olympique russe, Stanislav Pozdniakov, fulmine contre une «
une grossière erreur ». Le porte-parole du Kremlin lui-même, Dimitri Peskov, s’en mêle et impute la défaite de sa compatriote à cet «
incident ».
Face à la résonnance diplomatique de cet épisode, le président de la Fédération polonaise d'échecs s’excuse. Il justifie cette manœuvre par l’obligation de se conformer aux normes sportives édictées par les instances internationales.
Ni drapeau, ni hymne
En décembre 2020, le Tribunal arbitral du sport (TAS), plus haute juridiction sportive, exclut pour deux ans la Russie de toutes les grandes compétitions internationales. Exceptés quelques athlètes, le pays sera le grand absent des Jeux Olympiques de Tokyo cet été et de ceux d’hiver à Pékin l’an prochain.
La décision fait suite à l’accusation de dopage institutionnalisé, entre 2011 et 2015, dont le pays fait l’objet. D’après les révélations de plusieurs lanceurs d’alerte, dont Grigory Rodchenkov, ancien chef du laboratoire antidopage de Moscou, des tricheries ont été orchestrées au moment des Jeux olympiques d’hiver de Sotchi en 2014, notamment en procédant à des manipulations d’urine.
Depuis lors et jusqu’à fin 2022, seuls les sportifs russes jamais condamnés pour dopage, ont l’autorisation de participer aux compétitions, mais sous bannière neutre. En l’occurrence, pas de drapeau, ni d’hymne, ni de présence d’officiels dans les tribunes.
(Re)voir : Jeu d'échecs : une passion mondiale
Les échecs reconnus par le Comité international olympique
Le fait est que les échecs font partie des nombreuses disciplines non olympiques reconnues par le Comité international olympique (CIO). C’est la raison pour laquelle les sanctions prises par le TAS s’appliquent lors des tournois ayant le statut de compétition internationale.
Il en sera ainsi, également, à l’occasion de la finale du championnat du monde d’échecs, programmée à Dubaï en novembre 2021. La Russie, comme l'Union soviétique avant elle, fait partie des références mondiales de la discipline. Pour autant, le joueur russe Ian Nepomniachtchi, qui a remporté le tournoi des candidats le 26 avril dernier à Ekaterinbourg, se présentera face au maître de la discipline le Norvégien Magnus Carlsen, sans bannière russe.
La Fédération internationale d’échecs (Fide) a précisé que ces restrictions sont en vigueur pour les seuls championnats du monde et non pour les autres tournois de qualifications. L’interdiction ne prendra pas non plus effet lors des Olympiades prévues à Moscou en 2022.
Les contours de cette condamnation de la Russie demeurent toutefois flous, notamment concernant les sports collectifs. Quid, par exemple, si elle se qualifie, de la participation ou non de la sélection nationale russe de football à la Coupe du monde au Qatar en 2022 ?