Népal, le défi de la reconstruction

Une conférence des donateurs internationaux a eu lieu, ce jeudi 25 juin, à Katmandou. Le but du gouvernement népalais est d’obtenir un soutien financier pour reconstruire le pays, ravagé par le séisme du 25 avril dernier. L’enjeu est de taille pour cet Etat parmi les plus pauvres au monde.
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Népal reconstruction
Des écoliers népalais attendent leur bus devant un bâtiment en ruines, le 31 mai 2015, à Katmandou, au Népal.
© (AP Photo/Niranjan Shrestha)
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Deux mois après le séisme qui a meurtri le Népal, le 25 avril 2015, le Premier ministre népalais a réuni des donateurs internationaux pour tenter d’obtenir des fonds. Katmandou estime avoir besoin de 6,7 milliards de dollars pour se reconstruire après le séisme qui a tué plus de 8 800 personnes et détruit un demi-million de logements. Une personne sur dix est actuellement sans abri dans cet Etat qui fait partie des plus pauvres au monde.

L’urgence aujourd’hui est de rebâtir les logements ainsi que les écoles et les hôpitaux. « Il faut reconstruire la vie ordinaire qui va de l’alimentation en eau potable aux services comme la voirie, l’eau, l’école et l’électricité, explique Gilbert Potier, directeur des opérations internationales de l'ONG Médecins du monde. Et dans le domaine qui nous concerne plus spécifiquement, celui de la santé, les destructions ont été massives dans les vallées (…) La priorité est de rétablir des conditions de vie décentes et ensuite prévenir les épidémies ». Mais pour le responsable de Médecins du monde, ce qui rend les choses difficiles au Népal, par rapport à d'autres pays victimes de catastrophes naturelles, "c’est la logistique et les infrastructures. Construire une route, ce n’est pas le même prix que de reconstruire un dispensaire".


Plus de quatre milliards de dollars d'aide

Durant la conférence, les donateurs ont promis d’octroyer 4,4 milliards de dollars. Sushma Swaraj, la ministre indienne des Affaires étrangères, a proposé un milliard de dollars, dont un quart sous forme d’aide mais n’a pas donné de précision sur le reste. La Chine s’est engagée à fournir plus de 480 millions de dollars. Les deux puissantes asiatiques se sont historiquement livrées à une lutte d’influence au Népal et toutes deux se sont fortement impliquées dans l’assistance aux victimes après le séisme.

De leur côté, la Banque mondiale et la Banque asiatique de développement devraient aider respectivement à hauteur de 500 millions de dollars et 600 millions de dollars. Le Japon doit offrir 260 millions, les Etats-Unis 130 millions et l’Union européenne 100 millions de dollars.
 

Hésitation des donateurs

Certains donateurs se montrent réticents dans leurs promesses, inquiets de voir les fonds mal utilisés en raison d’une bureaucratie envahissante et d’un manque d’organisation. Le gouvernement népalais veut centraliser toute l’aide dans un nouvel organisme public pour coordonner les efforts de reconstruction mais les experts pointent l'absence de projet détaillé. « Il manque une stratégie claire (…). Le gouvernement doit exposer un plan crédible de mise en oeuvre des projets de reconstruction avec un calendrier », a déclaré Chandan Sapkota, économiste de la Banque Asiatique de développement (BAD) au Népal, avant la conférence. « S’il ne propose pas un système solide de contrôle, il perdra sa crédibilité ».

A la Croix-rouge népalaise, on s'inquiète déjà des problèmes de corruption liés à ces aides internationales. "Des personnes utilisent leur influence politique pour mettre sous pression les autorités et accéder aux fonds destinés aux victimes en obtenant l'inscription de leur nom sur les registres tenus par le gouvernement", a assuré Dev Ratna Dhakhwa, secrétaire général de l'association.« Lorsqu’un Etat n’est pas organisé administrativement pour garantir que l’argent soit bien utilisé, c’est forcement un frein », affirme Antoine Peigney, directeur des opérations internationales de la Croix rouge.

Alors pour rassurer les donateurs, Katmandou a promis une « tolérance zéro » envers la corruption. A l’ouverture de la conférence, le Premier ministre Sushil Koirala a annoncé que le pays mettra « tout en oeuvre pour que l’aide atteigne ses bénéficiaires car nous sommes redevables devant nos citoyens ».

Ne pas répéter Haïti


En 2010, après le grave séisme qui avait touché Haïti, la communauté internationale avait, tout comme pour le Népal, promis plusieurs milliards de dollars d'aides financières. Malheureusement, ces promesses s’étaient peu concrétisées car les donateurs avaient retardé leurs engagements en raison de craintes de corruption et de l’instabilité politique. Cinq ans après, plusieurs milliers d’Haïtiens vivent encore dans des abris d’urgence.