L'ex-président français Nicolas Sarkozy a été mis en examen dans la nuit de mardi à mercredi, notamment pour corruption et trafic d'influence actifs, une mesure spectaculaire au moment où son retour politique est dans tous les esprits. Avant de recevoir l'ancien président, les juges d'instruction avaient mis en examen dans la soirée son avocat, Me Thierry Herzog, et le haut magistrat Gilbert Azibert. [mise à jour le 2 juillet à 3 h]
On l’appelle "l’affaire des écoutes". C’est en fait une affaire sur les affaires. Nicolas Sarkozy est accusé d’avoir corrompu des membres de la justice française pour être informé des procédures qui le menaçaient, au point de se constituer un réseau d’informateurs.
De Kadhafi à Bettencourt
Nicolas Sarkozy recevant Mouammar Kadhafi au Palais de l’Élysée le 10 décembre 2007 (photo afp)
Les enquêteurs en sont venus à ces soupçons alors qu’ils enquêtaient sur une première affaire : celle du financement de sa campagne présidentielle de 2007 par la Libye et son dictateur de l’époque, Mouammar Kadhafi. En écoutant les conversations téléphoniques de certains des proches de l’ancien Président de la République, ils se sont rendu compte que le clan Sarkozy essayait de se renseigner sur cette enquête. C’est à ce moment-là qu’ils décident de mettre Nicolas Sarkozy sur écoute, ou plutôt " Paul Bismuth " le pseudonyme qu’il utilise pour appeler son avocat, Maître Herzog. De leur conversation, les enquêteurs comprennent que les deux hommes cherchent à obtenir des informations de la part de Gilbert Azibert, un haut magistrat. En échange d’un poste prestigieux à Monaco, Nicolas Sarkozy aurait cherché à savoir où en était la procédure à son encontre dans un autre " affaire ", l’affaire Liliane Bettencourt, du nom de l'héritière de L'Oréal. Il était alors soupçonné d’abus de faiblesse à aux dépens de la milliardaire française pour financer sa campagne de 2007. Depuis, il a bénéficié d’un non-lieu. Ce qui vaut à Nicolas Sarkozy, d’être placé en garde à vue ce mardi, ce n’est pas cette affaire mais bien d’avoir potentiellement cherché à corrompre un magistrat pour savoir où en était l’enquête.
D'autres affaires
Arrivée de Nicolas Sarkozy à l'Office anti-corruption de la Police judiciaire, le 1er juillet à Nanterre. (Photo Dominique Faget. AFP)
Au total, Nicolas Sarkozy est cité dans six dossiers judiciaires susceptibles d’entraver son retour en politique. Outre cette affaire de trafic d'influence et de violation du secret de l'instruction et celle du financement libyen de sa campagne de 2007, l'ex-chef d'Etat pourrait être éclaboussé par l'affaire "Bygmalion". Lors de campagne présidentielle de 2012, la société société événementielle Bygmalion a facturé pour plusieurs millions d'euros. Ces sommes n'auraient pas été imputées aux comptes de campagne mais à ceux de son parti, l'UMP. Autre nom synonyme de soucis judiciaires potentiels : Bernard Tapie. Les magistrats soupçonnent l’exécutif français un simulacre d'arbitrage favorable à l'homme d'affaire Bernard Tapie dans un litige qui l'opposait au crédit Lyonnais au sujet de la revente de la société Adidas. La faveur présumée a a rapporté 403 millions d'euros à l'homme d'affaire. A cette liste, il faut encore rajouter un meeting de campagne qui pourrait avoir été financé avec des l'argent public ou encore des soupçons sur des contrats conclus avec plusieurs instituts de sondages. Des contrats conclus sans appel d'offre... Le dossier sur le site de nos partenaires de la RTBF
Jusqu'à dix ans de prison
02.07.2014d'après AFP
Avant de recevoir l'ancien président, les juges d'instruction avaient mis en examen dans la soirée son avocat, Me Thierry Herzog, et le haut magistrat Gilbert Azibert. L'ex-président était arrivé peu avant 08H00 à la direction centrale de la police judiciaire à Nanterre (DCPJ), dans la banlieue ouest de Paris, non loin de son ancien fief de Neuilly-sur-Seine. Après environ 15 heures de garde à vue dans les locaux de l'office anti-corruption (Oclciff) - une première pour un ancien chef de l'Etat - il a été conduit au pôle financier du tribunal de Paris pour y être présenté aux juges. Celles-ci l'ont mis en examen pour recel de violation du secret professionnel, corruption et trafic d'influence actifs, a précisé le parquet dans un communiqué à l'AFP. Il n'est pas soumis à un contrôle judiciaire. La corruption et le trafic d'influence sont des délits passibles de peines pouvant aller jusqu'à dix ans de prison. Ces développements judiciaires interviennent au moment où les rumeurs sur sa volonté de prendre à l'automne la tête du parti de droite UMP se font de plus en plus précises. Si quelques sarkozystes avaient dénoncé dans la journée son placement en garde à vue, aucun ténor de droite n'est monté au créneau pour le défendre.