Organisation internationale de la Francophonie : le numéro deux remercié de ses services

Le numéro deux de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), l’administrateur Geoffroi Montpetit, un Québécois, a été remercié de ses services, a appris Enquête. Après Catherine Cano, en octobre 2020, il est le deuxième Canadien à devoir quitter l’OIF en un peu plus de deux ans. Un départ surprise qui soulève des questions à Ottawa et à Québec.
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Office National de la Telediffusion Tunisie / AFP
Les dirigeants et les délégués des États membres de l'Organisation internationale de la Francophonie posent pour une photo de famille au début du sommet de l'organisation à Djerba, en Tunisie, le 19 novembre 2022.
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(AP Photo/Hassene Dridi)
La secrétaire générale de l'OIF, Louise Mushikiwabo, le Premier ministre canadien Justin Trudeau et le président tunisien Kaïs SaÏed, Djerba, 19 novembre 2022.
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C’est une surprise, parce que les États membres l’appréciaient, indique une source sur la colline du Parlement bien au fait du dossier. Il semble que ce départ ne soit pas aussi acrimonieux que l’a été celui de sa prédécesseure, mais est surprenant parce qu’il n’y avait pas de problème connu sur le plan de la gestion.

La question qui se pose maintenant c’est : est-ce un problème avec l’administrateur ou est-ce un problème avec la secrétaire générale? se demande notre source. Dans un geste aussi soudain qu’inattendu, Catherine Cano avait remis sa démission en octobre 2020 avant la fin de son mandat. L’OIF avait alors parlé de désaccords persistants, ce que n’avait pas voulu commenter Catherine Cano.

C’est une crise pas tout à fait ouverte, mais profonde, commente une autre source qui gravite autour de l’OIF à qui nous avons accordé l’anonymat puisqu’elle n’est pas autorisée à parler publiquement. Selon elle, la secrétaire générale, Louise Mushikiwabo, et sa garde rapprochée créent de la dissension autour d’eux.

Au dernier Sommet de la Francophonie, à Djerba, il y avait d’innombrables tensions à l’interne

Une source près de l'OIF

Au bureau de la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, c’est par l’entremise du principal intéressé qu’on a appris l’information, pas par l’OIF. L’important, dit-on, c’est que la prochaine personne en poste connaisse bien l’appareil, parce qu’on attend toujours des réformes de transparence et de rigueur. On dit par ailleurs être en accord avec Québec sur les choix de candidats suggérés.

Il est toutefois impossible de savoir qui est sur la courte liste, Québec se limitant à dire qu’on ne connaît pas les circonstances de ce départ. On a des contacts avec le bureau de la ministre Joly, on a des discussions sur les candidats, indique-t-on au bureau de la ministre des Relations internationales et de la Francophonie, Martine Biron, qui a appris que le mandat de Geoffroi Montpetit ne serait pas renouvelé par l’entremise de sa délégation de Paris.

Geoffroi Montpetit, un ex-chef de cabinet au ministère fédéral du Développement international, a été mis en poste à titre d’administrateur de l’OIF en mars 2021. En novembre dernier, dans une entrevue qu’il avait accordée à Radio-Canada en marge du Sommet de la Francophonie à Djerba à propos du retard dans l’organisation des Jeux de la Francophonie, il avait reconnu que le travail de modernisation et de transparence entamé à l’OIF n’était pas terminé. C’est un marathon, ce n’est pas un sprint : il y a encore du travail à faire, avait-il dit, lorsque questionné sur les problèmes de gestion soulevés dans des rapports d’audit.

Mardi soir, il n’a pas été possible de joindre ni Geoffroi Montpetit ni un porte-parole de l’OIF.

Départ de l’administrateur de l’OIF : pas de conflit interne, dit la porte-parole

Il n’y a pas de polémique, de dissension ou de conflit interne qui soit à l’origine du départ de Geoffroi Montpetit, assure l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). Il est le deuxième administrateur canadien à être remercié de ses services en un peu plus de deux ans. Mais c’est strictement parce que son contrat vient à échéance que le numéro deux de l’organisation ne verra pas son mandat renouvelé, dit-on.

Le poste d’administrateur est soumis à un contrat, son contrat arrivait à échéance : c’est la secrétaire générale qui a souhaité sélectionner peut-être un profil différent. Ça n’a aucun rapport avec la qualité du travail de M. Montpetit ou d'autres polémiques, a indiqué la directrice des communications de l’OIF, Oria Vande weghe, à la suite des révélations d’Enquête.

L’OIF est soupçonnée par des observateurs de gérer une crise interne. Ils parlent de tensions avec la secrétaire générale et sa garde rapprochée et montrent du doigt le départ tumultueux de Catherine Cano, la prédécesseure de Geoffroi Montpetit.

Mme Vande weghe, aussi porte-parole de la secrétaire générale, Louise Mushikiwabo, refuse catégoriquement de faire quelque lien que ce soit entre ces deux départs.

C’est deux situations totalement différentes, on ne va pas revenir sur le départ de Mme Cano qui avait été expliqué au moment où elle est partie. Il n’y a pas de lien de cause à effet entre les deux situations. M. Montpetit est venu terminer le mandat de Catherine Cano, mais là, son contrat est arrivé à son terme, a-t-elle soutenu.

Pour l’instant, la porte-parole indique que le choix du successeur ou de la successeure n’a pas encore été arrêté.

Impossible de savoir, donc, s’il s’agira d’un Canadien ou d’un Québécois, comme le veut l’entente non écrite intervenue entre le Canada et la France en 2018, quand Ottawa a accepté de se rallier à la France sur son choix d’appuyer la Rwandaise Louise Mushikiwabo, laissant du coup tomber Michaëlle Jean, alors secrétaire générale.

Québec doit se manifester

Mais la situation demeure troublante aux yeux de l’ancienne ministre libérale des Relations internationales et de la Francophonie, Christine St-Pierre. « Ce départ soulève des questions relativement à la façon de gérer de la secrétaire générale. C’est quand même le deuxième départ d’un administrateur en peu de temps. »

Pour l'ancienne ministre libérale, il est temps pour Québec de prendre sa place.

Étant donné que le Québec a un siège à part entière à l’OIF, il serait intéressant que le gouvernement de François Legault puisse saisir l’occasion pour suggérer le ou la successeure, étant donné l’importance que revêt pour nous l’OIF, affirme-t-elle.

Le contrat de Geoffroi Montpetit vient à échéance en mars. Le choix de celui ou celle qui prendra la relève sera forcément connu sous peu, a confirmé Oria Vande weghe.