Palestiniens et Israéliens, l'impossible cohabitation au quotidien

Suite à des pressions exercées par les colons juifs, une ligne de bus spéciale a été mise en place le 4 mars 2013 par Israël pour transporter des travailleurs palestiniens de Cisjordanie en Israël. ONG et autorités palestiniennes parlent de ségrégation. Plus largement, cet épisode met en lumière à nouveau la difficile cohabitation entre deux peuples.
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Palestiniens et Israéliens, l'impossible cohabitation au quotidien
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Deux bus utilisés sur les nouvelles lignes israéliennes réservées aux travailleurs palestiniens ont été incendiés dans le village arabe-israélien de Kfar Qassem, dans le nord d'Israël, dans la nuit du 4 au 5 mars. "Nous explorons toutes les pistes", a indiqué la porte-parole de la police, Louba Samri, précisant qu'une enquête avait été ouverte.
    
Ce qui est semble-t-il certain, c'est que les véhicules ont été incendiés en signe de protestation contre la mise en place de ces lignes séparées. Israël a lancé lundi 4 mars un service de bus destiné aux travailleurs palestiniens, reliant le passage d'Eyal, près de Qalqiliya, dans le nord de la Cisjordanie, à Tel-Aviv, en Israël.
Le ministère des Transports israélien a répondu aux accusations de ségrégation en affirmant que les nouvelles lignes étaient destinées à "remplacer les opérateurs pirates qui transportent les travailleurs à des prix exorbitants". Le ministère argue également qu’une ligne de transport spéciale permettrait au final aux Palestiniens de gagner du temps, car ils ne seraient plus contraints de changer de bus à chaque check-point comme c’est aujourd’hui le cas.
"Ségrégation des bus"
Mais d'après Haaretz, la vraie raison du lancement des lignes de bus est ailleurs. Des colons mécontents de devoir partager les transports avec les Palestiniens ont protesté, invoquant des risques d'attentat. En novembre 2012, le quotidien israélien (plutôt pour la paix avec les Palestiniens) indiquait que le ministère des Transports avait cédé à des pressions exercées par l'ancien maire de la colonie d'Ariel, Ron Nahman, décédé depuis, et par le président du conseil local de Karnei Shomron, en Cisjordanie. Environ 360 000 colons juifs vivent dans les implantations de Cisjordanie, parmi quelque 2,5 millions de Palestiniens.
Une porte-parole de Bt'selem, Sarit Michaeli, a dénoncé une "ségrégation des bus écoeurante", estimant que cela parachève une séparation de fait entre colons et habitants palestiniens de Cisjordanie. Le vice-ministre palestinien du travail, Assef Saïd, a lui dénoncé "une mesure raciste". 
Un système d'"apartheid" ?
Ces Palestiniens de Cisjordanie, qui doivent posséder un permis spécial pour aller en Israël, dénoncent régulièrement un système d'"apartheid" dans lequel certaines routes leurs sont interdites sur leur propre territoire, là encore officiellement pour des raisons de sécurité. Et sur le territoire israélien, des Palestiniens se verraient aussi régulièrement refuser l'accès aux bus.
Hannah Zohar est membre d'une ONG israélienne et observatrice de France 24. Elle a filmé cette scène à Tel Aviv en octobre 2012. Sur ces images, un travailleur palestinien se fait refouler sans raison d’un bus par la conductrice, alors qu’il s’apprête à rentrer chez lui en Cisjordanie. Il devra attendre l’arrivée de la police israélienne pour avoir le droit de monter à bord d'un autre bus, et ce deux heures plus tard. 
La lutte contre le mur à Bil'in, symbole de la contestation palestinienne
Dans ce climat tendu, des liens arrivent pourtant encore à se tisser entre les deux peuples.
Le documentaire Cinq caméras brisées réalisé par le Palestinien Emad Burnat et l'Israélien Guy Davidi, veut montrer le quotidien de villageois palestiniens en Cisjordanie. En 2005, le réalisateur israélien a rencontré Emad Burnat, paysan de Bil’in, une localité devenue un symbole de la lutte des Palestiniens.
Le mur de séparation érigé par Israël à partir de 2002 - officiellement pour se protéger des terroristes palestiniens - coupe le village en deux en 2005, privant les paysans de plus de la moitié de leurs terres agricoles. Commence alors une lutte de longue haleine des villageois pour faire valoir leurs droits et récupérer leurs terres. 
Propriétaire d’un caméscope acheté pour la naissance de son quatrième fils Djibril, né au même moment, Emad Burnat va filmer cinq années durant les face-à-face hebdomadaires entre les soldats israéliens et les villageois. La mobilisation des habitants de Bil'in n'aura pas été vaine car en 2011, le tracé du mur est déplacé de plusieurs centaines de mètres suite à une décision de la Cour suprême israélienne.
Guy Davidi était invité sur le plateau de TV5MONDE le 5 mars 2013. 
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Le film a été financé en partie par des fonds israéliens et a reçu de nombreuses récompenses - dont celle du Jerusalem Film Festival. Cinq caméras brisées a également été nommé aux Oscars dans la catégorie "Meilleur film documentaire".