Philippines : Duterte pourrait décréter la loi martiale

Aux Philippines, des groupes communistes et de gauche ont prévu des manifestations pour protester contre le régime du président Rodrigo Duterte. Réaction de ce dernier : la loi martiale pourrait être décrétée dans tout l'archipel en cas de débordements.
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Philippines Duterte
©AP Images/ Bullit Marquez
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Le ministre de la Défense philippin, Delfin Lorenza, a annoncé ce vendredi 15 septembre qu'en cas de débordements des manifestations de l'opposition, la loi martiale pourrait être instaurée sur toute l'archipel. Il a tout de même précisé qu'une telle mesure reste peu probable puisqu'il s'agissait plus d'une conversation que d'une déclaration officielle :
 
A mon avis, la possibilité que cela se produise est minime. Mais le président est très préoccupé, car cela pourrait dégénérer. Il a alors dit : "je pourrais décréter la loi martiale"
Des commentaires qui alimentent les craintes de l'opposition. La gauche dénonce depuis plusieurs mois le climat de peur aux Philippines liée à la guerre controversée que mène le président contre la drogue. Ils accusent aussi le président de vouloir faire taire ses opposants dans le but d'instaurer une dictature. Le pays est toujours marqué par la dictature de Ferdinand Marcos, renversée il y a trois décennies.

Quant à la possibilité de l'instauration de la loi martiale, elle est difficile à évaluer. En mai dernier, alors que des terroristes avaient pris des otages et occupé des villes dans le Sud, Duterte avait décrété cette loi martiale mais uniquement dans la région. Le conflit avait fait plus de 800 morts. Le président avait alors déclaré que la loi martiale pourrait s'étendre à tout le pays si la menace islamiste s'étendait au-delà de la région.

Des manifestations imprévisibles

Les manifestations de protestation auront lieu le 21 septembre. Les organisateurs, une coalition de gauche "Mouvement contre la tyrannie", tiennent à protester à cette date symbolique, celle du 45ème anniversaire de l'instauration de la loi martiale par Marcos. La coalition regroupe des communistes, des militants gauchistes, des évêques catholiques et des organisations de défense des droits de l'homme. Au coeur de leurs protestations, la campagne de répression antidrogue violente de Duterte et la politique de président envers les institutions démocratiques. 

Les esprits sont échaudés alors que Duterte a apporté son soutien à Ferdinand Marcos. Ce soutien renforce la peur d'un retour à une dictature ; d'où le slogan prévu  pour la journée de protestations : "Arrêtez les tueries ! Plus jamais la tyrannie et la dictature !" Difficile de prévoir l'ampleur des manifestations car, malgré les critiques féroces de ses opposants, les sondages dans le pays montrent que Duterte est encore très populaire. Les précédents rassemblements n'avaient réuni que quelques centaines de personnes.

La loi martiale évoquée mais pas instaurée

Rodrigo Duterte s'est fait élire en 2016 après une campagne durant laquelle il avait promis d'éradiquer le trafic de drogue en faisant abattre jusqu'à 100 000 trafiquants et toxicomanes présumés. Il avait aussi promis de gracier les policiers reconnus coupables de violations des droits de l'homme dans le cadre de cette lutte. Un an plus tard, la police a annoncé avoir abattu plus de 3 800 personnes mais des milliers d'autres sont mortes dans des circonstances non élucidées. 

La loi martiale est une marotte du président qui menace régulièrement de l'instaurer. Mais aucun cadre n'a été défini pour justifier cette mesure drastique, à l'exception du cas évoqué plus haut. Pour Duterte, cette loi martiale serait le Graal qui lui permettrait de régler tous les problèmes : "Si je déclare la loi martiale, j'en terminerai avec tous les problèmes, pas seulement la drogue".