Fil d'Ariane
L’ambiance y est studieuse, décontractée… et très connectée. Rares sont les personnes qui ne sont pas assises devant un ordinateur portable dans le café de l’auberge de jeunesse Saint Christopher’s Inn, près de Gare du Nord à Paris.
Ce lieu privatisé pendant les 15 jours de la COP21, accueille l’événement bien nommé « Place to B ». « B » pour « plan B », « Bourget » (où se déroule la COP), RER B (la ligne de train pour s’y rendre), ou encore « Planète B ». Bref, un événement qui se veut en lien avec la Conférence sur le climat de Paris tout en faisant un pas de côté, en offrant un autre point de vue.
Le but de « Place to B » : proposer une autre voie de réflexion sur le climat, et redonner de la voix aux citoyens du monde entier, spécialistes ou non des problématiques climatiques.
L’idée est née d’une réflexion simple : « Pourquoi la pire catastrophe annoncée ne mobilise pas les foules ? Cet enjeu nous paraît-il trop éloigné de nos préoccupations quotidiennes ? N’y a-t-il pas urgence à raconter le monde différemment ? » lit-on sur leur site internet.
« Nous voulons réunir le plus de personnes possible pour porter une réflexion et trouver des solutions par nous-mêmes en faisant réagir, en faisant prendre davantage conscience des enjeux climatiques », explique Nicolas Bienvenu, cofondateur avec la journaliste Anne-Sophie Novel de l’événement Place to B. « C’est un lieu physique où les gens travaillent ensemble, échangent, où des débats sont organisés et des émissions de radio enregistrées. »
Des artistes comme le groupe de rock français Shaka Ponk, Charlie Winston, des journalistes comme Stéphane Paoli de France Inter ou des personnalités du climat comme l’Indienne Vandada Shiva ont fait le déplacement et participé à faire connaître le lieu. « Il y a aussi une vraie caisse de résonance sur les réseaux sociaux. Nous sommes très suivis », souligne Nicolas Bienvenu, premier surpris et enchanté par un tel engouement.
Près du bar, ce lundi 7 décembre, un groupe d’adolescents venus d’un lycée international en Allemagne peaufine certains de leurs articles postés ensuite sur leur blog UWcop. Ils y publient des interviews, des reportages, des infographies autour de la COP21 pour mieux en comprendre les enjeux. C’est clair, le ton se veut pédagogique, et intéressant.
Faire preuve de créativité dans cette transmission de l'information leur a permis de se rendre compte qu’ils pouvaient attirer de nouveaux publics « sur des thématiques qui peuvent sembler trop complexes », explique Emma Franco, 19 ans. « C’est vrai qu’il est parfois difficile d’impliquer les jeunes sur l’environnement, mais une fois qu’ils le sont, ils représentent une grande force. »
A Paris, « Place to B » propose différentes activités : la « Creative factory » (la fabrique créative) un atelier de 48 heures pour penser autrement la communication autour du climat, cela des affiches à des créations artistiques. Un espace est dédié au « coworking » pour permettre à chacun de venir travailler en groupe, d’échanger.
C’est un lieu très enrichissant, simple et populaire.
Laura Choisy
C’est là que Laura Choisy a posé son ordinateur portable ces derniers jours. Indépendante, elle travaille en communication numérique notamment sur le développement durable. Cette fois, elle est en mission pour une entreprise partenaire de « Place to B ». « C’est un lieu très enrichissant, simple et populaire, résume-t-elle. Je trouve ça rassurant parce qu’en général, tout ce qui est climat c’est souvent très politique, diplomatique… et finalement difficile d’accès. Ça change de la vision que l’on peut avoir, parfois très contraignante, de tout ce qui touche au climat. »
La convivialité est d’autant plus présente le soir après la séance de débat « Place to Brief » avec des spécialistes du monde entier. « A partir de 20h, les gens rentrent de la COP et retrouvent ceux qui finissent leur journée ici à Place to B. Tout le monde en profite pour parler de ce qu’il s’est passé à la conférence de manière plus informelle autour d’un repas ou d’un verre », observe Alexandre Maigrot. Cet étudiant de 27 ans en Master à Paris fait son mémoire sur « les mobilisations informationnelles lors de la COP21 ». « Place to B » était tout trouvé comme sujet d’étude.
« Les gens qui viennent ici ont conscience qu’il faut faire quelque chose ensemble et qu’il y a cette nécessité de trouver un dialogue », nous raconte-t-il. « Une journaliste américaine qui venait de New York, me disait avoir l’impression de retrouver ici un peu du mouvement Occupy Wall street, un endroit où les gens partagent. »
Et après ? Quand la COP21 sera finie, que restera-t-il de « Place to B » ? « Il peut en sortir une nouvelle histoire, pronostique le cofondateur Nicolas Bienvenu. Un contrepouvoir de la société civile, une voix qui peut s‘exprimer différemment.»