François Asselineau, candidat officiel pour la première fois à la présidentielle est très peu connu du grand public. Ce haut fonctionnaire, partisan du Frexit — la sortie unilatérale de la France de l'Union européenne et de l'euro — est un ancien globe trotter et énarque, nostalgique de la France d'avant 1968. Portrait.
Qui est François Asselineau ? La réponse à cette question va dépendre du public à qui on la pose : si c'est à un internaute fan de réseaux sociaux et de vidéos sur Youtube, le personnage d'Asselineau n'a pas pu lui échapper. Dans le reste des cas, le candidat de l'UPR déclenche des levée de sourcils interrogatifs. Les raisons de cette célébrité en dents de scie sont à chercher dans plusieurs phénomènes, mais pour mieux les envisager, c'est la personnalité et le parcours du président du petit parti de l'UPR (Union populaire républicaine, plus de 20 000 membres revendiqués) qui en donne les clés. Retour sur l'histoire de celui qui propose de quitter l'OTAN, l'euro et l'Union européenne comme solution préalable au "redressement de la France".
Premier de la classe…
François Asselineau est né le 14 septembre 1957 à Paris. On ne connaît que très peu son histoire familiale, l'homme se confiant peu et n'ayant pour l'heure qu'une notoriété récente et basée sur ses conférences-fleuves relayées par Internet. Pour le peu qu'il a bien voulu laisser transparaître sur son histoire personnelle, François Asselineau explique que très petit, dès l'âge de 6 ou 7 ans il s'est senti "
attiré par les pays étrangers". Il parle de la France d'avant 1968, cette France
"traditionnelle, catholique, rurale, qui se réunissait autour du repas du dimanche avec les grands-parents", qu'il compare à la société actuelle, celle "
des familles déstructurées, où chacun a son ordinateur, où il n'y a plus de repas de famille, où les gens sont séparés dans la même famille".
C'est à partir d'une histoire tirée d'un livre-audio en disque vinyle qu'on lui offre à Noël, que François Asselineau date sa passion pour le voyage et les pays étrangers. Une passion qui paradoxalement lui fera comprendre, dit-il, en revenant en France, que son pays natal est "
unique au monde", et possède des qualités qu'il n'avait pas envisagées. Dans le disque et le livre qui l'accompagne, un jeune garçon a un poisson rouge magique qui le transporte au Japon : le petit François se met alors à rêver d'aller au Japon. Ce qu'il fera jeune homme.
François Asselineau a un frère aîné et une sœur cadette, et leurs parents les font voyager en Europe pour les vacances, dans la fin des années 60. C'est le souvenir des petits déjeuners anglais avec bacon et jus d'orange qui marque le jeune Asselineau, "
comble de l'exotisme à l'époque", confie-t-il dans une interview. Très bon élève, François Asselineau qui entretient un rapport visiblement très fort à cette France de son enfance, a un souvenir ému des "prix d'excellence" remis en fin d'année aux meilleurs élèves : il se rappelle que le ruban qui les enveloppait était bleu-blanc-rouge. Une marque de l'époque, que François Asselineau semble regretter, puisque ce sont ces petits détails, qui selon lui, "
permettent de croire en la République".
…puis globe-trotter et énarque
François Asselineau date le basculement de la société française, une sorte de charnière pour le pays, à l'année 1968. Les événements de mai, la "révolution" étudiante et ouvrière à laquelle il ne participe pas pour cause de manque de maturité — il a 11 ans — sont un marqueur négatif du changement de la société française, mais il avoue que ces changements seront tout de même pour lui un "appel d'air" qui l'inciteront par la suite à effectuer ses premiers voyages, en mode "baroudeur". A 18 ans en 1975, François Asselineau part en Egypte avec des amis, se déplaçant avec les transports locaux et sac sur le dos. Cette première expérience l'incite à continuer à voyager. Il effectue son service militaire au sein d'HEC et accomplit alors — en deuxième année — son rêve d'enfant : aller au Japon. Il y reste le temps de sa coopération, y apprend à parler la langue, fait "speaker" pour une radio et y développe une passion pour la tradition nipponne, passion qui semble toujours l'habiter. En 1977 il voyage en Inde, et y tombe malade, en 78, le Mexique et le Guatemala, en 79, Hong Kong, Taiwan et la Corée du sud. Son retour en France est forcé par le concours d'entrée de l'ENA (Ecole nationale d'administration) en 1982. Il en sort deuxième de sa promotion "Administration économique" en 1985 et débute ainsi sa carrière de haut fonctionnaire de l'administration française.
François Asselineau explique que c'est alors qu'il se rend compte que la France est "
un pays admirable, unique au monde". Il devient chargé de mission auprès du Président du Crédit National, enchaîne avec le poste de chef du bureau Asie-Océanie à Bercy, et prend du galon en 1993 comme conseiller pour les affaires internationales au cabinet de Gérard Longuet (RPR), le ministre de l'Industrie et du Commerce extérieur du gouvernement d'Edouard Balladur. En 1995, après la victoire de Jacques Chirac, sous le gouvernement d'Alain Juppé, François Asselineau devient directeur de cabinet de la ministre du Tourisme, Françoise de Panafieu. L'années suivante, il est chargé de mission dans le cabinet du ministre des Affaires étrangères, d'Hervé de Charette, en charge de l'Asie, de l'Océanie, de l'Amérique latine et des questions économiques. La dissolution de 1997 voit la gauche revenir au pouvoir, et Asselineau revient dans l'administration : il rejoint l'Inspection des finances, comme inspecteur. Il y est toujours.
Pasqua, Sarkozy, UPR et présidentielle
François Asselineau adhère au RPF (Rassemblement pour la France) en 1999 et se rapproche ainsi de Charles Pasqua, qui, furieux de la décision de Jacques Chirac de ne pas soumettre la signature du Traité européen d'Amsterdam à un référendum, décide de présenter une liste aux européennes pour protester. Le RPF de Pasqua arrive en deuxième position juste après le PS, obtenant 13%. Charles Pasqua embauche François Asselineau dans les mois qui suivent l'élection européenne, comme "directeur général adjoint chargé des affaires économiques et internationales" au Conseil général des Hauts-de-Seine, qu'il préside. François Asselineau est nommé ensuite directeur de cabinet de Charles Pasqua en 2000. Le RPF de Pasqua est un tremplin politique pour Asselineau qui devient alors membre du Bureau National, directeur des études et porte-parole du parti. C'est par ce biais qu'il est élu Conseiller de Paris en mars 2001 sur une liste qu'il conduisait dans le 19e arrondissement avec 15,8% des voix. François Asselineau reste avec Pasqua jusqu'en 2004, année où Nicolas Sarkozy reprend la présidence du Conseil général mais devient aussi ministre de l'Economie. Asselineau est alors nommé Délégué général à l’intelligence économique à Bercy… par Sarkozy.
François Asselineau adhère à l'UMP à cette époque, il le quittera en 2006 pour fonder son propre parti, en 2007 : l'Union populaire républicaine (UPR). Ce parti, excessivement confidentiel — jusqu'à il y a peu — est porté par son créateur — Asselineau — qui l'anime en permanence, surtout via des conférences mises en ligne sur Youtube. En 2012 François Asselineau se déclare candidat à la présidentielle et parvient à réunir… 17 parrainages. Débute alors, sous le mandat de François Hollande une campagne permanente de l'UPR et de son "chef", sur Internet, principalement. Vidéos Youtube, commentaires sur les blogs, sites d'information, réseaux sociaux : François Asselineau est omniprésent sur le réseau mondial, mais presque totalement absent en dehors. Ses militants s'en plaignent, et accusent d'ailleurs souvent le "système" de "censurer" leur champion. L'UPR revendiquait un millier d'adhérents en 2011, entre 16 et 20 fois plus aujourd'hui selon les membres de l'UPR interrogés. Sur le site du parti, un compteur indique en "temps réel" le nombre d'adhérents : 22724 à l'heure où ces lignes sont écrites. Il est difficile de savoir quelle ampleur ont les idées de l'UPR et son programme dans l'électorat, mais les résultats des quelques élections où le parti s'est présenté peuvent donnent une idée : François Asselineau a obtenu par exemple 0,58 % en 2013 à la législative partielle de troisième circonscription du Lot-et-Garonne.
L'UPR, propose un programme politique basé sur la sortie de l'Union européenne, de l'euro et de l'OTAN pour "regagner une souveraineté perdue", celle des années 60, avec "un retour à l'esprit français traditionnel" selon celui qui a écrit entièrement le programme du parti : François Asselineau. Ce dernier estime n'être "ni de droite ni de gauche", voulant transcender les courants politiques, mais ses discours sur le "rassemblement national", sa vision de l'immigration, le place plutôt à la droite de la droite, voire à l'extrême droite pour de nombreux observateurs de la politique française. Lui, s'en défend en permanence. Quand il lui est demandé là où il n'a pas voyagé — alors qu'il indique avoir visité 85 pays — il répond placidement : "
en Afrique noire". Sur l'immigration, les phénomènes migratoires il précise "
qu'il serait sage de les calmer ces phénomènes migratoires (…)
Il y a beaucoup de français d’origine immigrée qui ne sont pas favorables à une politique d’ouverture comme ça." Et d'ajouter : "
Moi, quand je suis en France j'ai envie d'être en France, quand je suis en Espagne, j'ai envie d'être en Espagne".
Quand François Asselineau parle de l'assimilation des étrangers, de l'intégration française des étrangers il précise : "
Pourquoi on a beaucoup de jeunes français d'origine immigrée à l'UPR ? Parce qu'ils retrouvent l'image qu'ils veulent avoir de la France. Il y a beaucoup de jeunes d'origine maghrébine à l'UPR, et quand ils retournent au bled, ils ne s'y sentent pas à l'aise, ce n'est plus leur pays, et souvent, il y en a beaucoup, ils ne parlent même pas l'arabe (…)
Ca m'est arrivé d'aller en Algérie avec une personne de l'UPR, qui se mariait, et qui ne lisait pas l'arabe, moi il se trouve que je ne parle pas la langue, mais je sais le déchiffrer, donc les panneaux indicateurs, c'était moi qui lui lisais". Et de paraître très fier de cette bonne blague.
François Asselineau adore parler de lui même, de l'histoire de France, de ses analyses sur l'économie, sur l'Europe, de la monnaie, de la souveraineté et de l'identité nationale, des traditions françaises : le candidat de l'UPR est un véritable nostalgique de la France du général de Gaulle, et ne s'en cache pas. Il voue une hargne féroce envers l'"hégémonie américaine", et se voit en capitaine d'un bateau France souverain, dévaluant le franc comme à la bonne époque, dans un pays constitué de 36 000 communes où le repas dominical en famille redeviendrait la norme. François Asselineau, marié, deux enfants, est le candidat de la nostalgie de la présidentielle 2017. Une nostalgie que plébiscitent avant tout les 22 00 membres revendiqués de son parti sur Internet, là où il est crédité de 45% d'intentions de vote, en tête des 11 candidats sur le site
http://candidat-2017.fr/. Un crédit qui tombe à 1% dans les sondages officiels.
Y aurait-il un décalage entre Asselineau ses soutiens, Internet, et la réalité du pays ? Le résultat du premier tour le diront. En attendant, François Asselineau ne doute pas un instant de ses chances, et lance à qui veut l'entendre : "
Quand mon nom apparaît dans un sondage en ligne, on casse la baraque !"