Fil d'Ariane
Le président français Emmanuel Macron a choisi, jeudi 5 septembre, Michel Barnier pour succéder à Gabriel Attal en tant que Premier ministre. Homme de droite, membre des Républicains (LR), il aura la lourde tâche de former un gouvernement susceptible d’éviter la censure parlementaire, après la victoire du Nouveau Front Populaire (NFP) lors des élections législatives de juillet.
Michel Barnier, alors négociateur de l'Union européenne pour le Brexit, lors d'une conférence de presse à Bruxelles, le 24 décembre 2020.
A 73 ans, Michel Barnier, le plus vieux Premier ministre de la Vème République, succède ainsi à Matignon à Gabriel Attal, 35 ans, qui en était le plus jeune. Sa tâche, celle de mettre fin à la plus grave crise politique de la Vème République, s’annonce ardue. Michel Barnier est un homme de droite, membre des Républicains (LR). Or, le Nouveau Front populaire (NFP), coalition des principaux partis de gauche, est arrivé en tête des législatives anticipées, le 7 juillet dernier. L'Assemblée est depuis fragmentée en trois blocs, la gauche, le centre droit et l'extrême droite.
Michel Barnier est doté d'une solide expérience politique en France comme à Bruxelles. Réputé bon médiateur et "pragmatique", il a été le négociateur de l'Union européenne (UE) lorsque le Royaume-Uni a quitté le bloc continental. Cette expérience lui a permis de peaufiner sa stature internationale. Son nom a d’ailleurs circulé, en 2019, pour succéder à Jean-Claude Juncker à la tête de la Commission européenne.
Avant cela, il a siégé au sein de plusieurs gouvernements de droite sous les présidences de Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy. Il a notamment été ministre des Affaires européennes, des Affaires étrangères, de l’Environnement ou encore de l’Agriculture.
"C'est un homme d'État. Un homme de consensus et de négociation comme il l'a prouvé lors des négociations du Brexit, ce qui est indispensable dans la période que nous connaissons", affirme le député LR Vincent Jeanbrun, persuadé qu'il parviendra à rassembler "bien au-delà de son camp". La sénatrice LR, Agnès Evren, salue pour sa part une "méthode Barnier" qui "allie respect de son interlocuteur et solidité des convictions."
Ces qualités ont certes séduit Emmanuel Macron, à la recherche d'une personnalité capable de déjouer une majorité de censure à l'Assemblée. Mais celles-ci ont été plus applaudies à Bruxelles qu'en France, et même dans sa famille politique des Républicains. Il a ainsi échoué, en 2021, dès le premier tour des primaires de LR pour représenter le candidat de la droite à la présidentielle de 2022.
(Re)voir France : le casse-tête de Matignon ou l'équation à plusieurs inconnues
À la suite de cet échec, cet homme à la haute stature et la chevelure blanchie longtemps positionné sur une ligne centriste du gaullisme, a amorcé un virage droitier inattendu. Il a notamment plaidé pour un "moratoire" de trois à cinq ans sur l’immigration.
Ce vieux loup de la politique y est entré en 1973. Les décennies passées à arpenter les allées du pouvoir lui ont forgé une réputation de personne capable d’écouter, d’argumenter et de chercher à convaincre.
"Derrière un air lisse se cache une personnalité torturée. C'est un inquiet et il a besoin d'être conseillé. Il tire sa force d'une équipe de collaborateurs en qui il a une totale confiance", confie l’un de ses proches.
Marié et père de trois enfants, il rappelle volontiers qu'il est un "montagnard", originaire des Alpes françaises. Une manière de marquer sa différence : ne pas faire partie du sérail parisien et ne pas sortir de la prestigieuse Ecole Nationale d’Administration (ENA). Lui est un diplômé de de l'Ecole supérieure de commerce de Paris.
A Bruxelles, dans son bureau, il montrait volontiers à ses visiteurs une photo où il pose aux côtés du triple champion olympique de ski, Jean-Claude Killy, avec qui il a mené à bien l'organisation des Jeux olympiques d'hiver 1992 dans sa ville d'Albertville.
Une autre le montrait lors de la libération de la journaliste Florence Aubenas, otage en Irak, obtenue alors qu'il dirigeait le Quai d'Orsay.
La passation de pouvoir à Matignon est prévu, jeudi 5 septembre à 18H00.