Fil d'Ariane
A l'issue de négociations "sans résultats", le syndicat avait appelé au débrayage des 200 pilotes en CDI embauchés en Allemagne par Ryanair, dans le but d'affecter "toutes les liaisons prévues dans les aéroports allemands sur cette période".
Depuis mi-décembre, la compagnie irlandaise a affronté des menaces de grèves historiques de ses pilotes, en Italie, en Irlande et au Portugal, sur fond de malaise social grandissant.
C’est d’Italie qu'est parti le vendredi 15 décembre le 1er mouvement de grève jamais connu depuis l’envol en 1985 de la compagnie low-cost. Il s'agit dans le pays de la première compagnie aérienne en termes de parts de marché avec 39 millions de passagers attendus en 2018. Deux mille personnes, dont six cents pilotes, travaillant pour la compagnie, sont basées en Italie. Certains sont salariés, d’autres ont une sorte de statut d’auto-entrepreneur.
Pilotes et assistants de vol avaient alors croisé les bras durant 4h, de 13 heures à 17 heures, dans les 15 aéroports desservis par l'entreprise, de Milan à Catane, pour réclamer de meilleures conditions de travail, en terme de contrats et de rémunération,ainsi que la reconnaissance d'une instance unique de représentation du personnel sur le plan européen.
Première compagnie européenne en terme de passagers transportés, Ryanair ne voulait négocier jusqu'à présent avec ses pilotes qu'au sein de comités locaux de représentation. Face à un mouvement de contestation qui promettait de s'étendre ensuite au Portugal, à l'Irlande et à l'Allemagne, la compagnie a amorcé vendredi dernier un virage à 180 degrés en se disant prête à reconnaître des syndicats de pilotes, pour la première fois de son histoire. Le mouvement de grève en Italie a alors été finalement suspendu.
Jeudi 21 décembre, Ryanair est parvenue à écarter la menace d'une autre grève imminente dans son pays d'origine, en reconnaissant officiellement Impact comme interlocuteur syndical des pilotes irlandais de l'entreprise."Reconnaître des syndicats sera un changement important pour Ryanair", a expliqué le directeur général de la compagnie, Michael O'Leary."Nous allons maintenant traiter avec nos pilotes par le biais de structures syndicales nationales reconnues" et nous espérons que ces structures pourront asser un accord avec nos pilotes tôt dans la nouvelle année".
Le PDG de Ryanair l’avait pourtant dit et répété : "Ce n’est pas demain la veille que je reconnaîtrai les syndicats." Afin d’éviter une grève des pilotes ce mercredi, à quelques jours de Noël, l’homme fort de Ryanair a alors visiblement renié une partie de ses principes, tel que la non-syndicalisation des employés, sur laquelle reposait l’entreprise.
Alors que la comission européenne a cosigné en novembre un "socle européen des droits sociaux" à l'occasion du grand sommet européen de Göteborg en Suède, elle reste pour le moment muette face à cette contestation sociale grandissante.
Pourtant, c'est la négation des droits sociaux les plus fondamentaux qui sont pointés du doigt par les salariés de plusieurs pays européens.
Le 14 septembre dernier la Cour de justice de l'Union européenne s'était pourtant positionnée pour sommer la compagnie de mettre un terme à sa pratique de "dumping social" (course au moins-disant social), qui visait à faire signer à ses salariés des contrats de travail selon lesquels ils travaillaient en Irlande, et d'appliquer ainsi le droit du travail irlandais, moins protecteur.
Bien que cette mesure soit encourageante, et même si son application reste encore incertaine, nombreux sont les droits sociaux encore bafoués par Ryanair, dans le silence le plus total de la Comission européenne.