Inflation, guerre en Ukraine, fracture sociale. Le ou la prochain-e président-e devra dès son arrivée à l'Elysée faire face à plusieurs défis aux conséquences durables. Focus sur les points majeurs à régler.
Le prochain président hérite d'une situation économique compliquée, avec une croissance amputée par la guerre en Ukraine et une inflation en embuscade. Côté croissance, on risque de perdre cette année
"2 points de croissance par rapport aux 4% qu'on pouvait escompter", estime Patrick Artus, chef économiste de Natixis.
(Re)lire Présidentielle 2022 : les programmes d'Emmanuel Macron et de Marine Le PenMais le plus gros risque pour l'économie,
"à court terme, c’est l’inflation", assure Emmanuel Jessua, économiste à l’institut Rexecode. De 4,5% en mars, elle pourrait s'accélérer avec les pénuries liées à la guerre en Ukraine, et affecter directement le pouvoir d'achat des plus modestes.
Les marges de manoeuvre sont limitées, alors que la crise sanitaire a creusé le déficit commercial (6,5% du PIB fin 2021) et la dette (112,9%). Cette dérive des finances publiques complique le financement des programmes des candidats (chiffré à 50 milliards par Emmanuel Macron, et 68 milliards par Marine Le Pen). Surtout si la croissance ralentit du fait d'une hausse des taux par la BCE.
Le terrain économique et social s'annonce donc mouvant pour engager une éventuelle réforme des retraites, l'un des enjeux des années à venir. Et la fête du travail du 1er mai s'annonce déjà agitée, les responsables de la sécurité anticipant une conjonction des mécontentements.
"Les premières annonces du candidat élu seront décisives", ajoute une source policière.
"Dimanche soir, nous verrons les résultats avec des fractures très marquées selon la distance de résidence aux grands métropoles, le niveau d’études, mais aussi le clivage générationnel..." estimait jeudi 21 avril sur France Inter Jérome Fourquet, auteur d'une étude pour la fondation Jean-Jaurès et le Figaro, qui voit
"un vrai clivage de classe" entre une
"France d'en haut" et une autre
"d'en bas".
(Re)voir Présidentielle 2022 : sécurité et justice, quels projets pour Emmanuel Macron et Marine Le Pen ?La crise du Covid a mis en avant ces lignes de faille économiques, sanitaires, territoriales contribuant à un malaise qui avait déjà explosé lors de la crise des
"gilets jaunes". Une élection de Marine Le Pen pourrait provoquer des tensions ou des manifestations immédiates. Emmanuel Macron suscite aussi une vive hostilité dans une partie de l'électorat, ce qui affaiblirait l'adhésion à sa politique.
"La clé de voute du prochain quinquennat sera la fabrique du consentement", affirmait récemment Alexandre Malafaye, président du think tank Synopial, sur BFMTV.
D'autant que la décomposition de la gauche et de la droite traditionnelles atteint un niveau inédit, à deux mois des législatives.
"Vivement le troisième tour", a déjà lancé Jean-Luc Mélenchon.
Le quinquennat débute alors que le conflit en Ukraine s'installe dans la durée.
Avec deux mois encore de présidence française du Conseil de l'UE, le prochain chef de l'Etat devra préserver l'unité affichée par les 27 depuis le début de conflit, mise à rude épreuve par la lancinante question des achats de gaz et de pétrole russes.
La concertation avec Berlin et Washington sera primordiale, alors que les deux candidats en lice n'ont pas la même conception des relations avec le Kremlin.
Le nom du prochain président affectera aussi la position de la France sur l'Otan, qu'Emmmanuel Macron soutient alors que Marine Le Pen a dénoncé son élargissement à l'est.
Alors que canicules et inondations se multiplient sous l'effet du réchauffement de la planète, un des défis sera réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40% d'ici 2030 (par rapport à 1990), comme la France s'y est engagée dans le cadre des accords de Paris.
(Re)voir Présidentielle 2022 : un "climato-cynique" et une "climato-sceptique" dénonce Greenpeace
Cela passe par une décarbonation des transports, de l'agriculture, de l'énergie... d'autant que l'engagement devrait être relevé dans le cadre des nouveaux objectifs climatiques de l'Union européenne.
Selon le dernier rapport des experts climat de l'ONU (Giec) publié la semaine dernière, le monde a trois ans pour faire plafonner les émissions de gaz à effet de serre et espérer un avenir
"vivable".
Pour le groupe de réflexion I4CE, ce nouveau quinquennat s'ouvre avec une
"double opportunité pour élaborer une véritable stratégie de financement de la transition : la loi de programmation des finances publiques et la loi de programmation énergie climat".